Basket : Karlton Dimanche – Sur les traces de Kévin Séraphin

Karlton Dimanche a déjà un palmarès long comme le bras, à seulement 21 ans. Entretien avec un des joueurs d’avenir en France.
Karlton Dimanche vise haut dans sa carrière. Crédit : Etienne Lizambard
Karlton Dimanche vise haut dans sa carrière. Crédit : Etienne Lizambard

Vainqueur de la Coupe de France U17 et U18, double-champion de France espoirs, médaillé de bronze à la Coupe du Monde U19 et à l’Euro U18… Karlton Dimanche a déjà un palmarès long comme le bras, à seulement 21 ans. Originaire de Guyane française, c’est là-bas, qu’il se fait repérer dans le camp de Kévin Séraphin, son idole. Sur ses conseils, Karlton rejoint Cholet Basket, en 2015. Après avoir porté toutes ses équipes de jeune au sommet, le jeune guyanais cherche à gagner sa place chez les pro, cette saison.

Crédit : Etenne Lizambard

J’AI COMMENCÉ LE BASKET À 3 ANS, EN GUYANE

J’ai découvert le basket en Guyane Française. Ma famille est sportive : ma mère était basketteuse, donc j’ai commencé tôt à jouer au basket, dès l’âge de 3 ans, dans ma ville de Sinnamary. Au début, j’hésitais beaucoup entre le football et le basket. J’ai fait 3 ans de foot, et après, j’ai fait un choix et je me suis orienté pleinement vers le basket. Je jouais au niveau départemental, là-bas. Mais il y a quelques bons clubs guyanais, qui performent dans l’élite Antillaise.

Je faisais 2 entrainements par semaine avec l’US Sinnamary : le mercredi et le vendredi. J’avais match le samedi. Puis, je suis rentré au pôle espoir. Je m’entrainais toute la semaine du lundi au vendredi, avec eux. Sauf le mercredi, où j’allais jouer avec mon club. Je faisais du basket tout le temps ! J’ai continué en Guyane jusqu’à mes 14 ans. Ensuite, je suis partit en France, à la suite d’une détection.

KARLTON DIMANCHE : JE DISCUTE SOUVENT AVEC KÉVIN SÉRAPHIN

C’est grâce à Kévin Séraphin que j’ai été repéré, parce que j’ai participé à ses camps d’entraînement. Il m’a plongé dans le « bain », dans le milieu du basket. C’est vraiment Kévin que je regardais et qui m’inspirait, quand j’étais jeune… et encore aujourd’hui. Il y également Kyrie Irving, que j’aime beaucoup.

Je parle souvent avec Kévin Séraphin : quand on se voit en Guyane, quand je monte sur Paris. Cet été, on s’est vu, dans un camp d’entrainement que j’avais fait. Il vient souvent à Cholet, aussi, pour voir nos matchs à domicile. Il est venu il y a 1 mois, par exemple. Donc, oui, on discute très souvent.

Il me donne des conseils sur ce que je dois faire et ne pas faire, les points positifs et négatifs de mon jeu. Ce sont des choses qui vont m’aider pour m’améliorer. Il va me parler par exemple de mon agressivité… me dire que je dois prendre plus de responsabilités, prendre plus le jeu à mon compte. Il va me conseiller sur mon shoot… Enfin, pleins de choses !

C’ÉTAIT DUR DE SUIVRE LES COURS EN M’ENTRAÎNANT AVEC LES PROS

J’ai eu mon bac pro, gestion administration, il y a 3 ans. Mais j’ai arrêté les études, après ça. À la base, je devais faire une 1ère ES, avoir un bac général. Cependant, le niveau entre la Guyane et la métropole n’est pas du tout le même. Donc, c’était vraiment très difficile, surtout au début. J’ai plutôt décidé de m’orienter vers un bac professionnel.

Il y avait beaucoup de devoirs à faire, et j’avais du mal à concilier les études avec le basket. Je m’entrainais déjà avec les pro, donc, c’était très dur de suivre les cours. J’avais entrainement le matin : alors, je ne pouvais pas aller au lycée. L’après-midi, c’était pareil. C’était un gros rythme pour moi. C’est pour cela que j’ai décidé d’arrêter les études après le bac, pour me consacrer uniquement à mon sport.

J’AVAIS PLUSIEURS PROPOSITIONS

Quand j’arrive à Cholet, c’est beaucoup de fierté, puisque mon idole Kévin Séraphin était passé par-là. Je savais que Cholet était un très bon club formateur, au vu des résultats.

Jean-François Martin, qui s’occupe du centre de formation, était venu me voir en Guyane, pour parler de mon avenir, observer mon niveau, etc. Il m’a parlé et il m’a dit que ça serait très bien que je vienne au club.

Je n’avais pas que Cholet, comme propositions, il y avait également Nanterre 92. Je me suis orienté vers Cholet parce que j’avais d’excellents retours sur ce club et aussi sur les conseils de Kévin, qui était vraiment lié à ce club.

KARLTON DIMANCHE : ON AVAIT UNE TRÈS BONNE GÉNÉRATION

Je gagne la coupe de France avec les U17 de Cholet Basket. Cette première compétition, c’était une grande expérience, avec tous les gars de ma génération, les 2000-2001. Il y avait une très bonne ambiance, une cohésion d’équipe incroyable. Dès le début, on avait comme objectif d’aller chercher la finale de Coupe de France. On avait un très bon groupe, avec des joueurs comme Killian Hayes, qui est aujourd’hui en NBA. Et on est allé la chercher ! J’ai eu le titre de MVP des finales, donc c’était super.

L’année d’après, on est de nouveau champion de France, en U18. Je ne peux pas dire que c’était facile, mais on avait des jeunes vraiment très performants, individuellement, au sein de ma génération. Alors, quand tu as un bon groupe, en général, tu as de bonnes perfs ! On a bien dominé la compétition. On finit la phase de poule, avec 12 matchs : 0 défaite. Et en phase finale, on bat l’ASVEL et l’élan Chalon.

INVAINCU À DOMICILE

Le trophée du Futur, je l’ai gagné 2 fois, avec les ainés de la génération 98-99. Ma première année avec les espoirs, en 2017, on perd en finale contre Nancy. C’était une déception pour l’équipe. L’année d’après, on s’est dit qu’on ne pouvait pas perdre une seconde fois. Donc, on était très motivé et on a mis les bouchées doubles pour remporter le tournoi ! On avait fait une très belle saison régulière où on finit premier, invaincu à domicile. En 2019, on a de nouveau gagné le trophée du Futur. On est, encore une fois, resté invaincu à la maison… Donc, on a ponctué 2 très belles années du club, chez les espoirs.

NORMAN POWELL M’A COACHÉ AU BASKETBALL WITHOUT BORDERS 2017

Le Basketball Without Borders, c’est un très gros stage. Il y a plusieurs grands entraîneurs, qui peuvent te donner des conseils, donc c’est intéressant.

Tu vois des joueurs de NBA : je me souviens avoir croisé J.J Redick, et surtout Norman Powell, des Toronto Raptors, qui m’avait coaché, d’ailleurs. Il m’a dit que je devais être plus malin, anticiper encore plus à l’avance mes mouvements défensifs, parce que Norman, c’est un très bon défenseur. Il m’a dit, sur les pick and roll, de bien regarder les pieds des défenseurs, pour capter le maximum d’informations.

J’étais fier de faire ce stage. Ce sont les 60 meilleurs joueurs d’Europe qui se réunissent et qui s’affrontent, c’est dingue ! Il y a des grands coachs qui t’entourent, te conseillent, tu as envie de bien faire devant eux ! J’ai pris tout ce que j’avais à prendre, pour essayer d’améliorer mon jeu. C’est vraiment un très bon souvenir.

KARLTON DIMANCHE : UNE GRANDE JOIE DE SE BATTRE POUR LE DRAPEAU

Ma première sélection avec l’Equipe de France, c’était en U17. Ça fait vraiment plaisir de porter le maillot de son pays. Je n’avais jamais connu ça. Donc, tu essayes de te battre, de jouer à fond, d’honorer tes couleurs. En plus, tu es avec tous les joueurs de ta génération, dont certains, avec qui tu as passé des bons moments. Que ce soit à jouer ensemble, ou l’un contre l’autre, en cadet, en espoirs… C’était une grande joie de les retrouver, et de se battre tous ensemble pour le drapeau.

Les championnats d’Europe U18, avec l’Equipe de France, c’était super. Les gens ne nous attendaient pas à un tel niveau dans cette compétition et ça nous a surmotivé. On a tout donné, on finit avec la médaille de bronze. Chaque match, c’était une finale, pour nous. On a essayé de faire mentir les autres, on croyait en nous, et on avait à cœur de montrer qu’on avait une bonne génération.

ON S’EST CRU TROP VITE EN FINALE DES CHAMPIONNATS DU MONDE

L’année d’après, j’ai fait les championnats du monde U19. Grâce à cette équipe de France, j’ai vraiment progressé. On a fait un très beau parcours. Ce ne sont que des bons souvenirs. On n’est pas passé loin d’une finale contre Team USA. On perd contre le Mali en demi. En se faisant prendre dans notre piège, contre cette équipe. On n’est pas rentré directement dans notre match.

Je pense qu’on les a sous-estimés ! Ils nous ont eus physiquement. Et voilà, ils nous ont battus parce qu’on les a pris à la légère. On s’est cru trop vite en finale. Sur le match, ça s’est payé cash, on s’est vraiment fait dominer dans l’intensité physique. Mais ça reste, bien sûr, une bonne expérience.

LES CAMPAGNES EN ÉQUIPE DE FRANCE : MES MEILLEURS SOUVENIRS SUR LE TERRAIN

Le meilleur moment de ma carrière, c’est le jour de la signature de mon premier contrat professionnel. Ça a toujours été mon rêve d’être joueur pro. C’est quelque chose qui est dur à aller chercher. Mais sportivement, les meilleurs souvenirs sont les campagnes en Équipe de France. C’est vraiment quelque chose à faire dans une carrière !

Il y a quelques semaines, j’aurai dû jouer avec les U20 en sélection, mais avec le Covid, ça a été annulé. C’est dommage, mais ce n’est que partie remise. L’Équipe de France A, je n’y pense pas forcément, pour l’instant. J’essaie déjà de me concentrer sur mon jeu, d’aller chercher mon tir extérieur. Il faut vraiment que j’améliore ce point pour espérer pouvoir y être. C’est évidemment dans un coin de ma tête. C’est normal, comme tout basketteur… Mais il faudra que je me batte et que je travaille dur pour aller chercher ma place.

KARLTON DIMANCHE : MES QUALITÉS ET MES DÉFAUTS…

Mes qualités sur le terrain sont la défense : mon agressivité au cercle, les interceptions. Également, le rebond, aller prendre les rebonds sous le panier, j’aime bien. Mettre la pression au porteur, embêter mon adversaire. Sinon, il y a créer des actions, rentrer dans le cercle, et la finition à l’intérieur.

Mes points faibles sont le tir et ma vision de jeu sur les pick and roll. Avec mon coach Erman Kunter, on a mis en place des entrainements sur mon shoot. J’ai changé ma façon de tirer. Déjà, cet été, on avait bossé avec une agence pendant 2 semaines pour améliorer mon shoot. Il y a eu des effets positifs, j’ai progressé, après je dois continuer à m’entrainer sur cet aspect. J’ai mis en œuvre, avec mon coach, une nouvelle routine, avec des techniques à appliquer sur mes shoots. J’attends cet été pour vraiment être focus dessus, de façon à avoir un bon shoot extérieur.

JE NE BOSSAIS PAS ASSEZ LORS DE MA PREMIÈRE SAISON PRO

Lors de ma première année saison pro à Cholet, je n’ai pas beaucoup joué. Je pense que je ne bossais pas assez, cette année-là. Je l’ai payé. Après, je dirai que c’est une année de découverte. Il faut que je me batte pour avoir mon temps de jeu. Ce n’est plus comme les espoirs, je dois vraiment gratter mes minutes, aller les chercher, se donner à fond, tout le temps.

Aujourd’hui, je travaille plus : je travaille avant et après les entrainements, chose que je ne faisais pas avant. Avec mon beau-père, par exemple, tous les jours, on va à salle pour tirer. Avant la séance collective, je fais une heure de shoot. Et à la fin de l’entraînement, je fais pareil. J’apprends de mes erreurs et ces années précédentes ont justement été une source de motivation supplémentaire, pour moi.

MES OBJECTIFS : DÉJÀ GAGNER LA CONFIANCE DU COACH

Cette saison, mes objectifs, c’est tout d’abord gagner la confiance du coach, parvenir à gratter des minutes et qu’il me fasse plus jouer. Je veux qu’il croie en moi, lui prouver que j’ai ma place dans cette équipe. On a fait quelques réunions, avec Erman Kunter, durant lesquelles je lui ai demandé ce qu’il attendait de moi. Il m’a dit qu’il voulait que je sois un bulldog sur le terrain, un chien ! Que je pique le ballon à mes adversaires, au maximum, que je défende plus dur.

J’ai essayé de le faire. Ces 3 derniers matchs, il m’a mis sur le terrain, et je lui ai prouvé que j’avais la niaque, l’envie de me donner à fond. Il m’a dit que si je continuais comme ça, et que j’étais motivé, il me ferait jouer encore plus. Donc, c’est à moi d’aller chercher mon temps de jeu et de lui montrer qu’il peut me faire confiance.

KARLTON DIMANCHE : LE COVID IMPACTE NOS PERFORMANCES

Cette saison… ce n’est pas qu’on y arrive moins bien que l’année précédente (6ème à la fin de saison 2019-2020), c’est que c’est compliqué avec cette situation du Covid. Les matchs sont loins, ils sont séparés, on n’enchaîne pas. C’est difficile, parce qu’on perd le rythme. On a moins cette sensation de jouer. Mais je pense qu’on sera bien placé d’ici la fin de l’année. Aux vues de ce que dit la ligue, avec les 27 matchs en 4 mois, je pense que ça sera très bon, pour nous. On pourra aller chercher la 8ème place, et même plus !

Le Covid est impactant dans nos performances, car c’est une situation qui n’est pas facile : il y a eu des arrêts d’entrainement, des joueurs qui ont été testé positif, certains qui pouvaient s’entrainer, et d’autres non. On a été privé de salle, à un moment, pendant quelques mois. Donc, ça change ton rythme, ça change tes habitudes, mais c’est à nous de nous adapter. Je pense que ça va le faire.

Il n’y a pas eu trop de match pour le moment, donc j’ai du mal à dire si je suis satisfait de ce début de saison. Déjà, on a joué la Ligue des Champions, donc c’était vraiment bien. Je n’avais jamais vécu ce genre de compétition, donc, découvrir ça, c’était sympa. C’est un plaisir de jouer la Coupe d’Europe. Même si je ne jouais pas beaucoup, au moins être sur le terrain quelques minutes, voir l’ambiance, c’était sympa !

JE POURRAIS PEUT-ÊTRE BOUGER EN PRÊT

Sur ce début de saison, je suis un peu déçu de ne pas avoir beaucoup joué. Je ne suis pas satisfait de mon temps de jeu, j’en veux toujours plus. J’aimerais avoir, au moins, des 10-15 minutes par match, pour faire mes performances individuelles et collectives. Je veux aider l’équipe au maximum !

J’ai parlé avec mon agent, il y a quelques semaines, pour évoquer mon avenir. Je veux essayer d’avoir du temps de jeu. Ça va faire 2 années consécutives que c’est comme ça… Donc, peut-être, je pourrais bouger en prêt pour avoir plus de minutes, pour gagner la confiance du coach et pour retrouver le plaisir de jouer ! J’ai déjà eu des contacts, des rendez-vous, avec d’autres clubs professionnels.

JE VEUX JUSTE JOUER ET ME NOURRIR DU BASKETBALL

Je ne sais pas où j’aimerais jouer, plus tard… Et viser le plus haut niveau possible, je suis conscient que c’est aussi le niveau le plus dur à atteindre. Est-ce que j’y arriverai ? Seul l’avenir me le dira ! Comme tout enfant, j’ai envie d’aller jouer aux Etats-Unis. Si je ne le fais pas, ça ne serait pas une déception, pour autant. Déjà, être dans un bon club en Europe, ça serait un honneur !

La draft NBA… oui, j’y pense, comme tout jeune joueur de basket. J’essaie de tout donner pour aller chercher ma place dans l’élite. C’est dans un coin de ma tête… La NBA, je pourrais m’y voir dans 2 ou 3 ans ! Je n’ai vraiment pas de franchises particulières en tête, qui pourrait m’intéresser. Juste jouer et me nourrir du basketball !

Je ne suis pas trop sur les réseaux sociaux, je vois ce qui se dit sur moi. C’est bien d’être parmi les jeunes à suivre en Jeep Elite. Mais, je pense juste à jouer ! Je ne me fie pas aux regards extérieurs. Je fais abstraction du reste, les commentaires, etc…  Il faut juste faire son travail, se concentrer là-dessus, et avoir confiance en soi. Je n’ai pas vraiment de projets, pour le moment. Je prends ce que je peux prendre, sans me projeter trop loin. On verra ce que l’avenir me réserve.

KARLTON DIMANCHE : J’AI TOUJOURS DU TEMPS POUR MA FAMILLE ET MES AMIS

J’ai des passions hors-basket : j’aime bien jouer à la Playstation, j’écoute de la musique… et le football. Quand je suis en vacances, avec mes amis, j’aime bien aller jouer au foot.

Le dimanche, je n’ai rien du tout, je suis libre, donc ça me permet de prendre du temps pour mes passions : jouer tranquillement chez moi, ou sortir dehors, avec les copains. Même si le rythme de basketteur pro reste intense, tu as quand même du temps ! Le mercredi après-midi ; quand je suis en vacances… je n’ai rien non-plus… Donc oui, j’ai toujours du temps pour mes amis.

Je ne regarde pas souvent la NBA mais je me pose, parfois, devant les gros matchs avec ma famille… Mes parents sont très sportifs et ils suivent beaucoup la NBA. Quand l’ASVEL joue en EuroLeague, je les regarde. Les Nets, aussi, comme je suis fan de Kyrie Irving. J’adore voir d’autres sport à la télé. Je regarde beaucoup de football, surtout Liverpool et le PSG. Le tennis, également, quand il y a des tournois du Grand Chelem, je vais suivre attentivement !

KARLTON DIMANCHE

Avec Nicolas Parant

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