HADRIEN « DUKE » FORESTIER : LA PRISE DE RISQUE EST INDISPENSABLE POUR ÉVOLUER DANS L’ESPORT

Si l’on s’intéresse à l’histoire de tous les grands noms de l’esport, une variable est immanquablement présente dans leur parcours : la prise de risque. Duke, coach sur League Of Legends en LCS (devenu LEC), nous raconte son parcours où il a du abandonner un avenir tout tracé dans la finance pour vivre sa passion à 100%.
Duke LoL

Hadrien “Duke” Forestier – Coach

League Of Legends : #Splyce #Ancien PSG eSports #O’Gaming

Les progamers ont beau être le coeur de  l’eSport , ils ne sont pas les seuls à faire rayonner nos disciplines préférées. Plongez dans les coulisses du sport électronique professionnel en découvrant les histoires de dirigeants, de coachs, du staff médical, des fans…

Si l’on s’intéresse à l’histoire de tous les grands noms de l’esport, une variable est immanquablement présente dans leur parcours : la prise de risque. Duke, coach sur League Of Legends en LCS (devenu LEC), nous raconte son parcours où il a du abandonner un avenir tout tracé dans la finance pour vivre sa passion à 100%. (Crédit Photo Une : Riot Games).

Mes parents m’avaient imposé une règle à la maison : tant que mes notes étaient bonnes, je pouvais jouer aux jeux-vidéo autant que je le voulais. Autant dire que je n’ai pas eu de mauvaises notes.

Cette passion vidéoludique a toujours fait partie de ma vie. D’abord partagée avec mon père très jeune puis plus tard seul ou avec des amis sur des titres comme Warcraft 3, Halo et Age of Empire.

Scolairement tout allait bien et j’ai suivi le parcours classique du jeune bourgeois. Après un lycée coté, j’ai intégré une prépa « math sup, math spé » puis l’école des Ponts et Chaussées pour finir sur un Master d’ingénierie financière. En parallèle de mes études j’ai découvert le monde professionnel qui s’offrait à moi : fonds d’investissement, banque d’affaires, fusion-acquisition…

Mais la finance n’était pas vraiment un milieu qui m’intéressait et j’ai commencé à réfléchir à l’avenir qui pouvait me convenir.

NE PAS SUIVRE LE DESTIN TRACÉ DU JEUNE BOURGEOIS

La finance était la continuité naturelle de mes études, une sorte de pilote automatique pour les jeunes bourgeois qui réussissent. Elle permettait d’acquérir le pouvoir, l’argent et tous les à-côtés qui faisaient rêver mes futurs collègues : aller en costume de marque au travail, sortir avec des gens de son milieu et se dire qu’on est sur les bons rails de la société.

J’ai fait ces études tout simplement car j’étais doué en maths et que c’était le chemin d’excellence. Mais une fois mon diplôme en main, je n’avais aucune envie d’entrer vraiment dans ce monde. Les missions ne m’intéressaient pas, le rythme de travail était trop prenant et même si je me suis fait quelques bons amis, je rencontrais beaucoup trop souvent des gens sans passion avec qui je n’accrochais pas. J’ai grandi dans un univers très geek et je me trouvais au milieu d’une sorte de faux univers mondain avec des gens qui souhaitent ressembler aux personnages de la série Suits et Mad Men.

Si j’avais accepté de faire ces études compliquées, c’était pour faire ce que je voulais par la suite. J’ai alors orienté mes choix vers ce que j’aimais le plus : le monde du jeu-vidéo.

 

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PUNTA CANA, MILLENIUM & O’GAMING

J’avais commencé à suivre l’univers de League of Legends depuis le début de mes études supérieures. Ce fut donc une grande déception de ne pas réussir à décrocher un stage de fin d’études chez l’éditeur du jeu, Riot.

Je suis alors parti à Punta Cana (République Dominicaine) en business développement pour un projet immobilier. La connexion internet étant rarement stable, j’avais énormément de temps à tuer et j’ai donc commencé à écrire des articles sur LoL pour le site Millenium.

Ces contenus ainsi que quelques vidéos YouTube que j’avais créées m’ont permis d’intégrer O’Gaming à mon retour en France pour commencer mon aventure de casteur. Si l’expérience reste un des épisodes les plus enrichissants de ma vie, j’ai rapidement trouvé les limites de mon évolution dans ce domaine : aussi bien par mon arrivée tardive sur la scène face aux “poids lourds” déjà installés que par mon intérêt avant tout pour l’aspect technique du jeu où je ne pouvais réellement exprimer ni travailler comme je l’aurais souhaité.

En parallèle, j’ai donc trouvé un poste de chef de projet chez Ubisoft sur « Ghost Recon ». C’était une période prenante, car je continuais de caster pour O’Gaming sur les grands événements et il me fallait parfois poser des jours de congé pour le faire. Cette situation m’a rapidement poussé à faire un choix.

Avant ça, je n’avais jamais envisagé une carrière dans l’esport. Le cast c’était pour le fun, une sorte de prolongement de l’émerveillement que j’avais quand j’étais plus jeune à découvrir les vidéos d’O’Gaming. Chez Ubisoft, j’avais un poste de manager qui sort d’école ce qui ne me permettait pas de toucher à ce que j’aimais vraiment. Les perspectives d’évolution sympas comme game designer n’apparaissaient pas réalisables avant plusieurs années.

J’ai toujours eu du mal à me projeter sur le long terme, je pense qu’on a toujours les moyens de faire des choses rapidement si l’on s’en donne les moyens.

DE L’AUTRE CÔTÉ DU MIROIR

Deux choses m’ont permis de prendre cette décision de m’orienter définitivement vers l’esport et de ne plus revenir du côté de la finance.

Tout d’abord de voir ceux qui avaient quelques années de plus que moi se dire qu’ils continueraient encore un peu pour se forger une expérience et un compte en banque, mais qui au final reportaient le problème à l’infini jusqu’au moment où ils auraient femme, enfants et un crédit pour leur appartement dans le 8ème arrondissement. Impossible pour eux à ce moment-là de lâcher leur salaire de 15 k mensuel et de se lancer à l’aventure.

La seconde raison, ce sont les gens que j’ai pu rencontrer d’abord chez Millenium et ensuite avec O’Gaming. Étant issu d’un milieu bourgeois et élitiste, c’était un réel changement de milieu, à la fois plus détendu et naturel avec qui j’avais bien plus d’atomes crochus.

De mon côté, je pensais avoir un avantage, car même si cet univers était fascinant, beaucoup n’étaient pas d’énormes bosseurs. Avec ma formation et mon rythme de travail, je pensais que je pouvais percer rapidement.

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Je me suis alors dit qu’il fallait que je tente ma chance dans une équipe. Après quelques contacts infructueux avec Shaunz de chez Vitality, j’ai bien accroché avec Yellowstar qui s’occupait du nouveau projet du PSG sur LoL.

Le salaire était suffisant pour justifier de laisser tomber mon boulot actuel, les missions avaient l’air top et l’expérience pouvait être dingue. J’ai démissionné sans grande difficulté pour devenir coach avec la team parisienne.

Mes choix de carrière ont été parfaitement compris par mes proches. Après le plus grand éditeur français de jeux-vidéo j’allais désormais au PSG. Même s’ils ne connaissaient rien à l’esport, ce genre de nom rassure.

Mais tout n’a pas été rose au démarrage. Les résultats n’ont pas été au rendez-vous et j’ai pu avoir beaucoup de moments de doute. J’avais donné tout mon temps à l’équipe et au jeu, mais nous n’avons rien gagné et je me faisais démolir par la communauté française de LoL. J’étais par ailleurs déçu de me voir être cloué au piloris pour ma prise de risque quand les fameux “influenceurs” étaient glorifiés au sein de la scène française pour pas grand chose, une industrie bien étrange finalement.

Avec Splyce, j’ai vraiment pu travailler dans le calme loin de cette caisse de résonnance médiatique qu’est le PSG. Je me suis rassuré sur mes compétences et je suis aujourd’hui reconnu par des grands noms de LoL. Qu’un « DarkKevinDu35 » m’insulte sur Twitter n’a plus aucune importance aujourd’hui, ça ne change ni ma perception du métier ni celle de mes joueurs pour moi.

LE BILAN, CALMEMENT

Quand je vois mon début de carrière, entre écriture d’articles, cast chez O’Gaming et coach en LCS, on pourrait penser à une certaine instabilité. Mais elle ne me fait pas peur. L’important reste les contacts que tu te fais et que ces personnes pensent que tu effectues du bon boulot.

J’adore cette nouvelle vie et je suis tellement satisfait de m’être fait tant de super potes comme Chips, Noi, Zab et Bulli.

À moins que le métier de coach ne change, je ne me vois pas l’être toute ma vie. Le rythme est épuisant avec ces 10 mois intensifs et ce stress permanent lors des jours de matchs. Il peut survenir une petite overdose du jeu, et il m’arrive de ne plus toucher à LoL pendant des semaines. Je m’impose donc une sorte de rythme de vie en dehors du jeu pour ne pas me coucher dès que le pc est éteint. Même si je reste un passionné d’esport, je dois prendre ce rôle de coach comme un vrai boulot pour bien performer.

Il sera alors temps d’ici quelques années de penser à une autre fonction. Et pourquoi ne pas envisager à moyen terme un poste dans le top management d’une équipe esport ?

DUKE

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