A la lutte pour la qualification en coupe d’Europe, Paris 92 fait partie, depuis quelques années, des clubs forts de la Ligue Butagaz Energie. Le club Francilien a changé plusieurs fois de nom, pour arriver à son appellation actuelle. Elles se sont inclinées hier 25-20 contre Brest, hier à l’occasion de la troisième journée des Play-Off. Plongez au cœur d’un club aux grandes ambitions. Une histoire racontée par Bruno Klieber, le directeur sportif du club de hand.
Crédit photo couverture : Pierre Violet
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LA TREVE INTERNATIONALE A FAIT DU BIEN AUX ORGANISMES
Le repos a fait du bien, même si celui-ci est de courte durée. Les joueuses non appelées en sélection, se sont arrêtées cinq jours. On voit que les organismes sont fatigués, par la multitude de matchs, nous avons quelques blessées et des petits pépins. Joana Resende s’est gravement blessée et opéré à la cheville. On la perd jusqu’à la fin de la saison. Et fort heureusement, la nouvelle formule nous allège en matchs. C’est une saison avec des moments avec beaucoup de matchs et d’autres de grands creux. Il nous reste huit matchs jusqu’à la fin de la saison, alors qu’on a beaucoup enchaîné jusqu’à la fin février. Le calendrier sera encore irrégulier jusqu’à la fin de saison. On alterne montée en charge et creux. Après, cela concerne toutes les équipes et même en période normale, les calendriers sont complexes.
On voit les difficultés et les enjeux pour tout le monde. Sachant qu’il y a aussi les matchs internationaux et les JO qui se profilent à l’horizon. Les Bleues sont le moteur de notre sport et il ne pas négliger ces périodes là. Cela fait partie des contraintes du sport professionnel et c’est à nous de nous adapter. Tout le monde est logé à la même enseigne. Il faut travailler pour lisser les choses. Mais on s’adapte. On devrait rester à 14 l’an prochain en LBE. Après, il ne faut pas oublier certaines choses, comme l’aménagement en coupe de France et la rentrée des équipes européennes en quart de finale. Finalement, entre l’année dernière et cette année, nous n’avons pas joué plus de matchs. Ce passage à 14 équipes était une bonne décision, tout comme cette révision du calendrier avec la nouvelle formule. Rappelons qu’il y a eu beaucoup de report en octobre.
IL FALLAIT GAGNER AU DANEMARK
On est suspendu au covid et on espère ne pas avoir de cas. Ces derniers temps, le championnat a été assez épargné, mais l’Ile de France est dans une zone rouge, avec les nouvelles mesures que l’on connaît. Metz c’est pareil, avec les difficultés et ces matchs qui ne se sont jamais joués contre Dortmund. Tout peut arriver encore et il faut s’adapter.
A propos de notre parcours en coupe d’Europe, je vais sans doute surprendre, mais si on avait gagné au Danemark, on était qualifié. On avait les cartes en main. C’est sur que cette équipe était excellente et termine première de son groupe. On les avait battu de trois buts à l’aller. On perd de deux buts là-bas. Mais c’est sûr que les Russes étaient les moins fortes et se sont qualifiés en ne gagnant qu’un match à l’arraché face à une équipe qui jouait sans enjeu.
Les Russes se qualifient avec une seule victoire, il y a forcément de la déception et une ponte d’injustice. Nous sommes la seule équipe éliminé sur tapis vert. Il y a eu d’autres annulations en coupe d’Europe, mais qui n’ont eu aucunes conséquences. Il faut avancer et voir la prochaine étape. On a la chance de pouvoir jouer, d’avoir un championnat qui fonctionne, d’être à l’entraînement tous les jours. Il y a des petites déceptions, mais elles sont derrières nous. On aurait pu gagner au Danemark donc cela sert à rien de pleurer.
SE REQUALIFIER POUR LA COUPE D’EUROPE
L’objectif de cette fin de championnat est de se requalifier en coupe d’Europe. Le championnat est très serré et toutes les équipes en play-off sont en capacité de finir dans les 4-5 premiers. La 5e place sera qualificative en coupe d’Europe, via wild-cird de l’EHF. Il ne faut pas oublier ce match couperet entre la 5e et la 6e place. Le 6e aura sa chance d’accéder en coupe d’Europe. Tout peut se décider dans la dernière journée, voire la “finale” pour la 5e place. Je préférerais être 4e plutôt que 5e et s’éviter ce stress. C’est à nous de faire la différence sur le terrain. Jouons, car cela ne sert à rien d’aller pleurer ailleurs. Ce sera compliqué avec les blessures. La base arrière va manquer d’expérience.
Le club a longtemps été entraîné par Arnaud Gandais, qui était aussi manager général historique. Le club a eu d’excellent résultats en 2015-2016-2017. On a connu une saison compliquée en 2018-2019, en jouant les play-down. On est revenu vers la coupe d’europe. Notre structuration et organisation commence à être solide. On veut une équipe encadrante qui permet aux joueuses d’évoluer dans la meilleure situation possible. Le staff doit permettre aux joueuses de s’investir dans le projet. La motivation des partenaires et des bénévoles donne un environnement exigeant mais bienveillant, qui permet aux joueuses de bien pratiquer le handball.
PARIS 92 OUI, MAIS ON REPRESENTE AUSSI LA VILLE D’ISSY
On veut construire une équipe cohérente avec le projet de jeu qu’on veut développer. Etre solidaire, bien défendre, ce qui est la base chez nous. C’est le travail fait par Yacine Messaoudi. On s’entraide au quotidien et cela rejaillit sur le terrain. La qualité des joueuses et du recrutement explique les résultats, mais l’objectif n’est pas d’avoir une star qui va marquer 15 buts par match. Il vaut mieux, si on caricature, 14 joueuses à deux buts. Une homogénéité.
Prendre le nom de Paris 92 a fait partie des exigences de la ville de Paris et du département des Hauts-de-Seine, quand ils se sont investis dans le projet. On a eu des discussions, comme avec d’autres partenaires. Paris et les Hauts-de-Seine se sont fortement engagés et ils voulaient que le nom de la ville et du département apparaissent. Il a fallu faire un choix. Issy-Paris-Hauts-de-Seine Handball, ce n’est pas possible pour un club. On a réfléchi à garder le nom d’Issy, car c’est ici qu’on s’entraîne et qu’on joue. Nos joueuses y logent aussi. Mais dans la vie, il faut faire des choix. Nous ne manquons pas de rappeler qu’on représente cette ville. On est attaché à notre département, dont on est le seule équipe féminine professionnelle et le seul club de hand en D1.
EXISTER MEDIATIQUEMENT EST UN TRAVAIL DE TOUS LES JOURS
D’un point de vue marketing, le nom Paris 92, c’est intéressant. Le partenaire a du lien avec les collectivités grâce à nous. Les gens se rencontrent durant les matchs. Le nom de Paris est également plus connu, quand on va jouer en coupe d’Europe. Paris 92 est un très joli nom, mais on est Paris 92 à Issy-les-Moulineaux.
L’exigence de performance vient des deux parties de notre nom. Le 92 est le département le plus riche de France. Il y a plein d’entreprises avec une exigence de haut-niveau, sur le plan économique. C’est également le cas au niveau sportif, avec le Racing 92 et d’autres. Ce tout va nous pousser à être exigent avec nous même et nous pousse à avoir les meilleurs résultats possibles. C’est la volonté de la ville de Paris et du département des Hauts-de-Seine. On veut aller chercher plus régulièrement les trois première places.
Exister médiatiquement, c’est un travail de tous les jours. Parmi les 5 clubs d’excellence, quatre sont masculins. Notre chance est d’être le seul féminin. On veut se démarquer dans ce qu’on propose à nos partenaires et autour des rencontres. Mais depuis mars dernier, tout est arrêté avec le Covid. On ne peut plus attirer de nouveaux partenaires, on ne peut plus les faire rentrer dans la proximité des joueuses. Le travail est de réussir à proposer de la proximité. On est un sport où les joueuses sont accessibles, c’est facile de discuter avec elles et elles ont envie de rencontrer les partenaires. Cela attire ces derniers. On vient au match on assiste à un bon moment et on repart plein d’énergie. Il faut trouver d’autres moyens de réunir les partenaires.
PARIS 92, C’EST AUSSI EDUC HAND INTERVIENT DANS LES QUARTIERS DIFFICILES
Il faut aussi se battre avec ses moyens. Nous n’évoluons pas dans une salle comme la Défense Arena. A nous de faire le job avec nos moyens. Les partenaires peuvent investir parce qu’ils aiment le hand et/ou y trouvent des points positifs. Le rugby et le hand sont deux sports assez proches en terme de contacts. Le hand est un formidable sport à suspens. Ce n’est pas parce que tu as trois buts d’avance à cinq minutes du terme, que le match est terminé bien au contraire. On dit souvent que le money-time est important. Les partenaires aiment bien cet aspect-là. Ils aiment aussi notre côté familial et le côté bien être de la salle. On passe un bon moment.
Il n’y a pas d’activités financières annexes au sportif au sein du Paris 92. Mais nous avons une association Educ’Hand, qui intervient au sein de quartiers difficiles pour permettre à de jeunes filles, entre 8 et 13 ans, de découvrir le hand, tout en ayant du soutien scolaire. C’est totalement gratuit. Ce sont 140 jeunes filles réparties sur 6 sites différents en temps normal. Nous soutenons l’importance de la diététique, autour du petit déjeuner.
ON AIMERAIT AVOIR DEUX OU TROIS JOUEUSES DU CENTRE DE FORMATION QUI INTEGRE L’EQUIPE PREMIERE CHAQUE ANNEE
Nous intervenons toujours dans des écoles, avec notre diététicienne qui explique l’importance de manger le matin. On fait également intervenir une joueuse pro, qui explique le professionnalisme, dont la diététique autour du sport. On est dans le sociétal. Pour le moment, nous ne sommes pas maitres de notre salle, que nous partageons avec les scolaires et d’autres sports et associations. Nous souhaitons développer des séminaires, avec nos salariés et ceux d’autres entreprises. Avec une intervention du coach ou des joueuses. Et un tournoi de hand entre les participants, à la fin. Choses impossibles pour le moment.
Paris 92 a un centre de formation agréée. Sur la saison en cours, Alice Mazens, Adja Ouattara et Mabana Fofana, ont intégré l’équipe première et sont pro. Beaucoup de volonté d’avoir des joueuses issues du centre de formation, qui viennent grossir les rangs de l’équipe première. Certaines qui sont parties, comme Océane Sercien, ont été formés au club. L’arrivée de Yacine, qui a été en charge, pendant 10 ans, du centre de formation de Metz, traduit la volonté d’augmenter le nombre de jeunes dans notre centre de formation, en avoir 10 pour que tous les ans, deux ou trois intègrent l’équipe première. La majorité des joueuses professionnelles viennent de l’ile de France. Les jeunes peuvent s’entraîner, souvent en étant pas trop loin de leur famille. Ce sont des choses que l’on veut encore améliorer dans le futur.
12 JOUEUSES PRO C’EST UN PEU JUSTE SUR UNE SAISON
Le championnat progresse et le niveau s’élève. Le nombre de matchs est conséquent, avec la coupe d’Europe. On en a fait l’expérience cette année, commencer une année à 12 joueuses pros, c’est compliquée avec les blessures. Il faut plus de joueuses, pour tenir plus facilement la saison. L’exigence du haut-niveau s’élève. Les meilleures équipes françaises ont un nombre de joueuses bien plus élevés, entre 16 et 18. Il y en a que 14 sur la feuille et on peut se dire que certaines ne joueront jamais. Mais dans les faits, on voit que toutes ont du temps de jeu, car il y a tellement de matchs et d’aléa.
Pour augmenter notre effectif, faire rentrer de jeunes joueuses en début de saison est important. Mais en début de saison, l’effectif avait 22 ans et demi de moyenne d’âge. Elles ont pris un an, mais cela reste jeune. L’an prochain, avec le recrutement, cette moyenne va remonter. Il y aura u peu plus d’expérience. Mais les jeunes auront leur rôle. Paris 92 a une particularité, c’est que les jeunes du centre de formation s’entraînent avec les pros. Certaines ont même eu du temps de jeu en coupe d’Europe. C’est extraordinaire.
PARIS 92 A L’AMBITION DE JOUER LA LIGUE DES CHAMPIONS
Nous avons l’ambition de jouer la ligue des champions, mais il faut le faire de manière ordonnée. Car c’est rajouter une dizaine de matchs, par rapport à aujourd’hui. C’est une structuration du club plus forte qu’aujourd’hui. Il faut plus de joueuses, plus de personnes autour pour accueillir et se déplacer lors des matchs. On a commencé à travailler sur le long terme (3-4 ans) et on commence à avoir des résultats. L’objectif est d’avoir une stabilité côté entraîneur, avec un projet à 2024. Nous allons avoir un préparateur physique de facon permanente. Il y aura quelqu’un à temps complet sur le centre de formation. Nous réfléchissons avec Yacine, à conserver les joueuses à moyen terme. Le travail de structuration se poursuit, pour avoir une meilleure organisation.
Nous cherchons également à développer l’engagement partenaires. Pour avoir un budget plus conséquent et financer l’augmentation des couts, liés à cette nouvelle ambition. Mais il faut faire les choses dans le bon ordre. D’abord avoir une stabilité du staff pour qu’il puisse travailler dans la durée. Conserver une base de joueuses importantes, là aussi pour une vision à,moyen terme et garder une stabilité. Ensuite développer l’aspect financier.
BRUNO KLIEBER PARIS 92
Avec Etienne Goursaud