NBK – CE QUE VOUS AVEZ TOUJOURS VOULU SAVOIR DU MÉTIER DE PRO GAMER CS:GO

Pour les fans de CS:GO, Nathan “NBK” Schmitt n’est plus à présenter. Alors qu’il est actuellement dans une période un peu flou pour la suite de sa carrière, le plus gros palmarès de la scène française s’est confié sur son métier de pro-gamer. 
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Les pro-gamer sont souvent imperméables à toute communication avant que la compétition ne soit terminée. La rubrique « Dans la peau » permet aux joueurs de partager avec vous ces moments secrets et déterminants qui forgent la réussite de leurs projets.

Pour les fans de CS:GO, Nathan “NBK” Schmitt n’est plus à présenter. Alors qu’il est actuellement dans une période un peu flou pour la suite de sa carrière, le plus gros palmarès de la scène française s’est confié sur son métier de pro-gamer. 

Ma famille a toujours été fan de technologies. Mon père, ma sœur, mon frère et à un degré moindre ma mère, étaient férus de jeux vidéo. C’est donc une passion qui m’est venue naturellement sur toutes sortes de jeux et sur toutes les plateformes possibles.

Mon attention s’est portée sur l’eSport quand j’avais 13 ans, c’est à ce moment-là que j’ai commencé à suivre certains sites spécialisés notamment sur Counter-Strike. J’ai ensuite franchi le pas en m’inscrivant pour la première fois à un tournoi un peu particulier sur CS Source dans un cybercafé : 3 vs 3. J’y ai rencontré deux joueurs semi-pro ainsi que le manager d’une des meilleures équipes françaises. C’était le point de départ de ma carrière et je suis arrivé assez rapidement dans l’équipe mythique de VeryGames.

J’ai toujours été passionné par CS même si au moment de la bascule entre les versions Source et Global Offensive, j’ai pu réfléchir à tenter ma chance sur League Of Legends. Je jouais pas mal avec des pro-gamers qui participaient au EU LCS, mais finalement j’ai suivi le mouvement pour continuer sur CS GO.

ÊTRE JOUEUR PRO SANS PERDRE LA PASSION DU JEU

Même si certaines obligations avec les médias ou les sponsors me rappellent mon statut de joueur professionnel, j’essaye de me détacher au maximum de ce concept de pro. Je ne veux pas perdre de vue cette passion pour le jeu qui me permet de ne pas compter mes heures comme dans une entreprise lambda.

Être pro, c’est pour moi pouvoir en vivre financièrement. La question du statut des joueurs et surtout le salaire brulent les lèvres de pas mal de personnes qui suivent la scène eSport.

Mon cas est un peu particulier et il est à différencier des joueurs vivant en France qui souvent possèdent une société sous la forme d’une SAS où leur équipe va verser leur salaire. De mon côté, j’habite en Autriche dans un cadre que j’adore pour pouvoir vivre avec ma copine qui est originaire de là-bas. J’ai ainsi une entreprise dont je suis seul actionnaire, mais soumise au droit autrichien et qui est sous la forme GmbH. Ma team, va ainsi verser de l’argent sur le compte de ma société et je vais pouvoir ainsi me payer directement un salaire ou des dividendes.

Sans vous dévoiler ce que je gagne chaque mois, sachez que les montants des rémunérations sont souvent très différents selon les équipes. Certaines jeunes teams talentueuses mais pas encore bien implantées peuvent octroyer 500 euros / mois à leurs joueurs tandis que les meilleures équipes donneront des salaires de 15 à 25 000 euros. Je ne pense pas que ce soit une mauvaise chose, on est tous passé par là pour se forger une expérience. Je n’aime d’ailleurs pas cette nouvelle mentalité qu’ont certains jeunes talents qui souhaitent directement un gros salaire avant de se mettre vraiment à fond dans le jeu. Il faut mériter avant de demander.

Après le système n’est pas parfait, car si certains s’en sortent par pur talent, d’autres ont encore des salaires importants grâce à leur notoriété. Je pense aux joueurs de Virtus Pro qui ont eu des périodes en dents de scie. Ils restent cependant la team la plus populaire auprès du public ce qui explique cette situation.

Au-delà des salaires, un joueur va pouvoir gagner de l’argent via d’autres sources : les cashprizes lors des tournois, les sponsors individuels selon la liberté octroyée par les équipes, mais aussi les skins*. C’est un sujet que certains ne veulent pas évoquer, mais nombreux sont les joueurs pro à travailler avec des codeurs pour créer des skins afin de les vendre à des joueurs amateurs. On parle de centaines de milliers d’euros de bénéfices pour certains pro-gamers venus souvent des pays de l’Est. Ce n’est pas forcément quelque chose qui me dérange même si je ne suis pas dans ce marché, si tout est fait de la bonne manière et légalement je n’y vois pas d’inconvénient à faire perdurer le système.

*Un skin consiste à modifier l’apparence d’une arme ou d’un accessoire du jeu avec un design particulier.

LE QUOTIDIEN D’UN JOUEUR

Hors compétition, nous allons nous entraîner 5 à 8 heures par jour entre coéquipiers, 5 jours par semaine. L’investissement est différent selon chaque joueur notamment avec le rôle de leader en match qui a changé un peu ma perception du temps passé sur CS GO. Durant cette période de création, je prenais beaucoup de temps à penser au fonctionnement de l’équipe et à la gestion des conflits qui peuvent rejaillir en match et avoir une importance capitale sur notre niveau de jeu.

Si je devais coucher par écrit ma journée type, la voici :

  • Lever à 10h et je vais prendre une bonne heure pour bien me réveiller.
  • Je vais ensuite manger, regarder un petit peu l’actualité et quelques matchs CS GO d’autres équipes.
  • À partir de 13/14h c’est l’heure de l’entraînement en équipe et individuellement qui va durer jusqu’à 21h.
  • Suivent alors 2h de pause pour décompresser et passer du temps avec ma copine.
  • Enfin de 23h à 2h du matin, c’est là qu’entre en jeu ce rôle de leader où j’allais ainsi passer ce temps-là à analyser nos matchs afin de déceler les côtés positifs, mais également ceux qui nous font perdre.

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Le rôle de Leader est d’ailleurs particulier aujourd’hui. Je pense que la relation qui va du coach aux joueurs n’est pas forcément optimale. Dans l’idéal, j’aimerais qu’une hiérarchie se dégage plus clairement avec un coach au-dessus de ses 5 joueurs et ce leader qui serait malgré tout dans une sorte de bulle pour faire le relais du coach à ses coéquipiers. Mais souvent la perception des autres joueurs envers le leader peut être négative et scinder ainsi le coach de ses propres joueurs.

Le capitaine devrait être un catalyseur d’énergie positive et tirer l’équipe vers l’avant à 90%, et ne pas être trop investi dans tous les conflits surtout s’ils sont triviaux.

On manque également de joueurs d’expérience pour remplir ce rôle, avec la légitimité de faire part à ses coéquipiers des bons et des mauvais aspects de leur jeu afin de ne pas générer de tension.

Pendant les phases des compétitions, notre programme va être un peu différent et c’est l’un des moments où le manager va grandement faciliter la vie de ses joueurs. Par exemple, un manager comme Jérôme « Niak » Sudries va ainsi complètement gérer notre planning, que ce soit par rapport aux matchs en eux-mêmes, mais aussi dans nos relations avec les médias ou nos partenaires.

Chaque événement est bien sûr différent, mais si on pouvait résumer la journée d’un match :

  • Entraînement dans l’hôtel où nous séjournons qui dispose toujours d’un espace qui reproduit les conditions de match.
  • Arrivée finalement assez tard pour la période de match qui peut durer entre 1 et 4h.
  • Séance d’après match avec les médias pendant 1h, entre interview individuelle et par équipe ou sessions photos/vidéos.

Au final nos programmes sont assez light, car nous n’avons pas de temps dédiés à de la préparation physique, mentale ou sur de la nutrition. C’est d’ailleurs l’un des axes d’évolution que nous pourrons avoir à l’avenir et qui pourrait nous permettre de prendre un avantage sur les autres équipes. Les bons profils pour remplir ces rôles ne sont pas nombreux en France, car nous avons besoin de gens qui sont familiers de l’eSport.

Aujourd’hui, seule l’équipe danoise d’Astralis est au point là-dessus avec les résultats que l’on connaît. Bien sûr ils ont aussi l’avantage de vivre tous proches les uns des autres (près de Copenhague) ce qui leur permet de remplacer un entraînement un jour par du team building ou une séance de préparation mentale. Leur structure met vraiment l’accent là-dessus et les prépare comme de vrais athlètes.

LES BONS ET LES RARES MAUVAIS CÔTÉS D’ÊTRE UN PRO-GAMER

L’un des aspects les plus positifs dans ma carrière est bien sûr le fait d’avoir des fans qui sont présents sur les événements pour nous supporter ou tout au long de l’année en ligne. Après un  parcours assez négatif durant la DreamHack de Marseille c’est toujours super de voir ces supporters nous encourager en live et cela me donne beaucoup de motivation.

Nous devons beaucoup de choses à tous les suiveurs de CS : GO. Pour aller dans une vision plus philosophique, ce genre d’échanges nous permet de transmettre quelque chose. C’est une vraie consécration pour nous.

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Rencontrer des gens de tous les horizons et notamment certains youtubeurs français et anglophones est aussi quelque chose que j’apprécie particulièrement. Je serai d’ailleurs heureux de partager avec eux ma passion pour CS à l’avenir, avec des gens comme Laink ou Terracid.

Enfin, la compétition est le fil conducteur de ma carrière. Mais c’est une sorte d’acquis, un compétiteur j’en étais un, j’en suis un et je le serai toujours.

Il y a malgré tout du négatif dans la vie d’un pro-gamer et si je ne devais citer qu’une seule chose ce serait très certainement le manque de temps que nous avons à côté du jeu. Aujourd’hui la concurrence est féroce entre tous les organisateurs de tournois ce qui amène la création d’un grand nombre de compétitions. Nos sponsors veulent bien évidemment que nous participions à un maximum de match pour assurer une bonne visibilité et forcément ça entraîne beaucoup de déplacements qui peuvent être chronophages.

UN AVENIR INCERTAIN

La question du futur des pro-gamer est assez intéressante, car nous sommes dans un nouveau domaine qui continue de se développer.

J’ai pu être confronté à cette situation avec cette phase de transition chez G2. J’ai pris le lead puis j’ai pu être mis sur la touche et c’est une situation particulière pour moi.

Mais j’ai la chance d’avoir un peu préparé mon après carrière en travaillant depuis quelques années avec FaceIt qui créé des compétitions esportives. Je les ai connus quand ils étaient encore dans une pépinière d’entreprise et j’ai ainsi été le premier joueur pro à venir caster avec eux dans leur studio qui à l’époque était dans une cave. Je sais que je pourrais me tourner vers eux si j’en ai le désir à la fin de ma carrière.

J’ai également la possibilité de bien parler l’anglais et de pouvoir me mettre facilement à l’allemand si besoin, ce qui est un plus dans le monde de l’eSport. J’ai 23 ans et 8 ans d’expérience du haut-niveau en continu, c’est donc une situation particulière, car je reste un jeune joueur, mais avec l’une des plus grosses expériences de la scène française. Est-ce que j’ai envie de jouer jusqu’à 30 ans ou plutôt me reconvertir dans un autre domaine ? C’est une réponse compliquée que je n’ai pas actuellement.

L’avenir nous le dira.

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