RICHARD “SHOX” PAPILLON: MON DÉCRYPTAGE TECHNIQUE D’UN MATCH DE COUNTER-STRIKE: GLOBAL OFFENSIVE

Considéré comme l’un des meilleurs joueurs dans le monde de CS : GO depuis maintenant 6 ans, Shox nous fait l’honneur de vous décrire un match compétitif du jeu. Avec sa vision de progamer, le joueur G2 eSports décrypte avec ses mots la préparation d’avant-match, certaines phases de jeu comme le pistol round ou la gestion des émotions et de celles de ses coéquipiers.
Shox
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Les pro-gamers sont souvent imperméables à toute communication avant que la compétition ne soit terminée. La rubrique « Dans la peau » permet aux joueurs de partager avec vous ces moments secrets et déterminants qui forgent la réussite de leurs projets.

Considéré comme l’un des meilleurs joueurs dans le monde de CS : GO depuis maintenant 6 ans, Shox nous fait l’honneur de vous décrire un match compétitif du jeu. Avec sa vision de progamer, le joueur G2 eSports décrypte avec ses mots la préparation d’avant-match, certaines phases de jeu comme le pistol round ou la gestion des émotions et de celles de ses coéquipiers. (Crédit Une : G2))

Avant d’entrer dans le contenu d’un match en lui-même, il faut poser les bases. Le format d’une rencontre entre 2 équipes professionnelles de Counter-Strike : Global Offensive oppose 5 policiers à 5 terroristes dans un match qui dure 30 manches (qui elles-mêmes durent maximum 2 minutes). Pour remporter une manche, l’équipe victorieuse doit soit éliminer tous ses adversaires, soit désamorcer la bombe (dans le cas des policiers), soit faire exploser la bombe.

Au bout de 15 manches, les équipes changent de rôle pour passer de CT à Terro & vice-versa, la victoire est remportée lorsque l’une des équipes arrive à remporter 16 rounds en tout.

LA SOLIDARITÉ EST ESSENTIELLE POUR UNE ÉQUIPE SUR CS:GO

La préparation pour un match lors d’une compétition ne se fait pas seulement quelques heures avant, mais sur la durée. L’ensemble des coéquipiers d’une même équipe essaie de rester un maximum de temps ensemble, via l’entraînement collectif, mais également lors du temps plus personnel afin de créer une dynamique de groupe et de solidarité.

Le jour J, nous nous regroupons une vingtaine de minutes avant que le match commence afin de parler de ce qui va se passer, de notre plan de jeu et de l’équipe adverse. En général, nous allons plus nous focaliser sur notre jeu en connaissant par cœur notre rôle spécifique, mais également celui de nos coéquipiers comme savoir où ils lancer une grenade et à quel moment, où positionner son viseur sur certains endroits… Juste avant le début du match, on essaie aussi de se motiver en poussant un cri de guerre comme dans les autres sports.

Vient alors le choix de la map* qui est à la discrétion du capitaine, c’est lui qui a la charge de faire les vétos. En effet, c’est grâce à nos entraînements qu’il connaîtra nos maps fortes ou faibles et qu’il pourra faire le bon choix le moment venu.

*Avant un match, chaque équipe va indiquer ses environnements de jeu préférentiel.

Le premier round du match est particulier, on l’appelle « Pistol Round », car tous les joueurs ne possèdent que des pistolets. En effet, lorsque l’on commence une rencontre chaque joueur va disposer de 800 dollars ce qui est très peu dans le jeu. Un cycle économique va ainsi se mettre en place, l’équipe qui remporte le round va gagner 3 250 dollars tandis que celle qui le perd va seulement avoir 1 400 dollars.

Cet argent sert à acheter des équipements particulièrement utiles au niveau stratégique (grenades ou protections), mais également des armes plus puissantes. En général, l’équipe qui remporte ce premier round arrive facilement à enchaîner les deux suivants au vu de cet avantage économique qui se traduira par davantage d’équipements à utiliser dans le jeu. Ce début de match est donc très important avec la mise en place de stratégies spécifiques, souvent innovantes, mais qui ne peuvent pas forcément être énormément poussées au vu de l’équipement assez faible dans cette première partie.

CS : GO, UN ESPORT DYNAMIQUE

L’un des aspects les plus caractéristiques de CS:GO est son dynamisme. Les spectateurs voient souvent des enchaînements de rounds gagnés par une équipe. À l’image du football lorsqu’une équipe marque un but, les joueurs de CS sont envahis par des émotions positives quand ils gagnent un round et l’adrénaline ne fait qu’augmenter au fur et à mesure des points gagnés.

En revanche quand on perd, c’est l’effet inverse : on va se mettre à douter, stresser et même à trembler pour certains s’ils subissent la pression de l’événement. Garder son sang-froid est l’une des qualités les plus importantes sur ce jeu qu’on va acquérir par de l’expérience, mais aussi grâce à notre équipe. Si celle-ci est soudée et solidaire, la pression que nous subissons individuellement va fortement descendre. Être une équipe est une force.

Cette cohésion, nous allons la forger pendant les entraînements qui durent 8 heures par jour, la plupart du temps à distance, comme du télétravail. La gestion de la vie en communauté peut être compliquée, parfois on s’engueule et parfois on rigole ensemble. L’important est d’être toujours honnête et d’avoir des discussions posées, enrichissantes et que tout le monde soit d’accord sur la route à suivre.

Cet esprit d’équipe se matérialise donc en match lorsque nous nous motivons, soit par des petits mots bien placés ou par des cris d’encouragement. De mon côté j’aime faire ce qu’on appelle « donner le mental » à mes coéquipiers, c’est-à-dire de transmettre beaucoup de confiance lors d’un moment décisif. Il est important de montrer que l’on a confiance en eux, car certains joueurs peuvent perdre leur niveau de jeu s’ils passent un mauvais moment. Si le joueur réalise 2/3 kills après ces quelques mots, il est définitivement relancé.

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ÉMOTIONS EN PAGAILLE

Le public a également son rôle à jouer et c’est un véritable facteur démultiplicateur selon qu’il soit avec nous ou contre nous. On peut être boosté et ne plus se sentir à seulement 5 joueurs, mais à 10 000 sur certaines scènes. Dans le cas inverse, il faut réussir à prendre sur soi et faire abstraction de l’environnement hostile. Jouer en France est d’ailleurs particulier pour les joueurs pros français, car on joue devant nos fans qu’on ne voit pas souvent, car la majorité des tournois ont lieu à l’étranger.

Bien évidemment, les plus grosses émotions ont lieu en fin de match et notamment lors de remontadas impossible. C’est assez fréquent sur CS:GO, car beaucoup d’équipes qui mènent ont tendance à se relâcher mentalement et à être moins rigoureuses dans leur jeu, les pertes de round s’enchaînent alors. Certains ont même le syndrome de la peur de gagner, on a l’impression d’avoir fait le plus dur à 15, mais ce 16ème point est si difficile à aller chercher.

De l’autre côté, les joueurs vont s’autoriser à jouer d’une manière plus libérée et leurs adversaires vont avoir plus de difficultés à anticiper leur jeu. Il va alors se créer une sorte de déséquilibre qui permet ces remontées.

De mon côté ce qui me procure de l’émotion à la fin d’un match est vraiment ce combiné entre la satisfaction d’avoir bien joué, le fait de remporter le match et enfin la connexion avec le public. Je suis honnêtement heureux pour eux, car je me mets à leur place et je n’ai pas envie de les décevoir.

Après le match, nous laissons descendre la pression avant de l’analyser. La concentration était à son maximum et nous allons avoir beaucoup de mal à réfléchir à chaud de façon qualitative. De plus, il peut y avoir de la frustration si nous avons perdu et cela fausse nos jugements à chaud.

Cette vision que je peux avoir des matchs est certainement différente des spectateurs, mais elle dépend en fait du contexte. Je peux très bien mettre mon cerveau en pause pour apprécier seulement les performances des joueurs, mais la plupart du temps je ne peux m’empêcher de réfléchir pour comprendre certains aspects techniques et stratégiques.

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