Crédit photo une : Phillipkofler.
Le poste de gardien a toujours été un rôle à part. Dans les règles mêmes du football, il occupe une place particulière, obéit à des règles spécifiques, et se démarque de ses coéquipiers par sa tenue souvent remarquable, du noir de l’Araignée Yashin aux tenues extravagantes de Jorge Campos. Aucun poste du football ne concentre autant de spécificités et, pourtant, on a souvent du mal à reconnaître le rôle des gardiens dans les récompenses individuelles, souvent réservées aux joueurs de champ et plus encore, aux buteurs. Pour preuve, seul Lev Yashin, l’Araignée Noire, a remporté le Ballon d’Or à ce poste.
Pourtant, tous les amateurs de football vous le diront, un match peut être gagné ou perdu selon la performance du dernier rempart de l’équipe comme on aime l’appeler.
Un joueur toujours sur le qui-vive
Le grand ennemi du gardien, c’est la concentration. Si un joueur peut rater plusieurs actions sans que son équipe n’en souffre, si un avant-centre peut louper occasion sur occasion pour finir par mettre un but, il sera loué pour sa performance si elle permet de faire gagner l’équipe. Mais si un gardien est à la faute, ne serait-ce qu’une fois, l’équipe est immédiatement sanctionnée. Les supporters de Liverpool l’ont appris à leurs dépens lors de la finale de Ligue des Champions contre le Real Madrid en 2018. Leur gardien Loris Karius a ainsi offert la victoire avec deux bourdes, concentrant toutes les critiques sur sa seule personne.
Le gardien de but a le rôle déterminant de devoir être décisif quand il sera mis à contribution. Contrairement aux joueurs de champ, il n’a absolument pas le droit à l’erreur. Concernant ce poste si particulier, l’expérience de joueur comme Nicolas Douchez est toujours très enrichissante à lire pour comprendre les ressentis des acteurs en tant que derniers remparts d’une équipe. Pour devenir une machine à sang-froid, prête à tout moment, les gardiens doivent travailler la concentration et les réflexes bien plus profondément que les joueurs de champ.
La concentration, le nerf de la guerre au football
Au début d’un match, on voit souvent les équipes s’entraîner avec le portier à part. C’est tout à fait normal si l’on prend en compte l’énorme différence dans la concentration qu’il lui faudra par rapport à ses coéquipiers pour ne pas décrocher une seconde et se faire surprendre en contre-attaque. Le gardien doit maintenir sa concentration de façon permanente, et ce, même s’il n’est pas directement impliqué dans l’action de jeu. Comme au poker, où la concentration est la clé, il suffit d’une main ferme sur un tir pour changer la face d’une rencontre. Les gardiens modernes profitent des avancées de la pédagogie et des technologies pour travailler sur des exercices spécifiques. Et si le gardien reste, de nos jours, un joueur à part, il se fond de plus en plus dans un système de jeu au pied à l’image d’un Neuer.
Un poste en perpétuelle évolution
Quand le gardien allemand comme le portier actuel du Paris-Saint-Germain Navas peuvent se permettre de participer au jeu de leur équipe, c’est avant tout, car ils maîtrisent de main de maître les domaines spécifiques qui concernent leur poste. Si l’on parle aujourd’hui de « gardien-libéro », c’est bien, car le gardien joue plus haut, une révolution dessinée par Yashin, mais qui a explosé avec l’avènement du rempart du Bayern de Munich. Mais plus qu’un véritable changement, c’est une évolution que l’on a pu constater. Navas ou Neuer, ne sont pas moins forts sur la ligne que les autres. Ils remplissent tous les critères du gardien historique et s’entraînent à tous les exercices spécifiques, mais ils ont en plus la confiance et la technique d’un joueur de champ au pied, ce qui démultiplie les possibilités pour les équipes privilégiant la possession de balle.
La question peut donc paraître rhétorique au premier abord. Bien sûr que le gardien peut faire gagner un match, mais il peut encore plus le faire perdre. C’est là que réside toute la dramaturgie de ce rôle, de ce dernier rempart qui peut être un héros ou un perdant, mais n’est que très rarement crédité de match neutre comme pourrait l’être un joueur de champ. En tant que protecteur des cages (le surnom de l’Araignée du seul gardien Ballon d’Or venait de sa capacité à garder « sa toile » inviolée), le gardien est toujours exposé dans les bons, mais surtout dans les mauvais moments. Quand un attaquant brille, c’est le gardien qui déguste, et on ne va pas se mentir, on est tous devant notre écran ou au stade pour voir des buts, tel est le fardeau du gardien qui lutte contre l’équipe adverse et ses supporters, qui rêvent tous de le voir plier.