Maële Biré-Heslouis a réalisé une saison absolument fantastique. Avec trois podiums internationaux. Le premier lors de la coupe d’Europe de marche par équipes, sur le 10 km marche sur route, agrémentée d’un nouveau record personnel et de France juniors en 47’05 et une médaille de bronze. La seconde, lors des championnats d’Europe juniors au mois de Juillet à Tallinn, avec là aussi le bronze et un record de France à la clé sur le 10000 m sur piste (46’32”94, qu’elle partage avec Camille Moutard en 46’32”8). Enfin, le clou de sa saison a été le 18 août dernier et l’argent lors des championnats du monde juniors à Nairobi. Devenant la première Française, toutes catégories confondues, à obtenir une breloque mondiale à la marche.
La “pionnière” nous raconte sa saison exceptionnelle, sa découverte de la marche, mais aussi ses objectifs futurs. Avec l’idée de bien réussir la transition sur le 20 km marche sur route, la distance olympique. Une réflexion bien construite. Si vous voulez suivre l’athlète voici ses réseaux sociaux ci-dessous. Soutenir un athlète fait partie du mécénat et un don est déductible à 66% d’impôts. Les athlètes ont encore du mal à vivre de leur sport actuellement et à 3 ans des JO 2024, toute aide est la bienvenue pour elles et eux.
Crédit couverture : World Athletics
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MAËLE BIRÉ-HESLOUIS – J’AI MIS UN PEU DE TEMPS À RÉALISER POUR LA MÉDAILLE
Avec l’altitude, on savait que les personnes non acclimatées allaient avoir plus de difficultés dès le 4e kilomètre. Nous étions acclimatés, mais même comme cela, c’était difficile et l’altitude a été un facteur très important dans la course. Il fallait gérer et je savais qu’il y avait des allures auxquelles je ne devais pas aller en début de course, car je n’allais pas les tenir. Il fallait conserver du jus pour terminer la course et bien la terminer. En championnat, il y a pas mal de changements de rythme, avec des à-coups qui sont très épuisants et encore plus avec l’altitude. Je me disais que j’allais accélérer si cela pouvait le faire. Pour ne pas être morte au 5e kilomètre et ne pas être capable de jouer quelque chose dans le final.
J’ai mis un peu de temps pour réaliser cette médaille, mais je réalise de plus en plus. Je suis contente de ce que j’ai fait, mais pour moi ce n’est qu’une étape et il ne faut pas trop se focaliser dessus. C’est exceptionnel et j’en suis très contente, mais je passe à la suite. Ce n’est qu’un championnat du monde juniors et j’espère faire de belles choses chez les séniors. C’est ma dernière année chez les juniors, je finis ma saison fin septembre, avant de basculer sur une des plus grandes étapes pour un marcheur : le passage sur le 20 km, qui est la distance olympique.
Depuis que je fais de la marche, c’est l’objectif de réussir cette transition car ce sont ces grandes compétitions qui vont vraiment signifier quelque chose pour moi. On peut faire des 20 km en juniors et j’aurais aimé en faire un. Mais cette saison a été marquée par deux grands championnats au lieu d’un. C’était plus logique de me préparer pour ces deux échéances. Avant de voir pour le reste. J’ai vraiment hâte de découvrir cette distance.
LA GROSSE DENSITÉ DE MARCHEUSES EN FRANCE EST UNE BONNE CHOSE
On a une très bonne génération de marcheuses en France, on est toujours tirée par des filles qui sont plus fortes et il y en a quelques unes devant actuellement. Cela me pousse à progresser, à essayer de battre leurs records qu’elles établissent chaque année. C’est très motivant et la perspective de savoir qu’il va y avoir une bonne densité de filles sur le 20 km en France, est une bonne chose. C’est quelque chose qui ne s’est jamais vu et cela va donner de très belles compétitions. Je n’ai pas vraiment de modèle en France, mais je commence à connaître toutes les filles et ce sont des filles qui m’inspirent de par leurs performances. J’espère pouvoir faire comme elles les prochaines années. On fait les stages ensemble et on commence vraiment à se côtoyer et on s’entend très bien.
Yohann Diniz a commencé à faire connaître la marche en France et cela a été un grand plus et la médiatisation de la marche est croissante. Le fait qu’on ait une bonne génération chez les filles, cela commence à faire parler. Les records de France sont battus quasiment à chaque saison. Pendant des années, on manquait de bon et très bon niveau et là on montre que cela arrive et c’est quelque chose de très positif. Cela m’aide de savoir que Pauline Stey fait 4e des Europe, il y a deux ans. Les filles ont commencé à faire de bons trucs au niveau européen et mondial. C’est à moi de suivre et d’essayer de faire mieux. C’est ce qui nous pousse chacune d’entre nous, on est plusieurs et cela à celle qui sera la meilleure sûr telle ou telle compétition.
MAËLE BIRÉ-HESLOUIS – J’AI REÇU BEAUCOUP DE MESSAGES DE FÉLICITATIONS POUR MA SAISON
Il y a également une belle génération chez les juniors, cela me motive également. On a toujours envie de faire une médaille quand on va dans un championnat. On a eu des médailles dans plein de disciplines différentes, cela montre une belle diversité intéressante. La marche était en fin de championnat et je voyais les bons résultats. Cela me motivait pour que je donne le maximum et réussir à faire aussi bien.
J’ai reçu énormément de messages après ma course, cela fait toujours plaisir. Je ne sais pas si j’en ai eu plus qu’aux Europe, c’est plutôt un tout. C’est une médaille aux championnats du monde, mais c’est surtout toute une saison qui est plutôt bien réussie. C’est ce qui rend le truc encore plus beau, c’est que j’ai été là sur toutes les compétitions où il fallait être présente. Je crois que les félicitations étaient aussi dans ce sens-là et cela m’a énormément fait plaisir.
Actuellement, je suis soutenue par les collectivités locales, région et département, mais également mon club du Pays Saint-Lois Athlétisme. L’agence de mon département Attitude Manche, m’aide depuis deux ans et demi. C’est super cool de voir que des personnes me soutiennent et croient en moi depuis quelques années. C’est aussi une motivation supplémentaire. J’espère que ces médailles pourront m’aider dans les mois à venir. La marche demande beaucoup d’entraînement, comme beaucoup d’autres sports. C’est compliqué de vivre et toute participation serait la bienvenue pour me permettre d’optimiser mes entraînements. Et pour faire des choses encore plus impressionnantes dans les années à venir.
J’AVAIS LA VOLONTÉ DE PROUVER QUE J’ÉTAIS CAPABLE DE FAIRE DES CHOSES INTÉRESSANTES
Je suis actuellement à Science-Po Rennes, dans une antenne à Caen. L’an passé, je n’avais pas d’aménagements horaires. J’ai vu que c’était très compliqué comme cela. J’ai rendez-vous en fin de semaine pour voir comment on va s’organiser pour cette année, mais normalement je vais pouvoir passer ma L2 sur deux ans. Cela va me dégager pas mal de temps pour m’entraîner et même pour récupérer, je passerai moins de temps dans les transports. Cela devrait être bien mieux pour moi, sachant que je m’entraîne deux fois par jour et tous les jours. Je marche 13 fois par semaine et ma demi-journée de repos est tournée vers la musculation.
J’ai découvert la marche quand je suis arrivée à l’athlétisme, dans mon club actuel. Il me semble que j’étais soit Benjamine 1 ou Poussine 2, à une époque où on touche à toutes les épreuves, sans trop se spécialiser. Il y avait un groupe de marche et mon coach actuel (NDLR : Alban Pessin), faisait des initiations pour les petits. Et il avait repéré une de mes amies qui avait déjà une très bonne technique et il lui a proposé de venir dans le groupe de marche. Je me souviens d’avoir été un peu piquée dans mon orgueil qu’il ne me propose pas d’en faire partie.
J’ai finalement pu faire quelques séances avec le groupe. Au début, je n’étais pas du tout douée à la marche, j’avais une mauvaise technique et j’étais meilleure en saut et en sprint. Mais j’avais la volonté de prouver que j’étais capable de faire des choses intéressantes. Cela m’a poussée à continuer.
MAËLE BIRÉ-HESLOUIS : LES WEEK-ENDS DE COMPÉTITIONS NATIONALES EN BENJAMINE, CELA A ETE LE DECLIC
Ce qui est intéressant en marche, c’est qu’on a des compétitions nationales dès benjamin. Je fais mon premier podium national en Benjamine. On partait tout le week-end en compétition avec toute l’équipe, il y avait une vraie émulation et ambiance de compétition, tout en étant bon-enfant. J’adorais ces week-ends là, il y avait deux week-ends de compétitions par an et c’était mes objectifs principaux. Je voyais vraiment des occasions de performer et profiter. Avoir ces week-ends de compétition et pouvoir faire des podiums au niveau national, m’a poussé à continuer. C’était une source de motivation.
Paradoxalement, la période du Covid m’a plutôt “aidé”. Le premier confinement a été compliqué au niveau de l’entraînement, mais j’avais un tapis roulant et une salle de musculation, mais aussi des parcours autour de chez moi, j’ai pu sauver les meubles. Ce qui m’a beaucoup aidé, c’est que j’étais au lycée, avec des horaires 8h – 18h. Ce qui est extrêmement fatiguant quand on fait du bi-quotidien. Avec le Covid, les cours étaient distanciels et on n’en avait pas forcément. J’ai pu mieux m’organiser et j’ai pu bien mieux m’entraîner. J’ai énormément progressé dans la période et j’ai pu tout mettre en place niveau récupération et entraînement. La saison d’après a été marquée par de bonnes performances. C’est un peu le résultat de tout ça.
JE N’AURAI QUE 22 ANS LORS DES JO 2024
Paris 2024, à la base, ce n’était ni un rêve ni un objectif, je me concentrais plus à progresser années après années. Là, je commence à me dire : “Pourquoi pas”. On peut essayer de tenter de me rapprocher des 1h30 sur le 20 kilomètres. Ce serait idéal pour y être. Mais, dans tous les cas, ce n’est pas quelque chose sur lequel je me focalise. Je préfère prendre les choses comme elles viennent et faire une bonne transition sur le 20 kilomètres. Prendre le temps pour être forte dans 5 ou 6 ans.
En 2024, je n’aurai que 22 ans, ce qui est jeune pour une marcheuse pour les Jeux. Je ne me l’interdis pas, mais ce n’est pas une obsession. Certains doivent y penser davantage que moi, car ils sont sur des disciplines où à 22-23 ans, on peut être hyper performant. Et être dans les meilleurs mondiaux. Ce n’est pas impossible en marche, mais c’est plus compliqué. Il faut prendre en compte la maturité de l’athlète aujourd’hui et dans 3 ans.
Je ne me fixe pas d’objectifs, concernant le 20 kilomètres, je n’ai aucune idée du chrono que je suis capable de faire. D’ailleurs, j’espère que, même si j’avais une idée aujourd’hui, elle serait différente dans quelques mois. Je verrai, quand je serai dans ma préparation terminale pour la distance, au printemps. A ce moment-là, je saurai à quelle allure partir.
MAËLE BIRÉ-HESLOUIS
Avec Etienne GOURSAUD