THOMAS VOECKLER : LA GRANDEUR DU TOUR DE FRANCE, C’EST SON PUBLIC MAGIQUE

Figure emblématique du cyclisme français du 21ème siècle, Thomas Voeckler revient sur son histoire avec le Tour de France.
thomas voeckler
(c) Philippe Leroux France Télévisions

Thomas Voecker – Cyclisme sur route

#Champion de France sur route 2004, 2010 #Vainqueur de 4 étapes du Tour de France #Grand Prix de Plouay 2007 Grand Prix cycliste de Québec 2010 #Meilleur grimpeur du Tour de France 2012

Crédit Photo Une : Philippe Leroux France Télévisions

Mon premier souvenir du Tour de France remonte à l’année 1992. Miguel Indurain était alors jaune sur les routes d’Alsace.

Nous habitions en Martinique et j’étais revenu pour les vacances scolaires en métropole, c’était donc la première fois que je voyais passer le Tour en vrai.

C’est la course la plus importante, la plus regardée au monde, et pourtant je ne saurais dire pourquoi. La France est magnifique, on la parcourt pendant trois semaines en période estivale, mais ce ne sont pas les seules raisons. Il y a des choses irrationnelles, qui ne s’expliquent pas et c’est ça la magie du Tour.

L’édition 92 m’a vraiment marqué, car c’est le moment où j’ai commencé le vélo. L’épopée de Claudio Chiappuci en direction de Sestrières, c’était magnifique. Et la légende Indurain également, que de très bons souvenirs. Je le trouvais impressionnant, surhumain.

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LE TOUR, UN RÊVE D’ENFANT QUI EST DEVENU RÉALITÉ

Je n’ai plus jamais manqué un seul tour, les suivant tous les étés à la TV ou dans les journaux selon le décalage horaire. J’étais devenu fan et très assidu. Je me prêtais à rêver d’y participer un jour, comme tout jeune cycliste féru de son sport. J’étais bien conscient quand même que j’avais plus de chance de ne pas le faire, mais j’avais envie de devenir un coureur professionnel, d’en faire mon métier. Pourquoi ne pas réussir à réaliser ce rêve un jour.

Il est devenu réalité, mais petit à petit. Des bons résultats en jeune m’ont permis de passer stagiaire, puis pro, et quelques courses gagnées ont entériné ma sélection pour le Tour. C’est par étapes comme les grandes épreuves cyclistes, un rêve qui en se rapprochant devient un objectif réalisable.

Paris, 2003. Départ du Tour de France au pied de la Tour Eiffel. Je m’apprête à y participer pour la première fois. Quelle émotion, j’étais comme un fou, c’était un moment magique.

LE MAILLOT JAUNE, UNE TUNIQUE DE SUPER-HÉROS

Je m’étais toujours imaginé qu’en tant que coureur que ça devait être grandiose, et ça s’est confirmé. C’est aussi très difficile. Il faut absolument garder la tête froide. 20 étapes, c’est long. Il ne faut jamais s’emballer dans un sens ou dans l’autre. On peut se sentir super bien un jour, ou très mal, mais il ne faut surtout pas se dire que ce sera comme cela les 3 semaines également, car tout peut changer dès le lendemain.

Pour moi, ce n’est pas forcément la plus difficile des courses, le Tour d’Italie peut l’être tout autant. En revanche il y a une telle pression, morale et psychologique, qui nous accompagne qui rend cette épreuve si compliquée.

Ce qui fait la grandeur du Tour, c’est ce public magique qu’on voit tout au long des étapes. Je n’ai pas été surpris par le monde qu’il y avait lors de mon premier tour, mais j’ai été en revanche surpris par le soutien, les encouragements qu’on reçoit de la part des spectateurs sur le bord des routes. Ça aide vraiment, d’autant plus quand j’avais le maillot jaune, dans les coups de moins bien où l’on se dit qu’on se doit de le faire pour eux. On raconte souvent que dans le foot le public est le 12ème homme, dans le vélo c’est pareil, il peut avoir une influence énorme lors de la course.

La preuve, c’est que j’ai terminé 4ème du Tour en 2011 alors que je n’étais pas du tout programmé pour au départ. Il y a eu tout un mélange d’éléments positifs, entre les encouragements du public, une bonne forme sur le moment, une bonne équipe, et ce côté irrationnel qui ont fait que j’ai réussi à garder le maillot jaune 10 jours en 2004 et en 2011.

Je n’étais pas un rêveur, mais je ne m’interdisais rien.

Et à partir du moment où on a le maillot jaune sur les épaules, on va chercher des ressources qu’on n’imaginait même pas posséder. Comme une tunique de super héros. On peut encore voir cette facette du maillot jaune avec Julian Alaphilippe qui n’avait pas perdu de temps sur les favoris du général lors de l’épreuve qui finissait en altitude ce jeudi, ce que peu de monde prédisait. Cette tunique produit quelque chose en soi d’inexplicable.

Après je garde comme meilleurs souvenirs mes victoires d’étapes, car j’ai toujours cherché la gagne, je savourais plus de gagner une étape que de porter le maillot jaune. Ça peut être paradoxal, mais c’est vrai.

L'épopée de Thomas Voeckler en 2004

UN NOUVEAU REGARD SUR CETTE COURSE MYTHIQUE

En prenant du recul depuis, en tant que consultant pour France Télévisions, je me rends vraiment compte de toute l’organisation autour, des sponsors, des médias. Je le vois d’un autre œil. Le travail de l’ombre, celui des staffs dans les équipes de coureurs, mais aussi des personnes dans les villages départs et arrivés, dont beaucoup de bénévoles aussi, c’est exceptionnel, ils font un travail monstrueux et de qualité.

En ce qui concerne mon nouveau travail, consultant pour, j’essaie de rester moi même quand je m’exprime, d’apporter un peu d’humour parfois, mais aussi d’expliquer aux personnes qui n’ont jamais vécu le cyclisme de l’intérieur, les petits côtés du vélo comme la tactique, le choix des équipements afin de faciliter leur compréhension.

J’ai la chance d’avoir à commenter une belle vague française en ce moment. Au début du tour je misais sur Bardet et Pinot, en les mettant sur un pied d’égalité pour gagner le Tour et force est de constater que malheureusement Romain est moins bien. Je pense qu’on le voir maintenant dans un registre d’étape ou de maillot à pois. Comme je le disais trois semaines, ça reste long et il peut toujours revenir, mais des coureurs ont pris de l’avance. Thibaut Pinot notamment, est dans une position idéale, il fait un début de Tour parfait, Julian Alaphilipe nous régale également et il a déjà réussi à reprendre son maillot jaune. Je n’oublie pas Warren Barguil qui peut aussi nous faire des raids en montagne et gagner une étape.

Dans les années à venir, je pense qu’on se rapproche d’une victoire française sur le Tour. Cela fait deux ou trois ans que je le dis, alors qu’avant je ne le pensais pas. J’ai vraiment confiance en Thibaut Pinot et j’espère qu’il y arrivera.

 

THOMAS

 




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