DAMIEN « SHEMEK » SOULAGNET : MON DECRYPTAGE DE LEAGUE OF LEGENDS POUR LES NON INITIÉS

L’eSport est en plein essor dans le paysage médiatique français avec le jeu League Of Legends en fer de lance. Peu accessible pour les néophytes, le nouveau joueur de la Team Vitality Academy, Shemek” nous donne les clés pour comprendre le jeu phare de type MOBA (Multiplayer online battle arena).
Shemek
(c) Timo Verdeil
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Les athlètes sont souvent imperméables à toute communication avant que la compétition ne soit terminée. La rubrique « Dans la peau » permet à un sportif de partager avec vous ces moments secrets et déterminants qui forgent la réussite de leurs projets.

L’eSport est en plein essor dans le paysage médiatique français avec le jeu League Of Legends en fer de lance. Peu accessible pour les néophytes, le nouveau joueur de la Team Vitality Academy, “Shemek” nous donne les clés pour comprendre le jeu phare de type MOBA (Multiplayer online battle arena). Crédit photo : Timo Verdeil

J’ai commencé à vraiment accrocher avec les jeux vidéo chez mon cousin sur des titres en ligne puis sur des jeux comme Dota ou Warcraft 3. Au collège, mon niveau s’est vraiment amélioré sur le 4ème opus, World of Warcraft et j’ai pu rentrer dans une guilde (communauté de joueurs) avec des personnes bien plus âgées que moi. L’un des membres de notre guilde m’a alors fait découvrir League Of Legends et j’ai tout de suite accroché avec ce concept de champion. La stratégie alliée à tous ces duels entre joueurs était assez novatrice à l’époque.

MA ROUTE VERS LE HAUT-NIVEAU

J’ai vite atteint un assez bon niveau (top 100 français en parties ranking), mais j’ai mis plus de temps à rejoindre l’eSport. J’habitais à Pau et il m’était compliqué de partir tout seul sur des compétitions à Lyon ou à Paris. De plus, j’avais encore en moi la volonté de suivre le schéma classique en allant en cours et en poursuivant mes études. Je me souviens encore de ma première LAN (tournoi en réseau local) à Pau que nous avions gagné avec des amis.

En continuant à performer en solo, mais sans équipe, certaines personnes m’ont poussé à m’y mettre de façon plus professionnelle en envisageant un BTS plutôt qu’une prépa. Je pensais vraiment réussir à combiner études et LoL, j’ai donc opté pour une prépa ingénieur, mais ce fût assez compliqué avec pas mal de péripéties vidéoludiques : première équipe avec Nisqy, Tiger et Nerroh, puis nous avons rejoint la team Infamous avec laquelle nous finissons 5ème de la Lyon e-Sport et nous remportons l’ESL France.

J’ai un peu mis le jeu de côté durant la seconde année de ma prépa car je n’étais pas à mon avis au niveau qu’on attendait de moi. Je faisais quand même quelques LAN sans vraiment appartenir à de team fixe et à la fin de l’année scolaire j’ai rejoint AAA avec qui j’ai pu gagner quelques tournois.

En entrant en école d’ingénieur à Tours, j’avais plus de temps pour me concentrer sur LoL. J’ai d’abord souhaité reprendre tranquillement, dans une team (E-Corp) où je n’allais pas être le maillon faible avec de bons joueurs comme Targamas ou Tiger. On naviguait dans le top 5 français, mais certaines choses n’allaient pas et je suis finalement parti. Quelques mois plus tard, Shanky, l’ancien manager des E-Corp m’a contacté pour rejoindre sa nouvelle structure, les Gamer’s Origin. C’est vraiment le moment où j’ai commencé à devenir un pro-gamer. Cette structure m’a permis d’avoir mon premier salaire et nous avons gagné quelques grandes compétitions comme la Lyon E-Sport ou la Gamers Assembly. Shanky est sûrement la personne qui me connait le mieux dans l’eSport, on reste très proche même si on ne travaille plus ensemble à l’heure d’aujourd’hui.  Pour vous expliquer la façon dont les contrats pro sont gérés dans l’eSport, nous fonctionnons à l’image des sportifs classiques dans la plupart des sports collectifs avec des contrats à durée déterminée.

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Bien que je voulais continuer mes études, ça devenait compliquer de suivre dans certaines matières. J’ai alors un peu coupé l’école d’ingénieur en me disant que j’allais reprendre en janvier de cette année ou au pire aller à la fac, ce que je n’ai finalement pas fait. Après une belle année chez Gamer’s Origin qui m’aura permis de passer complètement pro à la fin de l’été 2017, j’ai rejoint il y a quelques semaines la Team Vitality pour de nouvelles aventures.

UNE SCÈNE E-SPORT DIFFICILE À COMPRENDRE

La principale difficulté pour que League Of Legends continue sa progression médiatique auprès du grand public reste que le jeu n’a aucun lien avec la réalité. Des jeux de sports comme FIFA ou de guerre comme Counter-Strike GO sont facilement décryptable car les mécaniques de gameplay sont assimilables à des éléments connus de tous.

LoL pourrait s’apparenter à une sorte d’Hunger Games avec deux équipes de 5 joueurs qui auraient des pouvoirs spéciaux à leur disposition.

L’autre complexité reste le fonctionnement des compétitions. Aujourd’hui il existe différentes ligues classées selon leur niveau d’importance, avec des ligues principales (LCS) qui sont séparées en région (Amérique du Nord, Europe, Chine…), des ligues secondaires (Japon, Amérique Latine etc…) et même des championnats régionaux (CS) qu’on pourrait assimiler à une seconde division dans des pays comme la France, l’Allemagne ou l’Espagne.

Ces circuits nationaux ont été créés pour développer de nouveaux talents et pour permettre aux ligues principales de mettre en place dans le futur un système de franchise afin d’éviter les relégations et permettre aux sponsors d’investir durablement. De plus des moyens importants sont mis en place pour rendre ces championnats secondaires attractifs avec notamment des cashprizes (gains) bien plus élevés. Il y a environ une dizaine d’équipes dans chacune de ces ligues qui se disputent les meilleures places pour gagner la session de printemps ou la session d’été. Selon les points accumulés, celles-ci se qualifient pour deux tournois paneuropéens : l’un durant le segment de printemps, l’autre durant le segment d’été.

Les équipes et joueurs issus de Corée du Sud restent au-dessus des autres aujourd’hui. En Europe, nous ne nous rendons pas encore compte du degré d’investissement nécessaire, certains sont encore là pour s’amuser. Dans mes premières équipes, certains joueurs se levaient trop tard ou s’en fichaient des entraînements. Il n’y a pas encore assez de joueurs pros dans l’hexagone pour mettre la pression sur les titulaires. Le nombre croissant de compétitions en France va améliorer cet état de fait et la notoriété du jeu.

En Corée du Sud, le statut des pro-gamer est différent, les médias en parlent beaucoup, les coachs sont ultra-respectés et le niveau d’autonomie et de concentration est optimal chez les joueurs.

LEAGUE OF LEGENDS, ENTRE STRATEGIES ET DUELS

Le déroulement d’un match est plutôt simple : deux équipes de 5 joueurs (qui dirigent 1 champion chacun) s’affrontent de chaque côté avec pour volonté de détruire la base ennemie et donc d’annihiler les tours et les petits monstres qui la composent. Durant la partie, il est important de gagner de l’argent ou de l’expérience en tuant certains monstres ou même les champions adverses, afin d’avoir le niveau nécessaire pour réussir à détruire la base.

Le format des compétitions varie entre 1 match gagnant pendant les phases de poules à des Best of 3 ou 5 pour les play-offs et les finales.

Shemek dans un match avec sa nouvelle team, Vitality Academy

La carte est toujours la même, le seul changement s’effectue par la sélection de ton champion qui peut avoir une influence stratégique selon ses capacités. Il y a environ 150 champions dans le jeu avec une sorte de turnover et de modification des spécificités par l’éditeur du jeu qui peut influencer le choix des joueurs.

Pour mieux comprendre un match de LoL, il faut connaître les différents postes dans une team :

  • Botlane support : il s’occupe de la ligne du bas de la carte, la botlane. Dans LoL tu peux mettre des sortes de caméras sur certaines zones qui ne sont pas visibles à la base. Nos champions ont un champ de vision limité et grâce à ce dispositif on va avoir une meilleure vision de la carte. Il est celui qui prendra le moins de ressources.
  • Botlane AD Carry : est une sorte d’archer sur un champ de bataille. Il est là pour faire énormément de dégâts et tuer un maximum de monstres. Il a donc besoin d’argent afin d’être optimisé et sa puissance a forcément un défaut, il est très fragile.
  • Midlane : Sur la ligne du milieu de la carte, le midlaner est une sorte de mage qui fait beaucoup de dégât, mais brièvement. Il a lui aussi besoin de beaucoup de ressources pour être optimisé et d’être seul pour ne pas partager l’expérience gagnée en tuant des ennemis.
  • Toplane : A l’image du support, il a moins besoin de ressources. La principale caractéristique du toplaner est de pouvoir se téléporter à certains endroits de la carte. Il peut être soit un tank (option défensive utile s’il se retrouve contre plusieurs adversaires) soit un combattant.
  • Jungle : Le dernier joueur est entre les lignes pour tuer le maximum de monstres. Le jungler peut également aider le toplaner afin de donner un avantage lors d’un combat contre un champion ennemi.

Les spectateurs sont en général assez fans du midlaner (comme Faker) et de l’AD Carry. Personnellement je joue toplaner et ma spécificité est vraiment de pousser la réflexion assez loin pendant une partie tandis que d’autres joueurs fonctionnent vraiment plus à l’instinct.

Avant un tournoi ou un match, les joueurs peuvent regarder quelques matchs d’équipes coréennes pour prendre exemple. En général c’est le coach qui s’occupe de l’aspect stratégique du jeu.

Il y a de nombreuses stratégies d’équipe, une des plus classiques est la « team fight » où tu mets un toplaner en tank solide et tu vas surtout jouer autour de la botlane et de la jungle. Une autre stratégie serait de privilégier le Toplaner afin que personne ne puisse le battre en un contre un. L’équipe adverse sera obligée de lui envoyer deux champions et ça va forcément créer une sorte de déséquilibre. Enfin une dernière stratégie pourrait être le fait de prendre des champions capables d’infliger des dégâts de loin, les ennemis devront ainsi se soigner très vite dans leur base et cela leur fera certainement perdre une tour.

Jouer en compétition est plaisant, on est assez proche de ses coéquipiers. De plus, peu de joueurs sont individualistes, on peut se démarquer par nos qualités, mais seulement en jouant comme un vrai joueur d’équipe.

Avec la team Vitality, en continuant à être professionnel et avec de l’entraînement je vais bien progresser. J’espère continuer à vivre des moments sympa grâce à LoL et si un jour ça doit s’arrêter, je reviendrais sans souci à une vie un peu plus normale.

SHEMEK

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