Tripy Makonda, 31 ans, évolue au Luxembourg au sein du club de Hamm Benfica. Passé par le Paris Saint-Germain, Brest, Coimbra (Portugal), avant d’aller au Luxembourg, il possède un solide vécu. En parallèle, comme de plus en plus de sportifs de haut-niveau, il a choisi de mener des études de front. Inscrit en Bachelor Management sport au sein de Sport Management School. Il livre son témoignage, celui d’un sportif de haut-niveau qui mène un double projet. En évoquant aussi son parcours de joueur professionnel, le PSG où il a été formé, mais aussi le football au Luxembourg.
TRIPY MAKONDA – LA REPRISE D’ETUDE A ETE UN GRAND CHAMBOULEMENT
Je fais un Bachelor management du sport, sur une durée d’un an. On a dix modules à passer plus un mémoire qui sera à rendre à la fin du mois de novembre. La flexibilité de cette session online, en distanciel est intéressante. On a un cours tous les mercredis, d’une heure et demie environ, avec des cas pratiques à rendre à la fin du module. Le module dure quatre semaines. Le cas pratique sert à voir si les connaissances ont été acquises.
Pour moi, cela a été un grand chamboulement, car je reprends les études après avoir arrêté en 2009, suite à mon passage pro. Il faut remettre le nez dans les bouquins, faire de la recherche. Tout cet apprentissage pour acquérir une nouvelle connaissance. Pour un sportif de haut-niveau, c’est compliqué. On est pris par le quotidien, on doit faire attention à notre corps. C’est-à-dire penser à notre repos, à la sieste, c’est la partie fraîcheur mentale, qui est remise en cause, quand on se replonge dans les cours. C’est difficile, mais dès qu’on prend le train en marche, on arrive à bien s’y faire, du moins de mon côté.
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TROUVER DES FORMATIONS EN ADÉQUATION AVEC LES CONTRAINTES DU SPORTIF
Ce n’est pas tous les jours facile et il faut se mettre dedans, mais quand on sait ce que l’on veut, la tâche est plus facile. J’ai entraînement le mercredi, voire parfois des matchs, mais la chance qu’on a, c’est que les cours sont enregistrés et on peut le regarder quand on veut. Le mercredi, certains peuvent regarder le cours en direct et d’autres, comme moi, peuvent regarder en différé, dans les jours qui suivent. C’est important car, actuellement, on enchaîne tous les trois jours jusqu’à la fin du championnat. Cela me permet de me poser devant le cours, le jeudi ou le vendredi et ensuite faire mes propres recherches, pour enrichir mon apprentissage.
Ce qui est important, pour un footballeur, un jeune du centre de formation, c’est l’aspect socio-éducatif. Il faut sonder le joueur et lui donner une projection dans le futur, même si ce n’est pas toujours facile. Il ne faut pas le forcer, mais voir ce qu’il peut faire et ce qu’il a envie de faire. Pour lui permettre de créer cette connaissance. Si un joueur, après sa carrière, a envie de devenir agent immobilier, dès son entrée dans le centre de formation, ce serait bien de lui trouver des formations en adéquation avec le sport qu’il fait, pour qu’il puisse allier les deux. Avec la session Sport Management School, c’est faisable ! Les cours, forcément, sont synthétisés et condensés et il faut faire de la recherche personnelle.
Mais cela permet de faire ce double projet. Cela nous permet d’apprendre, les professeurs sont très chaleureux et bienveillants et toujours prêts à nous expliquer les choses.
TRIPY MAKONDA – LA FIN DE CARRIÈRE EST VUE DIFFÉREMMENT SELON LES PERSONNES
Et cela permet d’éviter au joueur qu’il attende la fin de sa carrière pour passer ses diplômes. Car un joueur, qui arrête sa carrière, bascule directement dans une nouvelle vie active. C’est important de penser à son après-carrière. C’est vrai qu’on scinde toujours les choses en deux. Mais il faut que le projet sportif et professionnel soient liés. Cela se fait énormément dans le rugby et ce serait bien que cela se développe dans le football. Je sais que c’est en train de se mettre en place petit à petit, dans les centres de formation. Pour que le footballeur, pendant sa carrière, puisse penser à l’après et qu’il ne soit pas obligé de repasser par des études à la fin de celle-ci. Pour éviter qu’il se dise « qu’est-ce que je dois faire ? ». Éviter la « dépression » que certains vont connaître car ils ne sauront pas quoi faire.
La fin de carrière est vue différemment selon les personnes. Il faut éviter cette petite mort et c’est compliqué. On s’est tellement investi dans notre sport, qu’on a privilégié l’aspect sportif au détriment de certaines choses. Quand cela s’arrête, cela fait forcément mal. On est des challengers et des compétiteurs et c’est dur de se retrouver sans rien. L’arrêt brutal fait qu’il n’y a plus ce truc qui fait qu’on se lève pour quelque chose. Cela peut être compliqué pour la suite.
J’AI CE VÉCU QUI ME PERMET D’AVOIR UNE CERTAINE LÉGITIMITÉ AUPRÈS DES JEUNES
Je ne suis pas attiré par UN métier en particulier. Aujourd’hui, j’ai la chance d’être consultant pour France Bleu Paris et de découvrir l’aspect journalisme, qui est tout un univers intéressant. J’aimerais être entraîneur et transmettre et en particulier à des jeunes. Où être dans une structure, pour développer et avoir une philosophie et une identité de club. Je suis dans la transmission du joueur et de la structure. Être consultant ou journaliste peut également m’intéresser.
Durant ma carrière, j’ai un peu tout connu. J’ai connu le Paris Saint-Germain, le centre de formation et les pros, je suis parti à Brest, un club intermédiaire dans ma progression. J’ai eu la chance d’aller au Portugal, découvrir une autre culture, une autre façon de voir le football. Je suis repassé par la France et le chômage. J’ai joué à Poissy, j’ai découvert le football amateur, ce qui m’a permis de comprendre comment cela fonctionne. Aujourd’hui, je suis au Luxembourg, cela me permet aussi de découvrir une autre culture. J’ai ce vécu, qui me permet d’avoir une certaine légitimité auprès des jeunes. Ce sont à eux que je veux transmettre, leur dire les chemins à ne pas prendre selon leurs objectifs et leur faciliter la tâche.
TRIPY MAKONDA – LE CHAMPIONNAT DU LUXEMBOURG EST EN TRAIN DE SE STRUCTURER
Parmi les pays que j’ai fait, incontestablement le Portugal m’a offert le meilleur cadre de vie. Brest c’était sympa, car cela m’a permis de sortir de mon confort parisien. Le stade est très british et chaleureux. Mais le Portugal c’est une autre dimension. Ce que je recherchais, je l’ai trouvé là-bas. J’avais une réflexion sportive et des questionnements. Toutes mes réponses ont été trouvées là-bas. J’ai été comblé sportivement, par la méthodologie et l’encadrement portugais. La qualité de vie est bien là-bas, les Portugais sont très agréables. Il y avait la barrière de la langue, mais j’ai réussi à apprendre un peu cette langue. L’ambiance est exceptionnelle.
En termes de niveau, le Luxembourg est un championnat semi-pro, avec des clubs agencés comme des professionnels, qui disputent les qualifications en Champions League et en Europa League. Et d’autres en pleine construction et qui cherchent à devenir pro ! Le niveau varie. Les meilleurs clubs valent une équipe de milieu de tableau en Ligue 2. Ensuite cela varie entre de la Nationale 1 et Nationale 2. Ce n’est pas un pays qui a une culture football, les internationaux jouent à l’étranger. Mais, gentillement cela se construit et le niveau monte. Pas mal de joueurs qui ont connu divers clubs professionnels, commencent à arriver au Luxembourg. Le cadre de vie y est pas mal. D’ici quelques années, si le Covid n’a pas fait trop de mal, si la progression est ascendante, on pourra entendre parler du Luxembourg d’ici quelques années.
FRANCHIR LE CAP ET VOIR UN CLUB LUXEMBOURGEOIS JOUER LA LIGUE DES CHAMPIONS
Les performances de leur équipe nationale sont significatives. Les joueurs partis à l’étranger amènent la rigueur et l’identité du pays dans lequel ils évoluent. Le coach fait du très bon boulot. Ils veulent donner une visibilité à ce championnat mais aussi aux joueurs. Avec une vraie formation, ce qui est très dur encore actuellement. Lors de la saison 2018-2019, un club luxembourgeois a été qualifié en Europa League. Le jour où un club luxembourgeois arrivera directement en Ligue des Champions, ce sera un vrai message, comme quoi le Luxembourg a passé le cap et s’offrira une vraie visibilité. La Belgique, l’Allemagne et les Pays-Bas ne sont pas loin.
J’avais un ami qui évoluait à Malmo en Suède. Son équipe a évolué en Ligue des Champions, ce qui leur a offert une vraie visibilité en Suède. Quand le Luxembourg aura atteint ce stade là, ce sera encore plus facile de mettre des choses en place.
TRIPY MAKONDA – JE SUIS UN SPORTIF DE HAUT NIVEAU MAIS AUSSI UN HUMAIN ET UN CITOYEN
Avant d’être un sportif de haut-niveau, je suis un être humain et un citoyen. Quand on regarde sur les réseaux sociaux, quand un sportif prend position sur un sujet, les gens ont ce discours négatif de dire : « Tu fais du football, tu n’as pas à parler ». Pour un Français, même s’il joue à l’étranger, s’il a envie de se positionner, il peut le faire. Attention, ce n’est pas une obligation. Chacun gère sa situation comme il l’entend. Je suis un citoyen français. Quand des choses me plaisent ou me déplaisent, j’ai le droit de donner mon opinion. On en revient au fait qu’il ne faut pas scinder les choses en deux. Tripy Makonda le citoyen et Tripy Makonda le footballeur sont la même personne.
Même si je suis souvent dans le moment présent, du fait de mon métier, qui est dans l’engagement actif, ce qui me fait faire abstraction de ce qu’il y a autour. Mais une fois le match terminé, je redeviens un citoyen qui donne un avis sur des sujets. Je ne comprends pas que les gens se braquent quand on fait cela, je le ressens comme tel ! Je suis toujours dans la bienveillance et jamais dans les insultes, car je n’ai pas été éduqué de la sorte. Il faut avoir les deux parties et écouter les deux camps pour un bon esprit critique et de ne pas avoir peur d’être bousculés dans ses connaissances.
TOUJOURS UN OEIL ATTENTIF SUR LE PSG
En tant qu’ancien joueur du PSG, je garde forcément un œil attentif à mon ancien club. C’est là où j’ai été formé. J’ai une belle histoire avec le PSG, j’ai grandi à côté du Parc, je jouais au stade Jean-Bouin, avant qu’il devienne ce grand stade. On jouait au pied de la tribune Boulogne. J’ai été scolarisé au lycée-collège Claude Bernard, qui est à côté de la tribune Auteuil. Cette attache restera, quel que soit le club où j’irai. Malgré l’énorme respect que j’ai pour les clubs auxquels j’ai joué après. Et quand on voit le club que c’est devenu, avec l’arrivée des Qatari.
Le club a une histoire, avec cette épopée en Coupe des Coupes en 1996. Il a eu cette période de disette ensuite, c’était un PSG qui amenait toujours de l’émotion, mais depuis l’arrivée des nouveaux propriétaires, le PSG a amené des grands joueurs dans la force de l’âge, comme Thiago Silva et Zlatan Ibrahimovic, deux joueurs énormes au Milan AC. Il y a eu Lavezzi ou Cavani etc. Que des joueurs à très forts potentiels. Dans mes dernières années au PSG, il y a eu des grands joueurs en fin de carrière comme Claude Makélélé, Greg Coupet ou Ludovic Giuly. Cela a propulsé le PSG sur la scène européenne et cela a donné une vraie valeur marchande. Le club a fait une marque et sportivement cela a progressé et on le voit avec Neymar et Mbappé.
Tripy Makonda : “La Ligue des Champions est un sprint”
Il manque du détail pour gagner la Ligue des Champions. Le championnat de France est un vrai marathon, où tu peux construire quelque chose dans la durée. Alors que la Ligue des Champions c’est presque un sprint, avec le résultat qui va primer directement, avec une stratégie directe. On le voit, contre Manchester City, pour moi ce n’était pas le grand City, mais qui a su être efficace et avoir une organisation équipe, contrairement au PSG. J’étais plus en stress contre le Bayern que contre City. Les Allemands, c’était vraiment des vagues qui déferlaient sur la défense parisienne.
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TRIPY MAKONDA
Avec Etienne Goursaud
