Santé mentale dans le tennis : quelle part de responsabilité pour les réseaux sociaux ?

Au paradis du tennis, les stars ont craqué. Si de plus en plus de sportifs brisent l’omerta sur la santé mentale, le sujet reste néanmoins tabou.
santé mentale tennis

Au paradis du tennis, les stars ont craqué. Si de plus en plus de sportifs brisent l’omerta sur la santé mentale, le sujet reste néanmoins tabou. Naomi Osaka, Victoria Azarenka, et Amanda Anisimova nous ont particulièrement émus la semaine dernière à Indian Wells. Entre larmes et blocage mental, le tournoi californien a révélé toute la détresse que pouvait ressentir un joueur de tennis.
Bien sûr, différents facteurs peuvent expliquer cette détresse. Mais il ne semble pas hors sujet de se pencher sur l’impact des réseaux sociaux dans le monde du tennis. Car oui, les plateformes digitales ont bien une importante influence sur les sportifs, et celle-ci n’est pas toujours positive.

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Santé mentale tennis – Le sportif, influenceur à temps plein

Un joueur de tennis n’est pas seulement qu’un sportif de haut niveau. A l’ère d’Instagram et TikTok, le sportif est aussi sa propre « marque » qu’il doit gérer au quotidien. Bien sûr, ces réseaux sociaux sont une aubaine pour nous, spectateurs et fans de la petite balle jaune. Ils nous offrent la possibilité de suivre le quotidien de nos idoles toute l’année et en instantané, peu importe leur position sur le globe.
Si les réseaux sociaux sont un bel outil pour communiquer et partager son quotidien avec sa fanbase, ils sont aussi un business à temps plein. Et les marques s’en régalent.

A l’image, par exemple, de Naomi Osaka ou Emma Raducanu qui en usent et abusent, le sponsoring fait partie intégrante du job de joueur professionnel. Et les plateformes digitales sont devenues un véritable outil marketing pour les sponsors. Bien sûr, les stars du tennis ont souvent dans leur entourage une personne dédiée à leur communication. Mais la présence quotidienne de nos joueurs préférés sur Instagram est forcément un élément à prendre en compte dans la gestion de leur carrière.

De plus, entre deux années placées sous la présence du Covid-19 et désormais spectateur d’un conflit géopolitique, le monde du sport doit désormais jongler avec une actualité pas toujours facile à gérer au niveau de la communication. Car au-delà de l’aspect sportif et du sponsoring, le tennisman doit aussi apprendre à être bon communiquant. Attention à ne pas dire le mot de trop ou poster une photo de soi à l’aéroport dans un mauvais timing (Djokovic pourra en témoigner). La puissance des réseaux sociaux est telle qu’elle peut désormais influencer la carrière d’un sportif professionnel.

En bref, vous l’aurez compris, communiquer sur les plateformes digitales est presque devenu un boulot à temps plein. Au même titre qu’un influenceur, le sportif doit soigner son image pour plaire à ses fans mais aussi et surtout aux marques. Business is business.

Les réseaux sociaux : un réservoir de haine omniprésent.

Derrière les photos sous les palmiers se cache une réalité bien moins glorieuse des réseaux sociaux : celle de la haine. Ce n’est plus un secret ni un tabou, les sportifs reçoivent chaque jour une centaine de messages de haine après une défaite (et même une victoire !). Un fléau souvent conduit par les parieurs frustrés, qui sous couvert de l’anonymat, donne lieu à des comportements trop souvent irrationnels.
De nombreuses stars du circuit ont déjà communiqué leur difficulté à faire face à ce fléau. Insultes, menaces de mort envers le sportif ou sa famille, etc… Les plateformes digitales sont devenues un véritable tremplin à la haine gratuite et sans limite.

Face à ce fléau, tous les sportifs ne sont pas égaux. Si certains arrivent à passer outre et ignorer ce déferlement de haine, voire à l’ironiser, d’autres ont plus de mal à le gérer. Ce problème touche particulièrement la nouvelle génération, qui a grandi smartphone en main et dont le monde connecté fait partie intégrante de son quotidien.

C’est ce qu’a d’ailleurs souligné Nick Kyrgios suite à sa défaite face à Rafael Nadal à Indian Wells : « Ça empire à cause des réseaux sociaux. Les gens pensent soudainement que ce qu’ils disent a un intérêt : ce n’est pas le cas. Tu as un petit compte sur lequel tu répands de la négativité. C’est gênant et ça blesse des gens. Ça touche Westbrook. Ça touche Osaka. Ça m’a touché pendant des années et ce n’est pas acceptable. Les gens crachent leur haine tellement facilement… Comment peut-on détester quelqu’un simplement parce qu’il essaie d’être différent ou qu’il fait les choses à sa manière ? C’est ridicule. »

Roger Federer himself a livré son observation sur l’impact des réseaux sociaux l’année dernière. Sur le circuit depuis plus d’une vingtaine d’année, le Suisse a vécu le développement des plateformes digitales au fur et à mesure de sa carrière : « Pendant les dix premières années de ma carrière, il n’y avait pas de réseaux sociaux. J’avais un site internet, c’est tout. Et durant les dix années suivantes, les réseaux sociaux ont tout envahi. Je ne peux pas imaginer comment j’aurais géré ça au début de ma carrière. Pour dix commentaires sous une publication, il y en a un négatif et, bien sûr, on se focalise dessus. C’est assez terrible. Nous devons nous rappeler que les athlètes sont des professionnels, mais aussi des êtres humains. »

Santé mentale tennis – Apprendre à gérer les réseaux sociaux

C’est justement sur ce dernier point que nous allons nous attarder maintenant. Comme l’a très justement souligné Roger Federer, les sportifs sont avant tout des êtres humains avec leurs forces et leurs faiblesses. Et dans un sport aussi mental que le tennis, l’impact psychologique des réseaux sociaux peut être désastreux.

Victoria Azarenka est peut être le meilleur exemple pour illustrer ce point. La semaine dernière, la Bélarusse nous avait fortement émus après avoir soudainement fondu en larmes lors de son troisième tour contre Elena Rybakina à Indian Wells. Azarenka, qui avait affirmé quelques jours plus tôt être dévastée par la guerre en Ukraine, n’a à ce jour pas livré d’explications suite à ce triste épisode. Après le match, l’ancienne numéro une mondiale a désactivé ses comptes Instagram et Twitter. Si nous ne savons pas ce qui a poussé « Vika » à faire ce choix, on peut légitimement imaginer que la joueuse de 32 ans a préféré se couper du monde digital pour préserver sa santé mentale et éviter un déferlement de haine à son égard.

Une triste réalité que Benoit Paire doit aussi apprendre à gérer après ses défaites, en témoigne l’une de ses dernières publications sur Instagram.

Si les réseaux sociaux font maintenant partie intégrante du quotidien des sportifs, les plateformes digitales peuvent se montrer dangereuses. La haine en ligne et les diverses sollicitations quotidiennes qui y sont liées ne sont pas toujours bénéfiques pour un sportif professionnel.
Dans un sport aussi mental que le tennis, les conséquences des réseaux sociaux peuvent être dramatiques d’un point de vue psychologique. Un problème qui risque de perdurer dans le temps, tant notre monde est devenu « accro » aux plateformes digitales.

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