ESTELLE PEYEN – PLANÈTE ZÉRO

Dans cet article, j’indique quelle peut être une bonne façon de s’alimenter pendant cette période de confinement, car il faut vivre le mieux possible dans le présent et être prêt pour l’après …

Estelle Peyen – Diététicienne nutritionniste du sport

Crédit Photo : L’Odyssée Antarctique, un film de Djamel Tahi – photo de la station Charcot

Étant nutritionniste du sport, mon quotidien est d’accompagner, alimenter la performance, tout en veillant à la sécurité et à la santé des personnes dont j’assure le suivi. Il serait d’ailleurs plus juste de parler « des » performances, car elles sont multiples : sportives, physiques, artistiques, cognitives….

Dans le contexte actuel de confinement, impliquant une activité physique réduite et parfois des approvisionnements alimentaires limités/peu diversifiés, j’ai bien évidemment des préconisations diététiques à faire pour favoriser un bien-être et maintenir un bon état de santé. Seulement, il n’est pas possible d’envisager la seule facette nutritionnelle de la problématique… une partie immergée de l’iceberg… C’est un tout, un ensemble qu’il faut considérer. En effet, les comportements alimentaires, parfois des dérives, sont souvent le reflet d’un état psychologique, physique, pathologique… Les ressources financières de l’individu sont également à inclure dans l’équation.

Dans cet article, j’indique quelle peut être une bonne façon de s’alimenter pendant cette période de confinement, car il faut vivre le mieux possible dans le présent et être prêt pour l’après … Je m’inspire toujours de mon expérience, expérimentations personnelles, ainsi que de mes observations actuelles, lectures et échanges à distance avec des intervenants du monde de l’exploration et de l’expédition.

Vivre confiné pour attendre que la situation évolue…. Des rues vides et des zones désertées dans le monde, donnant l’impression de vivre sur une nouvelle planète… ou sur une planète nouvelle … ?  Une planète « ZERO » ? Des réponses à cette interrogation lors du déconfinement total des populations mais déjà des pistes selon la façon dont chacun vit son confinement.

PARA BELLUM

Mars, dieu Romain de la Guerre et des Armées. C’est effectivement sous des auspices martiaux, que le mois éponyme donne lieu aux premières mesures de confinement : le décret « n° 2020-260 du 16 mars 2020 portant réglementation des déplacements dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus covid-19 » est prononcé. Le Président Emmanuel MACRON s’attaque à l’épidémie, répétant plusieurs fois au cours de son allocution « Nous sommes en guerre » afin de faire prendre la mesure de la menace sanitaire à l’ensemble des Français. La notion de « confinement » prend jour, mais avec une compréhension alors très incertaine par la population, de ce que tout ce que cela implique et impose, ceci malgré des discours sur la menace et l’ennemi COVID-19…

Aussi, au préalable, il m’apparaît nécessaire de définir le terme « confinement » pour traiter le sujet.

Confinement :

  • Situation d’une population animale trop nombreuse dans un espace trop restreint et qui, de ce fait, manque d’oxygène, de nourriture ou d’espace. (dictionnaire LAROUSSE).
  • Mode de protection d’une population atmosphérique environnementale, par maintien des personnes à l’intérieur des locaux où ils se trouvent (dictionnaire médical de l’Académie de Médecine – version 2020).

Ainsi, selon la définition retenue, la perception de l’état de confinement est différente : dans le premier cas, le confinement est avant tout néfaste car il réduit les chances de survie d’une population, alors que dans le second cas, le confinement est salvateur en protégeant les individus d’un milieu extérieur dangereux. Je retiens cette définition pour la suite, si et dans la mesure où le risque/danger actuel provient d’un environnement extérieur contaminé par le COVID-19.

Selon moi, une perception mal appropriée de la situation par chacun d’entre nous, une explication insuffisante (ou compliquée) de la part des autorités de Santé, perturbent un message qui devrait être « cohérent » : l’environnement actuel est dangereux, potentiellement mortel, en restant confiné vous vous mettez à l’abri. Si la population était menacée par des bombardements ou par une forte émission de radioactivité, il est probable que le plus grand nombre saisirait l’importance voire l’urgence d’un confinement. Ainsi, le lieu de confinement pourrait être associé à la (sur)vie et à la protection, et non pas à l’enfermement et à la punition. Bien sûr, tout n’est pas si simplement tranché dans nos esprits, mais cela peut contribuer à atténuer le stress, aider à positiver et voir de la lumière, chose précieuse en cette période de crise sanitaire…

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QCM… QUALITÉS DE CONFINEMENTS MULTIPLES

En réalité, il n’existe pas « un » schéma unique de confinement mais « plusieurs » types de confinements.

Si on admet d’une manière générale que notre lieu de confinement est notre « bulle » de (sur)vie, il apparaît toutefois des caractéristiques différenciantes selon les contextes du confinement. En voici quelques unes :

Le choix :

  • Volontaire : missions militaires (sous-marins, navires, …), expéditions scientifiques (station spatiale, base scientifique sur lieu d’étude…), poste de travail (gardien de phare…), environnement de vie/climat extrême pouvant impliquer de se confiner à certaines périodes et donc de s’adapter …
  • Imposé : situation de guerre/conflits militaires, risque (sanitaire, chimique, radioactif, météorologique…), répression, détention …

L’objectif :

Il est en toute logique lié à un choix délibéré d’être confiné. Il est le fil d’Ariane qui rassure, guide vers l’issue, aidant ainsi à supporter la situation. Sans objectif posé au départ, il peut être salvateur si on s’en crée un.

La durée :

Connue ou indéfinie ? La durée implique une organisation du quotidien telles la gestion des vivres voire moyens de survie, la planification des tâches quotidiennes (travail, ménagères, loisirs, …) ….

Connaître la durée de son confinement permet plus facilement de l’apprivoiser et l’accepter, car il est alors possible de se projeter et de se préparer à une suite, à une reprise. L’issue peut être un/le but et un moteur pour tenir et résister au stress lié au contexte.

Sans échéance, il faut naviguer à vue, accepter d’être dans l’incertitude, pouvoir s’adapter et imaginer une (autre) vie en milieu confiné. Le moral et le mental ont alors une emprise encore plus importante sur chaque jour à passer.

Le nombre :

Vivre seul ou à plusieurs son isolement ? La deuxième situation implique de faire des compromis pour rendre la période viable, supportable. Il faut à la fois s’adapter au contexte, aux individualités présentes, et envisager d’une façon globale la vie du groupe (ressources alimentaires, espaces de vie, rôles de chacun …).

Le milieu :

Etre confiné dans un pavillon avec jardin à la campagne, est probablement mieux vécu qu’un confinement en chambre de bonne en ville…. Le besoin d’espace, d’air, d’une ouverture sur l’extérieur et sur la nature se fait pressant…

Nous faisons actuellement l’expérience d’un confinement forcé, sans recul ni aucun élément de comparaison pour évaluer ce mode de vie, nouveau et inconnu pour la plupart d’entre nous. Il y a peu de temps encore, nous n’avions aucune idée d’une date possible de déconfinement, aussi cette vie recluse est devenue progressivement intolérable pour de nombreuses personnes. Certains, ressentant ce confinement comme une situation extrême et insoutenable, ont sombré dans la dépression et sont en détresse. Il m’a alors semblé intéressant d’avoir le retour et les impressions de personnes ayant une expertise sur le thème du confinement.

PÉRIPLES INTÉRIEURS

J’ai souhaité aborder des aspects biologiques et psychologiques lors d’expériences de confinement où de tels paramètres ont pu être observés, mesurés, enregistrés et analysés. Le domaine de l’exploration, en milieux et conditions très extrêmes, permet d’avoir de telles informations. Aussi ai-je contacté deux experts en la matière : l’un est un explorateur, l’autre est un réalisateur de films documentaires.

Michel SIFFRE

Géologue, spéléologue et aventurier, Michel Siffre, est à l’origine de grandes avancées dans le domaine de la chronobiologie. En 1962, il reste 2 mois sous terre dans le gouffre du Scarasson, hors du temps. Outre l’étude de son rythme veille/sommeil (nycthéméral) en l’absence de tout repère temporel, cette expérience révèle que son horloge interne est régulière et programmée sur un cycle de 24h30 ! En 1972, Michel effectue sa plus longue période de confinement : alors financé par la Nasa, il descend pour 205 jours dans la Midnight Cave, au Texas.

Lors de mon entretien avec Michel, nous avons beaucoup échangé sur cette expérience de 1972, bien qu’il en ait fait de nombreuses autres par la suite. Il m’indique que les missions des astronautes sont celles qui pourraient se rapprocher le plus de cette expérience. C’est la raison pour laquelle la NASA a subventionné ses travaux de recherches pendant plusieurs années. Par ailleurs, Michel fait mention de nombreuses études réalisées sur le confinement, la vie en « autarcie », dans les années 1960-70 par l’US NAVY, la compagnie BOEING, le laboratoire orbital SKYLAB….

Reprenant les formulations nutritionnelles des repas prévus pour la quarantaine de la mission Apollo 16 de 1972, la NASA lui avait également fourni les rations alimentaires pour ses 205 jours passés la même année dans la Midnight Cave, à la différence de lui proposer des plats surgelés plutôt que lyophilisés tels ceux des astronautes. La composition physico-chimique des plats était strictement la même afin que la NASA puisse faire des comparaisons, exploiter les résultats et les utiliser dans le but d’assurer une alimentation optimale de ses équipages lors de prochaines missions. Concernant ses prises alimentaires, je suis curieuse de savoir comment Michel prenait ses repas : mangeait-il par ennui, uniquement lors de la sensation de faim, se forçait-il à finir les rations prévues pour chaque repas … ? Il me répond que lorsque l’on vit seul, sans aucun repère jour/nuit, sans aucune contrainte ni pression extérieure, on vit alors selon ses sensations et ses envies. Ainsi, Michel mangeait à chaque fois qu’il avait faim, et choisissait parmi les différents plats mis à sa disposition, la recette qui lui semblait la plus appropriée à son appétit du moment. Pour les besoins de l’expérience (afin de quantifier les ingestas), il devait finir chaque ration entamée.

Dans la logique des choses, la question du poids se pose : perte, maintien, gain de poids à l’issue des 6 mois passés sous terre ? Michel a toujours conservé un poids stable lors de chacune de ses expériences. En 1972, cela s’explique très probablement par une conduite alimentaire spontanée et naturelle ainsi que de l’activité physique régulière. En effet, des prises alimentaires en adéquation avec les signaux de faim et de satiété (et non dictées par de l’envie/gourmandise, de l’ennui…), accompagnée de 2 à 6 séances de bicyclette ergométrique quotidiennes (soit selon les jours « psychologiques » qui sont les intervalles de veille entre le coucher et le lever) permettent de maintenir un bon état de forme ainsi qu’un équilibre entre les apports et les dépenses énergétiques.

Comment était rythmés ses jours « psychologiques» ? Michel se couchait et se levait simplement en fonction de son état de fatigue. « Lorsque l’on est hors du temps, un décalage progressif s’opère dès les premiers jours : on se réveille toujours un peu plus tard, une demi-heure/1 heure selon les individus, de sorte qu’au bout de 15 jours-3 semaines, on finit par se réveiller à 18h au lieu de 9h initialement, et par se coucher à 6h du matin.  C’est exactement l’équivalent du franchissement des fuseaux horaires en jet. Vous emmenez votre horloge biologique avec vous quand vous allez aux Etats Unis ou dans l’Est», me dit-il. Lorsqu’il est remonté à la surface, à l’issue de ses 205 jours passés dans la Midnight Cave, Michel a mis une dizaine de jours pour se réadapter au rythme, à la vie de la société : repas, sommeil… Une vie hors du temps, est une vie où le temps s’écoule presque deux fois moins vite que le temps réel. Lors de l’expérience de Scarasson en 1962, il est apparu que Michel pouvait rester éveillé pendant 18h. Il en est ressorti avec vingt-cinq jours de retard sur les 58 jours passés : il pensait être le 20 août à sa remontée, alors que la date réelle était le 14 septembre 1962  . Une autre expérience en Tanzanie en 1964-65 , où l’un de ses jeunes étudiants est resté confiné 4 mois sous terre, a révélé que ce dernier avait des journées de 48h et non pas de 24h. Il restait éveillé 34-36h et dormait 12-14h de manière continue. Cela a été une découverte de base qui a permis à Michel d’obtenir des contrats militaires.

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Pour réussir à aller jusqu’au bout de toutes ses explorations sous-terraines, à supporter la durée de ses confinements, Michel me révèle que «maintenir les activités intellectuelles, est la base de la réussite de toutes ces expériences. En un, il faut y croire et être motivé. Comme en tout, c’est uniquement la motivation, car même les gens que j’ai mis sous terre, n’étaient pas spécialement préparés à cela mais ils s’y sont fait très bien. On s’adapte très bien à vivre hors du temps ou à vivre différemment. C’est très facile en fin de compte, mais il faut avoir la volonté. Il faut se dire que je fais cette expérience, et je la fais jusqu’au bout. (…) La lecture c’est la base de tout ! Sans lecture, moi je me serais flingué ! ». Michel occupait son temps à étudier, à réfléchir à des questions de géologie. Au-delà de pouvoir avoir une activité physique, c’est de pouvoir maintenir son cerveau en activité constante qui lui a permis de tolérer ses espaces de confinement et l’ensemble des conditions expérimentales.

Ayant toujours vécu ses expériences de confinement en solitaire, Michel imagine toutefois qu’il aurait peut-être eu du mal à les vivre en groupe. Cela impose d’ailleurs une compatibilité entre les individus pour que chacun puisse être efficace au sein d’une équipe. L’un des meilleurs exemples pour traiter cette notion de groupe, est celui de l’ISS (International Space Station), car les astronautes cohabitent ensemble sur une très longue période. La nécessité d’une organisation et gestion de la vie en groupe apparaît.

Organisation, routine quotidienne, repères… : ces notions sont-elles indispensables pour bien/mieux vivre son confinement ? « Ce sont les militaires qui pensent beaucoup ainsi… Il faut suivre les horaires…Moi, j’ai vécu mieux hors du temps qu’avec un horaire, mais cela dépend de chaque individu. Il y a des gens qui sont très bien conformes et très ordonnés, moi je suis plutôt bordélique (rires), passez-moi l’expression… La discipline stricte ne correspond pas à ma personnalité. Je ne me suis pas accroché à des repères. Dès le départ, quand vous êtes hors du temps, personne ne vous enquiquine : vous faites vos tests quand il faut les faire, vous mangez quand vous avez faim, vous dormez quand vous avez sommeil, vous n’avez aucune contrainte extérieure, à la différence de la vie en société. (…) Nous vivons en ce moment un confinement avec des habitudes, des règles communes…On est conditionné par le social et par l’alternance jour/nuit. Même si vous n’avez pas de montre, vous avez de la lumière en journée et du bruit que vous n’avez pas dans la nuit. Donc vous savez à un moment donné si c’est le jour ou la nuit, alors que dans une vie en dehors du temps, tout est toujours pareil. (…) Actuellement, nous vivons un confinement forcé, et nous ne pouvons rien y faire. Il faut donc s’adapter et je dois faire partie des gens qui sont le moins embêtés par le confinement. ». Même s’il a toujours vécu ses expériences en en connaissant la durée au préalable, Michel insiste sur la notion d’adaptabilité et d’acceptation d’une situation, de paramètres sur lesquels on ne peut pas agir. « A présent, pour ma part je laisse faire, je me laisse vivre… », conclue-t-il, en faisant référence à notre confinement actuel.

Djamel TAHI

Producteur/Réalisateur de films documentaires, Djamel Tahi collabore avec les chaines françaises et internationales depuis de nombreuses années. Il est par ailleurs passionné par les régions polaires auxquelles il a consacré plusieurs films et écrits notamment trois ouvrages 365 jours sous les glaces de l’Antarctique (Ed Glénat 2009); Mémoires sauvées de glaces (Ed Arthaud 2016); La Grande Odyssée une histoire des Expéditions Polaires Françaises (Ed Paulsen 2019).

Il m’est apparu évident de m’entretenir avec Djamel sur le thème du confinement, ayant vu son film documentaire « Enterrés volontaires au cœur de l’Antarctique ». Ce film retrace l’aventure de 3 jeunes scientifiques français, Claude Lorius, Roland Schlich et Jacques Dubois, confinés en 1956 dans la station Charcot en Antarctique : leur hivernage aura duré une année. Sur la base de ce documentaire, Djamel a écrit et réalisé L’Odysée Antarctique, qui est la version long métrage de cette expédition scientifique. Même si la sortie en salle de ce film est prévue fin 2020, j’ai pu recueillir auprès de Djamel des informations et réflexions intéressantes sur les notions de confinement, d’isolement, vécu par ces 3 explorateurs. Un échange passionnant … !!

Les premiers mots de Djamel pour faire le lien entre notre confinement actuel et celui vécu par les 3 scientifiques de Charcot, est que « le nôtre est imposé, et cela change tout » dit-il. Même si nous ne connaissons pas la durée de notre confinement, ce n’est à la rigueur pas le plus problématique. « Si on revient à l’aventure de Lorius, Schlich et Dubois, c’était 3 jeunes chercheurs qui ont postulé et accepté de partir ensemble en Antarctique, sans possibilité de relève pendant une longue période. Ils ne savaient pas du tout à quoi ils s’attendaient car à l’époque on n‘avait aucune expérience d’un confinement de 3 jeunes personnes au cœur du Continent Blanc ! C’est une expérience qui n’avait jamais été faite !  Bertrand Imbert, qui était à l’initiative de cet hivernage et le chef de toutes les expéditions françaises en Antarctique durant l’AGI (Année Géophysique Internationale), s’est dit qu’il avait probablement fait une « connerie » car s’il se passe quelque chose, on ne pourrait rien faire. En fait personne n’est préparé à ça (…). Ils étaient partis tous les 3 pour une année mais à un moment donné, ils n’étaient pas sûrs de mener la mission car pendant le trajet ils se sont aperçus qu’il était très difficile de parvenir à l’endroit où était implantée la base Charcot. Et lors du retour, il y a eu un moment de gros doute, pensant qu’ils allaient devoir hiverner une seconde année car les équipes n’arrivaient pas à venir les rechercher ! Ils savaient pour combien de temps ils venaient en Antarctique, à priori 1 an mais sans aucune certitude !».

Est-il plus simple de vivre un confinement seul, ou préférable de le vivre en groupe à l’instar de ces 3 explorateurs ? Djamel se réfère à l’expérience de ces 3 hommes et me répond que « être confiné seul, c’est extrêmement difficile ! Cela deviendrait quelque chose de dur à gérer tandis qu’à plusieurs, à 3 en l’occurrence, pas à 4 mais bien à 3, c’est beaucoup plus facile. En fait, cet hivernage a été un succès, car à 3 ils ont développé ensemble une qualité incontournable et indispensable, sans laquelle c’est la fin, qui est la tolérance vis-à-vis des uns et des autres. Bien sûr avec des petits heurts et accrocs, mais chacun à toléré les caractères et les attitudes de l’autre. Chacun menait son travail, sa vie dans la journée comme il l’entendait. La seule règle qu’avait imposé Jacques Dubois était que dès que l’un d’entre eux avait besoin de quelque chose les autres l’aideraient. Ils s’étaient également imposé tous les 3, un moment de réunion, 1 fois par jour tous ensemble, à l’heure du repas. Et c’est ce rituel qui a permis de maintenir le groupe et une communauté de valeurs. En dehors de cela, chacun organisait son quotidien, lever, coucher, activités, comme il le voulait. Roland Schlich, qui était le plus dur, le plus bagarreur, le plus conflictuel des 3, m’avait confié que pendant cet hivernage, il avait appris à être tolérant, car avant il ne l’était pas du tout. Il a appris qu’il faut accepter le point de vue et les manières des autres, accepter de se faire critiquer. ». Djamel m’indique que la clé d’un confinement quand on est à plusieurs, c’est la tolérance.

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Reprenant les propos des 3 explorateurs, Djamel stipule que dans une situation de confinement, « il ne faut pas aller contre les éléments, ne pas aller contre le temps… on ne peut rien faire. Il faut se modeler à cela. Le rythme et le temps n’ont alors plus du tout la même signification. Je le vois aujourd’hui dans le confinement. Je vois bien que le temps est différent, le temps est plus long, et il y a de la réflexion. Certains parviennent à se dire qu’ils vont profiter de cet isolement, même en étant à 2 ou 3, pour avancer sur des choses… Mais tout le monde n’a pas la capacité de faire cela, de se dire que l’on va profiter de cette parenthèse, qui peut être dramatique car il y a des victimes, mais profiter de cette parenthèse pour réfléchir pendant et à l’après, sur ce que va être ma vie ».

Une expérience de confinement peut donc amener à une introspection et probablement à des changements de comportements. Djamel a pu recueillir les témoignages de Claude Lorius et Roland Schlich qui lui ont dit : « cet hivernage, ce confinement a modelé notre personnalité et a guidé toute notre existence ! ». A partir de là, ils ont vu les choses d’une manière différente, cette expérience a été fondatrice. Ce confinement les a formés. A 20 ans, ils se sont révélés qui ils étaient et cela a forgé leurs vies. Une fois rentrés en France, ils ont construit leur vie, se sont mariés, ont eu une carrière scientifique extraordinaire ! « Si on connait des choses aujourd’hui sur le réchauffement climatique, Claude Lorius y est pour beaucoup dans le domaine de la glaciologie » précise Djamel.

Dans une expérience de confinement, la vision de la vie, les valeurs des individus et des choses qui nous entourent, évoluent. Djamel se souvient des paroles de Roland Schlich qui avait alors fait plusieurs hivernages : « Djamel, plus on a avancé dans le confort, la modernité et la facilité, plus les hivernages sont devenus difficiles dans les rapports humains. Quand on est dans la difficulté, et qu’on vit avec le strict minimum, dans un petit espace et avec ce qu’il faut pour manger, il nait alors une obligation de s’entendre et de collaborer, c’était une obligation de survie ! ». Par exemple, leur alimentation était rudimentaire, car ils se nourrissaient quasi-exclusivement de conserves, les surplus de l’armée puisqu’on sortait alors de la guerre. Ils consommaient également un aliment d’origine amérindienne utilisé par l’armée, le pemmican, constitué de moelle, viande séchée et graisse animale. Leur alimentation étant alors dépourvue de végétaux frais, ils ont eu des débuts de scorbut en fin de mission. Leur nourriture n’était pas du tout équilibrée, et ils sont revenus en France avec d’importantes carences !

Lors de leur hivernage à 3 dans la base Charcot, et dans ces conditions de vie rudes, dans un petit espace de 24m², « si l’un des 3 pétait un plomb, c’était la mort ! L’équilibre du groupe aurait vacillé » me dit Djamel. « L’aspect psychologique et l’étude psychologique de l’époque étaient quasi inexistants. Parmi les personnes qui faisaient l’analyse psychologique, il y avait Bertrand Imbert, chef de mission qui n’était ni médecin ni psychologue, et il n’y avait pas de médecin avec eux. De nos jours, c’est totalement différent car une analyse psychologique avant une telle expédition est impérative. Mais pour en revenir à cette notion de confort, moins le confort est grand, plus les choses sont rudimentaires et plus l’entente est obligatoire, et donc mieux l’hivernage se passe. Quand on est réduit à l’essentiel et que c’est une question de survie, rien ne vient perturber l’objectif : la survie, le programme scientifique … Quand on rentre dans une espèce de confort, on peut penser à d’autres choses, à sa famille, à ceux qui sont loin, à ses problèmes … et on devient alors moins conciliant, moins attentif à ceux qui partagent notre confinement, on se sent moins à l’aise vis-à-vis de l’un ou de l’autre, et c’est là que des conflits peuvent survenir ». Les conditions de vie, et de confinement de nos 3 jeunes chercheurs étaient tellement spartiates, qu’il n’y avait pas de place pour du superflu, juste pour l’essentiel, on oublie tout le reste, « Ils étaient seuls sur la Lune !». D’ailleurs, lorsqu’ils sont revenus de leur expédition, la NASA les avaient convoqués afin qu’ils puissent parler du confinement lors d’une conférence. Leurs témoignages étaient sources d’informations pour la NASA qui préparait alors des astronautes pour une prochaine mission Apollo. Lors de la mission Apollo 11, les astronautes étaient également au nombre de 3, soit une expédition lunaire qui présentait une configuration similaire à celle de Lorius, Schlich et Dubois en Antarctique.

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Le paradoxe dans l’expédition Antarctique des 3 Français, était un confinement malgré l’immensité dans laquelle ils se trouvaient. « La contradiction était qu’ils vivaient dans un espace infini et pourtant, ils ne pouvaient pas bouger, faute de se mettre en danger de mort. Car s’ils s’éloignaient de la base un petit peu trop et qu’un blizzard se levait en l’espace de 5 ou 10 minutes, alors ils ne retrouvaient pas la station car elle était enterrée. Il y avait cette espèce de dualité : l’espace était immense et en même temps, ils ne pouvaient pas s’éloigner. Donc ils restaient dans un rayon de 100m autour de la base. C’était finalement un double confinement… Cet espace, ils n’en profitaient pas, sauf avec les yeux, et encore avec une monotonie, car au cœur de l’Antarctique, c’est plat, blanc, le ciel se confondant avec le sol par mauvais temps.

Encore aujourd’hui cette mission fait office de référence. C’est pour retracer cette incroyable aventure que j’ai rédigé un ouvrage et réalisé le film L’Odysée Antarctique».

Comment tenir et tolérer son quotidien dans de telles conditions ? Le moteur de ces 3 hommes, était certes le programme scientifique à mener à son terme, mais pas uniquement. Affronter de telles conditions extrêmes dans le cadre d’une mission scientifique, c’était la première fois à l’époque : -40°C à -60°C, du vent tout le temps… Ils n’avaient pas du tout prévu la survenue d’autant de problèmes de matériels lors des 6 premiers mois. Ils ont été submergés ! Aussi, n’ont-ils pas vu le temps passer, entre les dégâts matériels et l’installation à gérer : c’est également ce qui a contribué au fait qu’ils aient tenu bon pendant toute la durée de la mission. Devant résoudre tous les problèmes rencontrés, leur programme scientifique avait pris du retard. De plus, près de 80% de leur temps était consacré à la survie. Par conséquent, ils n’ont jamais eu de monotonie tout au long de leur mission.

À l’issue d’une telle expérience, nos 3 explorateurs étaient-ils soulagés de voir venir la fin de leur confinement, ou bien ont-ils eu des regrets, éprouvé une certaine mélancolie de voir l’aventure s’achever ? Claude Lorius voulait enchainer un second hivernage à Charcot, mais Bertrand Imbert l’en avait dissuadé car il n’aurait pas tenu. Tous les 3 étaient contents de rentrer chez eux, mais il y avait en eux une profonde tristesse car ils savaient qu’ils avaient vécu quelque chose d’unique et d’extraordinaire.

Djamel souligne que « Cela a été la chose la plus importante dans leur vie. Ils en avaient conscience et sont restés liés à vie, même si ce n’étaient pas les meilleurs amis du monde. La mission Charcot a été un crève-cœur pour eux. Quand ils me le racontaient, ils étaient au bord des larmes. Pour eux, partir, c’était léguer à d’autres ce qui leur appartenait. Roland disait qu’il n’existait pas avant Charcot. Claude est parti 22 fois en Antarctique pour des missions scientifiques, et pour lui aussi, Charcot a été la mission la plus importante de sa vie. Le confinement qu’ils ont vécu tous les 3 a été l’histoire de leur vie. Je pense qu’avec le confinement actuel, il y aura aussi des personnes qui vivront des expériences extraordinaires, selon l’endroit où elles se trouvent, ce sur quoi elles vont penser ou travailler… Cela va les révéler. Je suis persuadé, et même moi je me pose des questions, qu’après ce confinement il y a des gens qui vont changer des choses dans leur vie de manière radicale. Qu’on le veuille ou non, on s’interroge, on se pose des questions, sur l’environnement, sur le travail, sur le rapport aux autres, et on se rend compte que certaines choses ne vont pas. J’ai pu lire les carnets privés de Claude et Roland, où ils notaient tout leur quotidien, et aussi leurs réflexions profondes… : « quel sens donner à ma vie ? Je suis ici, je vis quelque chose d’extraordinaire, mais après… ? ». Je pense que le confinement que nous vivons, pousse à s’interroger, et c’est mon cas, sur des choses importantes de notre existence : où l’on vit, ce qu’on fait et sur quoi on va maintenant engager notre énergie. Et je me demande si cela vaut le coup que je me démène pour tel ou tel film, aussi je fais des choix. Pour nos 3 explorateurs, cela a été le même cheminement mais puissance 1000, car ils étaient dans un environnement tellement extrême ! La seule comparaison actuelle possible, est l’ISS, sauf qu’ils sont plus nombreux. »

À la fin de notre discussion, Djamel conclue que le confinement imposé que nous vivons, ne change pas beaucoup son quotidien, dans la mesure où il peut continuer à réfléchir, à travailler et à s’occuper pleinement. En revanche, il reconnait que pour ceux qui ont un lieu de travail précis, une vie sociale personnelle et/ou professionnelle extrêmement importante, cela est très difficile car ils s’en retrouvent complètement démunis. Même s’il est toujours possible de s’adonner à des activités telles qu’écouter la radio, cuisiner…, il arrive un moment où on sature. « Pour certains, chaque minute, chaque jour passé, est la même chose, mais ce n’est pas mon cas. Je pense que ce qui est le plus important c’est l’activité intellectuelle, et surtout avoir quelque chose à faire, avoir un but ! Moi, j’ai un but qui est de finir mon film, sachant que je travaille aussi sur un autre projet de film et sur un livre. Donc cette parenthèse, dramatique pour certains, ne me perturbe en rien. Ceux qui peuvent monter un projet pendant ce confinement, qu’ils réaliseront après cette période, ont là la meilleure méthode pour s’en sortir ».

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POINT DE DÉPART…

Se recentrer sur l’essentiel, faire preuve de tolérance et d’adaptabilité, avoir une réflexion sur soi et imaginer un « après », sont des points clés pour transformer cette période de confinement, en une possibilité de renouveau (ceci dans l’espoir où aucun drame n’a assombri cette période…). Faire de son lieu de confinement, son refuge, son ermitage, sa bulle… où projeter, reconstruire, renouer avec soi et avec l‘autre, se révéler… devient possible.

Concevoir une planète « ZERO », une planète nouvelle. Repenser l’existence, la place de l’Homme et son environnement, la nature, les valeurs… Passer de la destruction, de la disparition, du désarroi à la création, à la renaissance, à l’inspiration, à la vie ! C’est ce que doit évoquer l’après confinement. Notre planète réinventée où « ZERO » doit être synonyme de début, de point de départ.

Dans une telle perspective, il faut revenir à l’essence de chaque chose et mettre du sens dans ses actes. Se nourrir, la façon de s’alimenter, sont des actions de tous les jours qui doivent s’inscrire dans ce schéma de pensée. Pendant et après confinement, j’invite tout un chacun à embrasser les valeurs de l’authenticité, la simplicité, la modération et la nature. Ce sont celles que j’ai adoptées depuis plusieurs années et qui font partie intégrante de mon mode alimentaire, ma conduite de vie, ma philosophie …

En toute logique, je recommande de toujours privilégier la variété des denrées naturelles, brutes, disponibles en fonction des saisons, produites dans le respect d’une éthique, et de réduire à son strict minimum la part des denrées transformées, industrielles, appauvries en nutriments (sauf si enrichissements artificiels), sources d’additifs, de sucres et matières grasses d’ajout. Cela permet ainsi de subvenir au mieux à ses besoins nutritionnels, espérer conserver le meilleur état de santé possible, et apprécier les textures et saveurs d’aliments simples : pain, poire, noix, carotte, persil… En réalité, ces recommandations sont valables à tout moment, que l’on ait vécu une période de confinement ou pas.

Paradoxalement, on observe des excès alimentaires, alors même que le confinement impose une réduction du niveau d’activité physique usuel : la balance énergétique « apports vs dépenses » s’en trouve déséquilibrée. Ainsi, étant confinées, certaines personnes prennent du poids et développent de mauvaises habitudes hygiéno-diététiques : démotivation pour faire un minimum d’exercice physique, grignotages par désœuvrement et/ou désarroi, achats alimentaires superflus et compulsifs pour évacuer le stress et essayer de trouver des plaisirs extérieurs au lieu de confinement, alcoolisme, …. Ces comportements peuvent induire une augmentation des problèmes de santé et la sensation de mal-être.

Par ailleurs, il me semble important de souligner qu’à l’inverse, la perte/diminution des revenus de certains foyers en raison de la crise sanitaire, prive actuellement davantage d’individus d’une partie de leurs repas quotidiens.

Il faut consommer selon ses besoins et sa faim, avec modération, car cela favorise un bon état de santé et contribue à préserver les ressources naturelles. Il est possible ainsi de profiter durablement et sainement des plaisirs et bienfaits des aliments. Le traité de Plutarque, « Comment rester en bonne santé », fait partie de mes sources d’inspiration car il y est développé des idées autour des valeurs de la modération et de la simplicité. Ce bref traité rédigé après la mort de l’empereur Titus, en 81 de notre ère, rappelle que la santé du corps et de l’esprit sont indissociables. En voici un passage, intitulé LA MODERATION : « On a ajouté dans le même ordre d’idées, que les choses les plus simples sont toujours les plus saines pour notre corps. Il faut avant tout veiller à ne pas se gaver, s’enivrer (…) ». Ainsi, une alimentation adaptée à chacun, raisonnée, rationalisée, est le modèle que suis et que je recommande.

À l’inverse, la surconsommation, la surexploitation des individus, des élevages et des terres, sont à l’origine de maux pour l’Homme (émergence de micro-organismes pathogènes, pathologies chroniques : diabète, obésité, maladies cardio-vasculaires, cancers, …) et pour l’environnement (bouleversement d’écosystèmes, disparition d’espèces animales/végétales, appauvrissement des sols…). Ces considérations devraient faire partie des axes de réflexions et priorités d’action de notre planète ZERO.

Notre confinement actuel doit être l’occasion d’un (r)éveil des consciences. Les victimes du COVID19, les conséquences dramatiques de cette pandémie, la détresse de certains… Tout cela ne doit pas, ne peut pas être oublié, et des leçons doivent en être tirées. Il faut se souvenir que sa santé est précieuse et veiller au quotidien à prendre soin de son corps, son premier capital. En étant en bonne santé on se donne les meilleures chances pour entreprendre des projets personnels, pour être de la ressource s’il faut aider des personnes en situation défavorable…

Bien s’alimenter est un acte de santé, une attention portée à soi et aussi à l’environnement, si et seulement si tout le monde prend conscience qu’il faut se recentrer au maximum sur les besoins alimentaires essentiels des individus : couvrir les besoins énergétiques et permettre des apports nutritionnels optimaux (protéines, lipides, glucides, minéraux, vitamines). Les denrées brutes permettant cela sont les : fruits, légumes, céréales, légumineuses, tubercules, fruits et graines oléagineuses, fruits à coque, viandes, poissons, œufs, lait. J’ai l’espoir que notre période de confinement a permis à chacun, de prendre la mesure de ce qui pouvait lui être essentiel.

Concrètement et au quotidien, j’incite à :

  • Avoir une démarche réfléchie et responsable dans le choix de ses achats alimentaires.
  • Faire l’effort ou prendre plaisir à préparer soi-même ses plats, ce qui permet d’avoir une meilleure maîtrise du contenu de son assiette. Le faire avec ses/des enfants, c’est donner à cette génération future de bons repères diététiques, le goût du naturel, et l’envie d’aimer la nature de notre planète ZERO.
  • (Re)prendre conscience que les repas sont des moments importants de notre vie. Au-delà de nourrir le corps, les repas sont des instants de communion, de découverte, d’échanges et de (re)connexion. Les repas, modes et traditions alimentaires, sont des rites et rituels qui permettent le rapprochement des hommes et leur donnent une ouverture sur le monde.

 

Voici, les réflexions et conseils diététiques que je peux apporter, ensuite à chacun de se les approprier s’ils lui semblent pertinents. Il apparaît que le confinement vécu sur toute la planète est un état universel, mais sa perception demeure individuelle. Chaque individu l’aura expérimenté différemment et en tirera ses enseignements personnels. Les modes de vie et de consommation changeront-ils après le confinement ? Notre rapport aux autres aura-t-il évolué ? Aurons-nous davantage de considération pour notre environnement ? Arriverons-nous à la planète ZERO ? Quoiqu’il en soit, j’en ai pris le chemin… Tempori servire…

 

ESTELLE

 

Estelle Peyen – Nutritionniste du sport

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Nutritional preparation: top athletes, dancers, actors… / Articles & interviews: health, sport, nutrition, performance / Education…

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