Cyclisme JO. « Plus vite, plus haut, plus fort ». La devise olympique a été respectée à la lettre ce matin lors de la course en ligne de cyclisme hommes. Un final absolument épique, des noms tous plus clinquants les uns que les autres, et un scénario rendu d’autant plus sublime par la récompense allouée au vainqueur, l’or olympique. Les mêmes coureurs qui se battent toute l’année sur les routes des Grands Tours, mais aussi des courses d’un jour. Le parcours, la distance, le plateau, toutes les caractéristiques d’un Monument étaient au rendez-vous. Avec le suspens qui accompagne souvent les arrivées à Liège, Côme, Roubaix et d’autres.
Cyclisme JO : Une échappée partie de loin, facilement contrôlée
Aujourd’hui, c’était le circuit de Fuji, qui accueillait un temps la Formule 1 comme Imola – théâtre des Mondiaux de l’automne dernier – qui devait consacrer un héros, et trois heureux. Un circuit caché derrière les premiers contours du renommé Mont Fuji, que le peloton avait à escalader en milieu de course. A cet instant, une échappée cosmopolite s’était constituée, avec Juraj Sagan ou Nic Dlamini parmi les plus connus. Jusqu’à vingt minutes pour ce groupe de tête qui s’était extrait dès le départ du Musashinonomori Park, et dont l’avance se réduisait considérablement dans les pentes du Fuji Sanroku (14,5km à 6,0%). Sous l’impulsion de Jan Tratnik, pour la Slovénie, et de Greg Van Avermaet, le Belge champion olympique en titre qui n’hésita pas à se vouer à la cause de son leader Wout Van Aert, l’écart dégringolait.
Si les premiers mouvements d’outsiders que l’on aurait pu imaginer dans cette ascension – à une centaine de kilomètres de l’arrivée tout de même – n’ont pas eu lieu, le peloton s’était considérablement réduit. Geraint Thomas, tombé un peu plus tôt, avait lâché prise, comme Omar Fraile. Dans la descente, les Italiens ont essayé de perturber la chasse aux échappés, qui furent repris à une cinquantaine de kilomètres de l’arrivée. La tension montait. C’est sans doute parce que tout ce qui restait d’un peloton bien mâché physiquement par la chaleur, la moiteur du climat japonais, voyait s’approcher de plus en plus le terrible Mikuni Pass (6,8km à 10,1%). Positionné en semi-juge de paix, pas comme le Gramartboden des Mondiaux d’Innsbruck en 2018, car plus loin de l’arrivée (32km) et permettant les regroupements.
Le Mikuni Pass a été déterminant
Certains avaient tenté d’anticiper, comme Remco Evenepoel, Vincenzo Nibali ou Wilco Kelderman, mais le gros de la décision allait se faire dans les rampes les plus dures. La Belgique continua son tempo effréné, par Tiesj Benoot et Mauri Vansevenant. Wout Van Aert restait à l’abri, et il ne prit d’ailleurs pas l’initiative d’attaquer dans la montée. C’est le récent vainqueur du Tour de France, Tadej Pogacar, qui attaqua en puissance, assis sur la selle, sans se faire prier. Rejoint par Brandon McNulty et Michael Woods, le slovène imposa sa loi pendant plusieurs kilomètres. Mais derrière, une dizaine de coureurs n’était pas résignée. Van Aert, au prix d’une ascension linéaire impressionnante, ramena sur la tête Carapaz, Uran, Mollema, Kwiatkowski ou encore David Gaudu.
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Comme prévu, le Mikuni Pass avait joué son rôle d’éparpilleur, mais tout restait à faire. Une vraie course d’un jour, avec des attaques, des scènes de surplace, alors que l’on entamait la sixième heure de course, pouvait démarrer. Presque tout le monde tenta, mais Wout Van Aert ramenait la meute à chaque fois. Sauf une. Brandon McNulty, encore lui, et Richard Carapaz, flairaient le bon coup sur un talus, et prenaient rapidement du champ. A ce jeu-là, on l’avait vu encore régulièrement sur le Tour, les attaquants l’emportent très souvent. Malgré le travail immense de Van Aert, l’écart grimpait. Jusqu’à une nouvelle rampe, à quinze kilomètres du but. Où le Belge avait décidé qu’il n’en avait plus rien à faire des autres. Son rythme s’accéléra encore, ses compagnons décrochaient un à un, le matelas d’avance du duo se dégonflait.
Cyclisme JO : Richard Carapaz doré, sprint pour le podium
Alors on se remit à y croire. D’autant plus quand, quelques kilomètres et offensives plus tard, à l’entrée du circuit de Fuji, Richard Carapaz faussait compagnie à Brandon McNulty. Faute d’aller décrocher l’or, les poursuivants viseraient deux autres métaux. Car devant, l’ancien vainqueur du Tour d’Italie retrouvait un éclat qui faisait plaisir à voir. Ayant plus souffert sur les routes de la Grande Boucle qu’escompté, finissant malgré tout à la troisième place, l’équatorien rajoutait une ligne d’or à son palmarès. Prouvant encore que la meilleure défense, c’est l’attaque, lui qui est un vrai méritant, quelqu’un qui tente toujours. Les autres n’ont pas démérité, David Gaudu en tête, lui qui a semblé souffrir dans le Mikuni Pass, mais qui est passé à l’attaque comme les autres dans les derniers virages du circuit automobile.
Sur la ligne de départ/arrivée, alors que Carapaz brillait de mille feux, on voyait au loin arriver un groupe recomposé qui allait donc se battre pour l’argent et le bronze. A cet instant, les jambes ont répondu pour une partie, plus du tout pour l’autre. Largement plus puissants en se relevant de la selle que les autres, Wout Van Aert et Tadej Pogacar s’offrirent un coude à coude jusqu’à la ligne. Le belge réussit à conserver une minuscule longueur d’avance sur le slovène. Comme pour prolonger ce qui avait été flagrant sur le Tour de France, pour récompenser les ogres de juillet. David Gaudu prenait la septième place, sans solutions dans l’emballage final.
Il restera de cette course des impressions classiques. Un parcours et des bords de route pas vraiment vivants – cela se comprend cette année – une première moitié fatigante, mais une envie, dans les dernières minutes, que cela ne se termine jamais. Un plateau d’exception qui a su sublimer une course à l’enjeu toujours difficilement perceptible, car n’ayant lieu que tous les quatre ans. Des coureurs, grands, héros, élevant tout en haut la devise olympique « ensemble », un terme ajouté spécialement cette année. C’est toujours plus beau.
Mathéo RONDEAU
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