HERVÉ MATHOUX : LE JOURNALISTE SPORTIF, ENTRE PARTAGE D’ÉMOTION ET DÉCRYPTAGE

Véritable témoin de l’évolution du football dans les médias depuis 30 ans, Hervé Mathoux se confie sur les raisons qui l’ont poussé à devenir journaliste et sur sa vision du métier.
Hervé Mathoux
(c) Canal+
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Crédit photo Une : CANAL PLUS.

Le journalisme sportif !

Une passion, qui rythme ma vie finalement depuis mes 10 ans. Mais avant de l’évoquer, parlons de ce sport merveilleux qui est source d’émotion, de bonheur, de partage.

Je suis tombé dans la marmite football dès le plus jeune âge.

LE FOOTBALL ENTRE DANS LA MÉMOIRE COLLECTIVE

Et des souvenirs, j’en ai tellement en mémoire !

Difficile de choisir avec toutes ces images en tête, tous ces moments importants. Aussi bien sur le côté artistique du football, qui donne envie d’analyser cela, que sur des instants plus choquants, parfois même injustes, mais qui comme je le disais sont source d’émotions intenses.

Ce qui m’a donné envie de faire ce métier, je pense que c’est à la fois le parcours européen des Stéphanois en 75/76, et peu après l’épopée bastiaise en Coupe de l’UEFA 77/78.

Avec l’AS Saint-Étienne, c’était la découverte du foot pour moi, avec la fièvre verte qui a sans doute atteint tous les jeunes de ma génération. La finale contre le Bayern Munich et ses fameux poteaux carrés. Ensuite le moment où je commence à écrire des petits textes sur les matchs, sous forme de résumé, c’est avec Bastia donc à 11 ans, mes premiers rendez-vous galants avec le journalisme.

Par la suite en tant que fan de foot et journaliste sportif, j’ai bien sûr plein d’autres images ! Pour en citer quelques-unes, la première coupe de France du PSG contre l’ASSE en 82, la finale de coupe de France l’année suivante également avec ce magnifique but de Touré lors de PSG-Nantes, le France-Bulgarie, pas celui de Kostadinov en 93 que les générations d’après connaissent, mais le premier marquant, en 77, quand l’EDF joue sa qualification pour la Coupe du Monde 78 en Argentine.

Je crois qu’il n’y a pas de matchs que j’ai plus attendu que celui-ci, j’avais un poster de Onze Mondial dans ma chambre avec le calendrier de l’Équipe de France, et il y avait ce 16 Novembre 1977 entouré, France-Bulgarie, dont on avait compris assez vite que ça allait être le match de la qualif. J’ai vraiment attendu ce match comme un enfant attend le père Noël. Et je me rappelle pour l’anecdote que la France était au pied du mur, devait absolument gagner et le sélectionneur de l’époque, Hidalgo, avait aligné un 4-2-4, qui avait payé avec une victoire 3-1 !

Ensuite les France-Portugal en 84, France-Allemagne à Séville en 82, France-Brésil 86, les finales des Coupes du monde 98, 2006, 2018, il y en a tellement maintenant que je ne vais pas citer ceux des dernières 20 années, mais c’est justement la force du foot, on peut avoir des souvenirs personnels avec un côté émotionnel, mais globalement c’est le partage des émotions fortes collectives.

Les grands matchs que je cite, les gens se souviennent où ils étaient, avec qui ils les ont vu. Ce genre d’instants présents dans la mémoire de chacun est très rare, en dehors du sport on ne peut souvent citer que des événements tragiques comme le 11 septembre.

 

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MES PREMIERS PAS DANS LE MONDE DU JOURNALISME

Comme je vous le disais, c’est à 11 ans que j’ai commencé à écrire des textes. Ce n’était pas du journalisme, à peine les prémices de cet avenir, mais même s’il est difficile pour moi d’expliquer d’où est venu ce désir je pense que j’avais envie de m’approprier cette matière-là, de raconter des histoires sur ce football que j’aimais tant. Manifestement les lire ne me suffisait pas, mais comme des enfants qui jouent à la marchande, ils reproduisent ce qu’ils voient, j’ai voulu en faire de même avec ces textes.

Par la suite j’ai fait mon chemin pour être journaliste, pas à coup sûr dans le sport bien que j’eusse cela dans un coin de ma tête. J’ai eu la chance de pouvoir le faire et de commencer à vivre ces événements de façon différente. J’ai commencé comme tout le monde, par des petites expériences ici et là et finalement un stage chez TF1 qui m’a lancé avec eux jusqu’à devenir un journaliste à part entière de la rédaction.

C’était la fête au village pour moi les premiers temps, le fait d’aller dans tous les grands stades, en D1 à l’époque et en Coupe d’Europe, qui ont bercé mon enfance, qui sont des fantasmes, c’était un émerveillement.

Dans le journalisme je n’ai pas eu de mentor particulier, je m’inspirais à dose homéopathique de plusieurs journalistes, dès que je trouvais quelque chose de bien j’essayais de le digérer pour construire quelque chose de personnel par la suite.

Travailler dans le sport c’est aussi renoncer à une forme de journalisme qui est souvent celle qui nous a fait, qui nous a donné envie de faire ce métier, c’est-à-dire le journalisme qui veut mettre son nez là où on lui dit de ne pas le mettre, qui parle de choses qu’on veut cacher. La définition du journalisme pour moi se rapproche de ça, une forme de défense de la vérité face à la complication, face à tout ce qu’on voudrait qu’on ne sache pas.

Être journaliste de sport en revanche je le décrirais plutôt comme une fonction où on doit partager de l’émotion, la décrypter, donner des clés de compréhension qui vont au-delà des faits et permettent une réflexion.

La profession de journaliste en elle-même est souvent décriée, accusée de faire partie du « système » alors que ce sont simplement les témoins de tout ce qu’il se passe.

C’est un métier très courageux, qui ne mérite pas le flot de critiques qu’il subit.

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JOURNALISTE PROFESSIONNEL ET FOOTBALLEUR AMATEUR

Le football n’était pas qu’une passion au travers des médias ou dans les tribunes. J’ai joué longtemps, dès mes 6 ans jusqu’à arriver en DH en junior. Mais après deux années à faire des allers-retours entre mon club en Auvergne et mes études à Paris, j’ai dû arrêter par la force des choses.

Je ne crois pas qu’il y ait besoin d’avoir joué au foot pour être un bon journaliste même si c’est forcément une bonne chose et cela peut aider de temps en temps à mieux comprendre certains éléments du monde du ballon rond. Mais en soit entre le foot amateur que nous sommes beaucoup à pratiquer enfant et le foot pro d’aujourd’hui, il n’y a rien à voir.

Est-ce qu’il faut avoir fait des films pour être critique de cinéma ?

Les journalistes ont une meilleure connaissance historique et sociétale du foot, ils regardent une dizaine de matchs par semaine, échangent régulièrement avec des staffs techniques… Bien souvent ils sont bien plus compétents pour dégager des idées intéressantes plutôt qu’un joueur qui ne s’intéresserait à peine à son sport et qui ne regarde pas d’autres rencontres.

Je suis dans ce milieu depuis 30 ans. J’ai commencé la télé au tout début des années 90, avec Roger Zabel notamment. J’ai été reporter de terrain également, j’ai fait du commentaire notamment pour les Coupes du Monde 94 et 98 et l’Euro 96 pour TF1.

C’est en arrivant à Canal que je me suis vraiment concentré sur la présentation. J’avais fait le tour du métier de commentateur avec également deux Coupes du Monde pour Canal + Afrique, tout le monde fait à peu près la même chose et je n’avais pas le sentiment d’exceller plus qu’un autre. Ce n’est pas dans ma nature d’avoir des avis péremptoires, donc une fonction comme celle qu’a Pierre Ménès aujourd’hui n’est pas faite pour moi, où je ne suis pas fait pour elle plutôt. Je suis plus un arbitre, un modérateur que quelqu’un qui va partir dans des grandes envolées lyriques. C’est une question de nature.

Je garde mon rôle de journaliste, j’ai les mains dans le cambouis comme on dit, je suis co-rédacteur de l’émission, je m’intéresse à l’éditorial. Pour animer cette émission, il y a un vrai travail journalistique.

J’ai envie de faire des choses différentes cependant, qui me sortent un peu des studios. Je vais débuter un gros documentaire sous peu, et il y a d’autres idées bien sûr, malgré le fait que je sois très heureux avec mon rôle de présentateur je ne m’interdis pas d’explorer d’autres expériences à côté.

HERVÉ

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Ousmane Dabo est un ancien footballeur de l'Équipe de France, de l'Inter Mila, Parme, la Lazio ou encore Manchester City. Durant sa carrière il a participé à la création d'une école de football à son nom dans le pays d'origine de son père, le Sénégal. Il s'investit davantage depuis la fin de sa carrière et est en ce moment-même sur place à Ziguinchor.