Vincent Prevost : “Se prendre la tête, c’est quand on a trop misé”

Vincent Prevost coécrit avec Rémi Gémot. “Pariez sur le cyclisme, votre futur complément de salaire”. 1er livre écrit dans ce domaine.
VIncent Prevost animateur radio et grand passionné de cyclisme
VIncent Prevost animateur radio et grand passionné de cyclisme

Animateur sur Skyrock depuis 1998 et passionné de cyclisme depuis toujours, Vincent Prevost sort un livre, coécrit avec Rémi Gémot. “Pariez sur le cyclisme, votre futur complément de salaire”. Premier livre écrit sur le pari sportif en cyclisme, un secteur en pleine expansion, les deux auteurs veulent aider et donner des clés aux parieurs et aux amoureux du vélo, dans un sport dit de niche, où les possibilités de gains peuvent être importantes. Il nous raconte son parcours de parieur, son feeling et ses conseils. Comment il s’est passionné de vélo et son interaction avec la communauté cyclisme sur Twitter. Une communauté que l’animateur encense !

Crédit : Vincent Prévost

Vincent Prevost et Rémi GémotPariez sur le cyclisme, votre complément de salaire” : 19,99€ sur Amazon.fr

Retrouvez Vincent Prevost tous les jours de 12h à 16h sur Skyrock.

VINCENT PREVOST : SI LIONEL MESSI SE TAPE L’ORTEIL AU RÉVEIL, LES COTES SERONT AJUSTÉES AVANT MÊME QU’IL AIT FINI SA BISCOTTE

Dans le football, il y a des algorithmes. Les bookmakers payent un site suisse qui ajuste toutes les côtes. Tout est léché et il n’y a pas d’erreurs. J’ai pour habitude de dire que si Lionel Messi se tape l’orteil, le matin au réveil, avant de prendre son petit-déjeuner, la côte du Barça du match suivant sera déjà réajustée, avant même qu’il ait terminé sa biscotte. En vélo, c’est l’humain qui côte. Les sites de paris n’ont pas l’algorithme précis, pour définir les côtes. Elles sont faites manuellement et par des personnes qui travaillent souvent dans d’autres sports. On se retrouve avec un humain qui côte. Vu que nous sommes également humains, la partie devient beaucoup plus égale. C’est plus facile de battre un humain qu’un robot.

Ce sera compliqué de voir un algorithme intervenir en cyclisme. Un algorithme peut difficilement définir quelle va être la stratégie d’un directeur sportif durant une course. On voit aussi les incertitudes sur la météo, sur le sens du vent. Même si un algo commençait à prendre ces critères en compte, les parieurs ne le prendraient pas en compte, du moins la masse. Un bookmaker va préférer avoir tort avec la majorité des parieurs, qu’avoir raison tout seul. Si Roglic est favori d’une épreuve, 80% des gens sont persuadés qu’il est favori, mais que les bookmakers savent que Pogacar va gagner, ils ne coteront pas Pogacar mieux que Roglic. Ils réajustent en fonction de la masse de paris.

UN CONNAISSEUR, S’IL A UNE MAUVAISE STRATÉGIE D’INVESTISSEMENT, N’OPTIMISE PAS SA CONNAISSANCE

D’ailleurs, c’est souvent ce qu’on voit sur les sites, quand les cotations sortent. Une demi-heure après, on voit des fluctuations de côte, parce qu’ils se sont plantés, lors de la sortie. Certains attendent les sorties de côte, comme on peut attendre les sorties des soldes. Pour appuyer sur les erreurs. Si, un algorithme venait à intervenir en vélo, il y aurait encore possibilité de le battre, car il y a tellement de données à prendre en compte. Ce serait comme mettre des robots en biathlon, on ne peut pas être dans la tête d’un biathlète au moment du tir. Sur tous les sports de niche et sur tous les sports chronométrés, c’est extrêmement difficile de robotiser. Ce sont des sports non épluchés à fond par les bookmakers et il y a de l’argent à gagner.

Je parle de bon complément de salaire dans le livre, mais il faut une certaine assiduité. Notre livre s’adresse à deux catégories de personnes. Les parieurs non spécialistes en vélo, à qui on va donner des armes pour tirer leur épingle du jeu en vélo. Et aux passionnés de vélo, qui ne parient pas ou peu. Ils ont le savoir technique pour être gagnants en paris sportifs. Ceux-là, on va leur donner une stratégie de betting. C’est Rémi Gémot qui intervient sur cette partie-là et explique quelles sont les stratégies.

On se place plus comme un investisseur, pour optimiser et dégager un ROI positif. Je donne l’exemple de Jacky Durand sur Eurosport. Il est reconnu par la communauté vélo comme étant actuellement le meilleur consultant. Avec toute sa connaissance du vélo, s’ il a une mauvaise stratégie d’investissement, il ne réussira pas à optimiser sa connaissance. On s’adresse aussi aux parieurs récréatifs, qui voudraient passer à quelque chose d’un peu plus sérieux.

VINCENT PREVOST : PARIER BIEN AVANT LE DÉBUT D’UN GRAND TOUR PEUT ÊTRE INTÉRESSANT !

Les meilleurs coups sont, pour moi, sur les courses à étapes d’une semaine, comme en ce moment le Tour du Pays Basque. Sur les grands tours et sur le Tour de France, quand il y a des petites infos, va de suite être pris en compte par les bookmakers et la majorité des parieurs. Ce sont des épreuves très exposées. On est aussi des chercheurs d’infos que les bookmakers n’auraient pas. Sur les épreuves moins grand public, c’est là où il y a le plus à optimiser. Il y a des déclarations de coureurs qui disent qu’ils ne vont pas jouer l’étape à fond, qu’on peut lire dans les sites spécialisés. Souvent, la côte ne sera pas réajustée. Mais même sur les Grands Tours, il y a des choses à faire.

Parier à long terme ou le jour même ? J’ai envie de dire que tout dépend des courses. J’ai envie de dire que sur les Grands Tours, il vaut mieux se placer à l’avance et chercher à anticiper. L’an dernier, Roglic est placé à 7 sur le Tour de France fin avril. Après le Dauphiné, il n’était plus qu’à 2,5. Certains, qui l’avaient pris à 7, ont pu faire des arbitrages et prendre un autre coureur. Quand on prend la côte à 7 et qu’elle diminue à 2,5, on peut aller parier sur d’autres coureurs et dégager un bénéfice.

De toute manière, il n’y a que sur les Grands Tours qu’on peut parier à l’avance. Sur le Giro, elles sont tombées mi-mars. Il y a quelque chose qui est intéressant, quand on parie à l’avance, c’est que les bookmakers mettent tous les coureurs potentiels en cotation. Certains ne feront pas la course, parce qu’ils se blessent où ne sont pas alignés avec leur équipe. Forcément, quand on retire un potentiel favori, cela diminue la côte de ceux qui restent en liste. Cela ne coûte pas grand-chose d’anticiper les coups et c’est là qu’on peut prendre les plus grosses côtes.

AVOIR UNE BONNE ANALYSE EST ENCORE PLUS IMPORTANT QUE LA GAGNE

La gagne, c’est ce qui me plait le plus dans le pari sportif (rires). Cela dit et j’insiste beaucoup dans le livre, c’est que, le plus important, comme le poker, ce n’est pas de gagner, mais d’avoir la bonne analyse. Si vous avez eu une bonne analyse de la course mais que cela ne passe pas, par manque de chance, ce n’est pas grave ! On a quand même eu une bonne analyse. En course, il y aura toujours des éléments qu’on ne maîtrise pas. Il faut se focaliser là-dessus.

Pour revenir sur le Tour des Flandres et Asgreen. Nous ne sommes pas dans les petits papiers de la Deceuninck, mais il est possible, au vu du scénario de la course, que le Danois était le coureur protégé depuis le début. Les entraîneurs ont les données et connaissent la forme de leurs coureurs. Franck Alaphilippe, qui entraîne Julian, disait 2-3 jours avant la course, qu’il n’était pas au mieux de sa forme. Ce n’est pas du papier à musique, mais ils savent qui est le plus fort. Même si ça peut se réajuster durant la course.

En pari sportif et dans la stratégie, il faut savoir jouer qu’une petite partie de son capital. Si on se mange la tête parce qu’on a perdu un pari, c’est qu’on a trop misé. J’en profite pour dire qu’il ne faut pas se rendre fou avec ça et jouer de manière raisonnable et raisonnée. De toute manière, on fait tous des mauvaises séries. Je vois des gens qui mettent des sommes ahurissantes, par rapport à leur capital. Moi, ça m’hérisse les poils et cela me fait mal pour eux. Après, évidemment, quand t’es à deux doigts de passer une grosse côte et que cela ne passe pas, cela fait toujours un peu mal.

Le livre de Vincent Prevost disponible sur Amazon

VINCENT PREVOST : CONTENT DE GAGNER MAIS CONTENT DE PERDRE SI UN COUREUR QUE J’AIME GAGNE

Sur le chrono de Paris-Nice, j’avais joué Bisseger à 5,75. J’étais passé à côté, comme les Bookmakers, de Rémi Cavagna, côté à 14 je crois. Il y avait un vrai manque de respect pour lui. Certes le parcours était vallonné et les books ont dû considérer que c’était trop dur pour le Français. Il perd pour moins d’une seconde. J’étais très content de prendre ma côte, mais, si Cavagna avait gagné, j’aurais été aussi super content pour lui. Même si je préfère passer ma côte (rires). Quand on perd face à un coureur qu’on aime bien, cela amortit la défaite. Mais, être parieur, c’est aussi savoir se dégager des émotions. On sait qu’en foot, il ne faut jamais parier sur l’équipe qu’on supporte. Les bookmakers gagnent énormément d’argent sur ça. C’est leur vache à lait.

On peut parier sur un coureur qu’on aime, mais il faut garder une bonne analyse. Avant le Tour 2019, je prends Thibaut Pinot à 19. Je crois qu’il était à 1,95 au moment où il abandonne. J’adorerais qu’il fasse un truc sur le Tour d’Italie. Maintenant, si je devais miser sur un Français podium, je prendrais plutôt Romain Bardet. Il peut faire quelque chose.

UNE CULTURE VELO PRÉSENTE DEPUIS TOUJOURS DANS LA FAMILLE

Ma passion pour le vélo est présente depuis toujours. Depuis tout petit, c’était les Tour de France, comme la majorité des gens qui s’intéressent au vélo. On avait hâte d’arriver au mois de juillet pour les retransmissions télé. Je suis né en 1976, à l’époque où il n’y avait que trois chaînes à la télé et voir du sport en direct était quelque chose encore exceptionnel. Maintenant, grâce aux chaînes spécialisées, on voit quasiment l’intégralité de toutes les épreuves. C’est un vrai plus. Il y avait une culture vélo dans la famille. Mon père, mon oncle qui avait une boutique de vélo en Charente à Angoulême. J’étais aussi assez foot, mais depuis une quinzaine d’années, c’est davantage le vélo. Ce qui me fascine, ce sont les personnages.

Les coureurs, l’histoire qu’ils racontent, j’aime ça ! L’univers me fascine, ce sport si individuel mais qui, en fait, est tellement collectif ! On ne décrit pas une passion. Ma plus grande émotion reste le Tour de France 89, avec le duel Fignon-Lemond. C’était complètement dingue. Les plus anciens diront sans doute Anquetil – Poulidor en 1964. Dans ma génération il y a Fignon – LeMond et cette dernière ligne droite où Patrick Chêne fait le décompte et où on comprend que c’est perdu à 200 m de la ligne, sur l’écart le plus serré de tous les temps.

VINCENT PREVOST : JE VEUX ADRESSER UN MESSAGE DE SOUTIEN À NACER BOUHANNI

Ce Tour de France a été génial du début à la fin. Il n’y a pas eu une seule étape considérée comme étape de transition. Dès le prologue inaugural, Delgado arrive avec plus de deux minutes de retard sur le plot de départ. C’est fou de A à Z, Fignon et LeMond se renvoyaient le maillot jaune tous les jours. Un était mieux un jour et l’autre le lendemain, tel un ping-pong. LeMond gagne sans équipe, il revenait de nul part, avec son accident de chasse qui a bien failli lui coûter sa carrière. Il est dans une petite équipe Belge, sans pointures. Il s’accroche, il suit les roues des Système U. Ce Tour est monumental. J’adore également les Strade Bianche. Les paysages sont magnifiques, il y a une ambiance de folie, le parcours, avec l’arrivée en Toscane, est magnifique.

Actuellement, mon coureur préféré est Nacer Bouhanni. J’en profite pour lui adresser un soutien. On sait qu’il vit des moments pas simples, victimes d’insultes racistes, de manière massive sur les réseaux sociaux, ces derniers jours. Les haters vont aussi dénigrer ses victoires. Mais il a gagné sur le Giro en ayant le cyclamen, sur la Vuelta. Il a un gros palmarès. Sa dernière victoire sur la Vuelta, il va la chercher dans des conditions mentale difficiles, au sein de son ex-équipe de la Cofidis, où il se faisait secouer. C’est un mec qui a un gros mental et je suis convaincu qu’il va rebondir et nous en claquer une belle. Sinon, j’ai beaucoup aimé Thomas Voeckler. Quand j’étais petit, j’adorais Thierry Claveyrolat, meilleur grimpeur du Tour 1990 et qui s’est suicidé après sa carrière.

LA COMMUNAUTÉ TWITTER EST REMPLIE DE BONNES PERSONNES

La communauté vélo sur Twitter est remplie de bonnes personnes. On peut se prendre la tête parfois. Les tensions sont souvent liées sur l’époque Armstrong/EPO. Est-ce qu’on réhabilite ou non. Est-ce que ce sont des champions ou des escrocs. Quand on sort de cela et qu’on compare à la communauté football ou tennis, avec des personnes très agressives, aussi par rapport aux paris sportifs. La communauté vélo est remplie de passionnés, avec 98% de bons mecs. On voit les échanges, avec les commentateurs et journalistes, qui se passent dans un bon état d’esprit. Surtout quand on sait à quel point il peut y avoir de l’agressivité dans un réseau social.

L’échange et le partage constituent cette base de culture vélo, qui me sert aussi pour les paris sportifs. On voit des petits comptes, il y a un mec qui s’appelle Yassine Ben Rajeb, un compte qui n’a pas tant d’abonnés que ça, mais il a des analyses pertinentes. On voit un Patrick Chassé parler de ses analyses sur La Chaine L’Equipe. Ses analyses en sprint, sont du niveau de la palette à Jacky. C’est génial, car on voit des gens qui sont vraiment intéressants. Les échanges sont enrichissants !

VINCENT PREVOST: IL PEUT Y AVOIR DES RIVALITÉS SANS DÉTESTER UN ADVERSAIRE

Je rejoins ce que dit Nicolas Fritsch, commentateur sur Eurosport. Il faisait des lives sur Instagram, après les étapes du Tour, qui étaient passionnantes. Le jour où Roglic perd le Tour, un type est arrivé pour se moquer de la Jumbo. Nicolas a dit : “Je ne veux pas de ça”. Et il a raison, car en vélo il n’y a pas ce côté dérive. On peut être supporter d’un coureur sans détester un autre.

Ce n’est pas parce que j’aime Nacer Bouhanni que je déteste Arnaud Démare. Il peut y avoir des rivalités entre coureurs mais on peut ne pas détester un adversaire. Idem au niveau des équipes. J’imagine qu’entre B&B Hôtels et Arkéa-Samsic, il doit forcément y avoir des rivalités. Mais j’aime les deux équipes. Si on est supporter d’Arkéa, on ne va pas détester B&B ou Total. Au bord des routes, on applaudit l’ensemble du peloton, sauf s’il y en a un qui a vraiment des casseroles. C’est la dimension populaire et le sport qu’on aime.

LA CRISE COVID A MONTRÉ L’HYGIÈNE DE VIE DES COUREURS

Au niveau du dopage, tout est compliqué. On a l’impression que, dès qu’il y a une affaire, cela rejette le discrédit sur tout le peloton. Cela plombe les efforts de tous ceux qui sont propres et qui jouent le jeu. Après, quand on avance certaines choses sur certains coureurs, il faut en amener les preuves. Le peloton traîne derrière lui Armstrong et l’EPO. Cela paraît compliqué de faire changer l’image au grand public. Cela dit, les sponsors sont encore là. La crise Covid a montré l’hygiène de vie des coureurs. Quand on compare avec d’autres sports, on voit que les bulles sanitaires tiennent bon, avec aucun vrai cluster. Ce sont des gens qui sont exemplaires.

On a comparé les temps de montée, sur l’UAE Tour. Ils battent le record à Jebel Hafeet. Cela n’avait pas trop roulé avant et ils avaient vent dans le dos. Nicolas Fritsch a dit qu’il n’y a qu’un point comparable, c’est l’Alpe D’huez. Souvent abordé dans les mêmes conditions, avec une montée où la prise au vent n’est pas énorme, car cela monte en lacet. Le record c’est Pantani et il met plus de 2 minutes aux meilleurs aujourd’hui. Malgré les différents progrès en matériel, alimentation et sur le bitume. Bien sûr, il y a toujours des tricheurs. Si on lit le livre du regretté Philippe Gaumont, il explique que l’EPO transforme un âne en cheval de course. Il raconte ses différences de résultats. On peut parler de Bjarne Riis à Hautacam.

VINCENT PREVOST : SEUL LE TEMPS FERA OEUVRE AUPRÈS DU GRAND PUBLIC

A contrario, un Roglic n’a jamais écrasé la course comme ça. Il a une bonne équipe, mais lui se “contente” de suivre, en décrochant la flèche dans le dernier kilomètre. Mais jamais avant. Il grapille, prend des bonifications. On n’est pas sur Pantani qui part à 10 km de l’arrivée en mettant deux minutes à tout le monde, où Armstrong qui avalait Laurent Roux dans l’Alpe, alors que le Français avait 7 minutes au pied de la montée. On ne voit plus ça aujourd’hui. Je pense que cela va mieux. Seul le temps fera son œuvre auprès du grand public. Et effacera les années 90. Ce serait bien que tout ce qui est fait en lutte antidopage en vélo, soit appliqué aux autres sports.

Je prends l’exemple de Sylvain Chavanel qui racontait qu’une fois, il posait ses enfants à l’école et qu’il a dû rentrer illico parce que les mecs de l’AMA l’attendaient devant chez lui. Je ne suis pas sûr qu’on réserve le même traitement à Kylian Mbappe ou Neymar.

VINCENT PREVOST 

Après Vincent Prevost, retrouvez notre interview de Marion Rousse : ICI

*Le pari sportif est interdit aux mineurs en France. Jouer excessivement comporte des risques.

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