LUCAS CHANAVAT: LE SKI DE FOND, ENTRE NATURE, DÉPASSEMENT DE SOI ET COMPÉTITION

A 23 ans, le fondeur du Grand-Bornand Lucas Chanavat arrive avec l’objectif de briller pour ses premiers Jeux Olympiques sur le sprint. Avant de peut-être franchir une nouvelle étape dans sa carrière, Lucas vous raconte son amour pour le ski de fond et vous décrypte son sport hors du commun.
Lucas Chanavat
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Les athlètes sont souvent imperméables à toute communication avant que la compétition ne soit terminée. La rubrique « Dans la peau » permet à un sportif de partager avec vous ces moments secrets et déterminants qui forgent la réussite de leurs projets.

A 23 ans, le fondeur du Grand-Bornand Lucas Chanavat arrive avec l’objectif de briller pour ses premiers Jeux Olympiques sur le sprint. Avant de peut-être franchir une nouvelle étape dans sa carrière, Lucas vous raconte son amour pour le ski de fond et vous décrypte son sport hors du commun. 

Je suis originaire du Grand Bornand (Haute-Savoie) où les sports d’hiver sont vraiment ancrés dans la culture locale. On a la chance dans cette station de pouvoir choisir entre beaucoup de disciplines et on peut voir que de nombreux champions en Ski, Skicross, Snowboard, Ski de Fond etc., sont issus de cet endroit.

J’ai pris goût au ski dès que j’ai commencé à marcher et même si j’avais de plus grandes qualités en alpin, c’est le ski de fond qui m’a attiré en suivant tout d’abord ma grande sœur. J’ai tout de suite adoré ce contact avec la nature et la possibilité de skier avec mes amis dans la forêt. C’est ensuite la dureté de l’effort et le dépassement de soi permanent qui ont fini par me faire tomber amoureux de cette discipline.

À partir du collège et du lycée, j’ai d’ailleurs commencé à m’intéresser aux grands noms du ski de fond. Ma génération s’est beaucoup inspirée d’un fondeur norvégien, Peter Northug, qui a dominé pendant des années. La transition vers le haut-niveau s’est alors faite naturellement, d’abord par l’obtention de bons résultats et ensuite par l’envie de faire de la compétition et de sans cesse me dépasser.

L’IMPORTANCE DU RAPPORT POIDS-PUISSANCE

En ski de fond, tous les gabarits peuvent réussir, des puissants à ceux qui sont plus véloces. Au même titre que dans le vélo, le rapport poids-puissance est fondamental. Il faut ainsi réussir à être endurant et garder son explosivité naturelle. Je suis plutôt dans les fondeurs lourds avec beaucoup de puissance et c’est pour cela que je travaille actuellement beaucoup le rythme et le changement de rythme. Une blessure au dos il y a 4 ans m’avait éloigné pendant un an de l’entraînement, ce qui m’avait beaucoup coûté en terme d’endurance globale. Je pense avoir bien évolué sur ce sujet cette année.

L’entraînement d’un fondeur de haut-niveau est assez méconnu par le grand public, car beaucoup estiment que nous ne commençons qu’au début de l’hiver. En vérité, on n’arrête de s’entraîner qu’une ou deux semaines dans l’année vers la fin du mois d’avril. La reprise est plutôt sympa, car elle nous permet de pratiquer des sports différents. À partir de juin et jusqu’à l’hiver, il faut vraiment commencer un travail spécifique qui passe par la course à pied, le ski à roulette et la musculation en complément.

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Les durées d’entraînements varient suivant les fondeurs (certains sprinteurs s’entraînent plus que certains distanceurs). En général on peut estimer une fourchette comprise entre 750 et 900 heures d’entraînements annuel, ce qui représente l’équivalent de deux sessions chaque jour avec une journée de repos chaque semaine. Le rythme va vraiment changer lorsque nous rentrons en période de compétition où c’est une sorte de mix entre entraînement classique et décrassage. Avant un événement important, on commencera par des sessions longues de 3 semaines et on finira par alléger la charge de travail progressivement. Quand on enchaîne les épreuves de Coupe du Monde, on va plus miser sur de l’entretien, mais ça dépendra des sensations de chacun et des résultats des courses.

LA MÉDIATISATION PASSE PAR UNE SIMPLIFICATION DE NOTRE PRATIQUE

La complexité dans le ski de fond reste les nombreux formats qui existent. Il y a ainsi deux styles : le libre qui se fait sans fart de retenue en dessous des skis, où la glisse est importante et les skis peuvent être divergents ; et le classique avec une zone de fart en dessous du pied qui au contact de la neige accroche. C’est ce qui nous permet d’avancer à l’image de la course à pied avec des skis dans l’axe, ici pas de skis divergents possibles.

Aux Jeux Olympiques les deux variantes existent. Je vais d’ailleurs faire le sprint en format classique, mais il y a par exemple le skiathlon qui fait les deux ou un relais spécifique avec deux fondeurs en classique et deux en libre. C’est un axe de travail que la Fédération Internationale de Ski doit améliorer, car c’est assez compliqué pour le public de s’y retrouver.

D’autres sports d’hiver comme le biathlon ont pu exploser médiatiquement grâce à des figures comme Raphaël Poirée ou Martin Fourcade. Des liens existent entre les deux disciplines, certains biathlètes ont réussi à s’imposer à de rares occasions sur des formats de course qui s’en rapproche le plus comme un 10km skate individuel. Il y a cependant trop de différences pour qu’il y ait de vrais échanges techniques entre les équipes de France, le fait d’avoir une carabine sur le dos, la différence d’effort entre intermittent pour le biathlon et continu pour le ski de fond, ou de ne pas pratiquer le format « classique » limitent nos similarités. Les deux disciplines se suivent malgré tout, les fondeurs s’intéressent pas mal au biathlon et je crois savoir que l’inverse est tout aussi vrai.

Nos formats de courses sont certainement moins compréhensibles et nous sommes aussi sur des canaux tv privés, ce qui limite la notoriété du ski de fond. Ma discipline peut grossir en France, car notre équipe nationale est suffisamment forte avec une excellente jeune génération en devenir. Certains formats sont aussi intéressants et dynamiques même pour les non-initiés comme le sprint ou les mass start. C’est un beau sport donc je ne vois pas pourquoi la médiatisation ne va pas augmenter. Pour les pratiquants, la beauté de ce sport reste les magnifiques endroits qu’on traverse pendant nos entraînements, mais on peut aussi trouver d’autres qualités que l’on observe dans le Crossfit par exemple : le fait de pousser ses limites au maximum ou bien la volonté de bien sculpter son corps.

Les Jeux Olympiques approchent à grands pas et notre équipe est parée pour ça. J’aimerais d’ailleurs mettre en avant un concept qui définit assez bien notre équipe de sprint, le “No Limit”. On ne va vraiment pas se fixer de limite à l’entraînement ou en compétition afin d’atteindre nos objectifs.

LUCAS

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