Cyclisme – Sandra Levenez – Le Tour, la course la plus difficile

Sandra Levenez est une coureuse cycliste qui évolue au sein de la Cofidis. Elle fait partie des pionnières qui ont participé au Tour de France féminin
Sandra Levenez

Sandra Levenez est une coureuse cycliste qui évolue au sein de l’équipe Cofidis. Comme les 144 coureuses présentes sur les routes du Grand Est, elle fait partie des pionnières qui ont participé au renouveau du Tour de France féminin. Elle y a pris la 89e place. Elle nous raconte son Tour de France, comment elle a vécu l’engouement populaire, l’intensité terrible de la course. Professionnelle depuis trois ans (Arkéa Samsic puis Cofidis).

Crédit : Equipe Cycliste Cofidis

La page twitter de Sandra Levenez : ICI

SANDRA LEVENEZ – UN NIVEAU D’INTENSITÉ ET D’ENGAGEMENT QU’ON N’AVAIT JAMAIS ATTEINT

Le Tour de France, c’était assez énorme. Ce n’est pas galvauder le terme que de dire cela. Tant au niveau de l’engouement du public, qu’on a pu avoir sur les routes. Sportivement, cela a atteint un niveau dingue. Je suis professionnelle depuis trois ans et franchement, au niveau de l’intensité physique, il y avait un engagement que je pense qu’on a rarement atteint. C’est vraiment la course la plus difficile à laquelle j’ai participé. Ce n’était pas juste sur une étape, c’était vraiment tous les jours un niveau d’engagement assez incroyable. Je ne suis pas la seule à l’avoir ressenti. C’est super intéressant, on a montré de belles choses. Les premières heures de course se courent à 41-42 de moyenne, sur des parcours vallonnés.

Le vélo féminin a un réel intérêt et les gens qui ne suivaient pas jusqu’à présent et qui ont enchaîné une “quatrième” semaine de Tour devant la télé, s’en sont vraiment rendu compte. Et cela a contribué à l’engouement autour de l’événement. Clairement, tout le peloton et tous les staffs ont été agréablement surpris par le succès populaire. Autant, le premier jour sur les Champs on pouvait se dire que les gens étaient là aussi pour regarder les garçons qui passaient deux heures après nous. En fait non, dès le lundi, on a vu qu’il y avait beaucoup de monde sur les routes. Après l’arrivée sur la Super Planche, j’ai pu discuter avec Cécile Coupry, une ancienne athlète qui fait partie d’ASO désormais. Même eux ont été surpris par cet impact et cet engouement.

ON A VU QUE LES FEMMES POUVAIENT AVOIR DU RÉPONDANT

La nervosité était importante. On s’y attendait un peu, car quand on regarde les hommes, on se rend bien compte que le Tour de France, c’est une course à part dans leur calendrier. Pour nous, pour une première édition, cela a fait aussi cet effet, avec plus de nervosité. Il y avait le tracé des étapes qui ajoutait à tout ce scénario. Quand on s’est retrouvé le lundi entre Meaux et Provins, avec le vent et les risques de bordures, on a eu deux ou trois chutes assez spectaculaires.

Mais j’ai envie de dire que cela ne tombe pas plus que d’habitude. Mais par l’intensité de la course, de l’enjeu et l’impact médiatique, on a pu se dire que cela paraissait violent. Vu de l’intérieur, c’était assez impressionnant. Mais cela fait partie du cyclisme, même si on n’aime jamais quand cela tombe. Mais c’est comme cela. Cela a été mis en lumière, mais c’est le cyclisme.

Avec les réseaux sociaux, cela s’est un peu enflammé. Il y a eu quelques collègues qui sont montées au front et à juste titre. En disant que cela ne tombait pas plus que chez les hommes, ce qui est vrai. Cela s’est un peu tassé heureusement. On a vu que les femmes pouvaient avoir du répondant. On n’a sans doute pas l’habitude de voir du vélo féminin à grande diffusion.

SANDRA LEVENEZ – IL Y AURA UN AVANT ET UN APRÈS TOUR DE FRANCE

Pour moi, il y aura vraiment un avant et un après le Tour de France. On va retourner sans doute à l’ordinaire sur les prochaines courses. Ce sera une réalité. Mais quand on parlera de vélo féminin, il y aura un intérêt différent de ce qui pouvait être auparavant. Cela va dans le sens que connait le vélo depuis environ cinq ans, avec de belles équipes professionnelles qui se mettent en place et une réelle volonté de tout le monde. Le Tour va servir de vitrine médiatique pour donner envie aux plus jeunes de s’engager dans la discipline. Cela participe au développement du cyclisme féminin.

En 2019, je suis championne du monde de duathlon pour la 2e fois. La course était au mois de mai et il fallait bien finir la saison. Il fallait trouver une motivation et j’avais déjà une licence de vélo dans une équipe en division nationale. Qui pouvait participer aux coupes de France. C’est parti comme ça. On m’a proposé de faire davantage de course avec les filles. J’ai fait la finale de la coupe de France, qui avait lieu à Argelès Gazost. On avait ramené le maillot de leader et cette dimension collective m’avait plu. Cet effort et une nouvelle approche qui était totalement différente, même si je faisais déjà du vélo. C’est comme cela que c’est parti.

J’ai eu la chance de voir la création de l’équipe Arkéa-Samsic. J’ai postulé et c’était un pari pour moi comme pour les dirigeants d’Arkéa. Et on s’est bien trouvé et l’aventure est partie.

FAIRE UNE DERNIÈRE SAISON AVANT D’ARRETER

Ce qui me pousse à continuer c’est le vecteur de performance. Le jour où je sentirai que je suis moins performante, que je ne pourrais pas apporter quelque chose à l’équipe, j’arrêterai. On me parle souvent de l’âge, mais je ne le prends pas de manière négative. Mais c’est un jeu où je n’aime pas trop me faire amener. Dans l’idée, j’aimerais repartir sur une dernière année professionnelle en 2023 pour arrêter le sport de haut-niveau et m’investir dans autre chose. Je me sens capable d’être sur une pente ascendante, mettre des choses en place pour m’améliorer au quotidien. Mais à un moment donné, mon frein sera un frein pour signer un contrat pro en cyclisme. Une dernière année sera pas mal.

Quand tu as goûté au Tour de France, tu as envie d’y retourner. Maintenant, j’étais dans un rôle de coéquipière, j’avoue que je n’ai pas trop eu l’occasion de mettre le nez à la fenêtre. Quand tu subis la course, c’est dur. Si je dois retourner sur le Tour, c’est avec d’autres moyens physiques et ca passe par la nécessité d’être. Sinon dans l’équipe, il se pourrait qu’il y ait plus forte que moi. J’ai pu m’émerveiller de toute l’ambiance du Tour de France, j’ai vu le décor. Maintenant, je veux apporter autre chose à mon équipe. Être plus actrice de la course. C’est comme cela que je conçois le haut niveau.

SANDRA LEVENEZ – STRUCTURER LE PELOTON AVANT D’ALLONGER LE TOUR DE FRANCE

Il y a eu le débat sur la durée du Tour féminin. On peut toujours faire plus, mais l’idée c’est d’y aller par étapes. Le Tour de France fait 8 étapes, on a vu l’intensité dans ces huit étapes. C’est peut-être préférable dans un premier temps de faire 8-10 étapes plutôt que d’aller chercher 15 jours 3 semaines mais avec plus de temps morts.

Il faut y aller par étapes, car il faut savoir que le peloton se structure et entre les grosses équipes et les équipes ayant moins de moyens, il y a quelques différences. Ce qui est normal. Il faut trouver la bonne formule, cela va prendre du temps et pour éviter des écarts trop grands sur trois semaines et que cela rende la course sans suspense. La durée du Tour sera indexée sur le développement des structures. Il faut consolider ce qui a été fait. Tout cela viendra et commen on dit : “Paris ne se fera pas en un jour”.

Quand on voit une fille comme Juliette Labous, 4e au général, super constante sur toute la semaine, cela laisse des espoirs pour le cyclisme français. C’est une fille qu’on voit venir depuis quelques années. Il ne faut pas oublier une fille comme Evita Muzic, même Audrey Cordon-Ragot, qui sont des valeurs sûres. Le cyclisme féminin français se densifie au même titre que le peloton international. Il y a des atouts côté Français.

PROFITER DE L’ENCHAÎNEMENT GIRO/TOUR POUR FAIRE UNE BONNE FIN DE SAISON

D’ici la fin de saison, il me reste une dizaine de jours de course. Pour ce mois d’aôut, je serai sur la Périgord Ladies ce samedi, avant d’aller dimanche sur la Picto Charentaise. Le 25 août je serai sur la Kreiz Breizh Elites avant de d’enchaîner le 27 sur la course World Tour du GP de Plouay. Qui passera à la télé et qui est une course bien ancrée et toujours une belle course. Cette fin de Tour de France ne m’est pas restée dans les jambes. Je veux bénéficier de l’enchaînement Giro/Tour pour faire une bonne fin de saison. On a coutume de dire que quand on boucle un Tour, on gagne de la force et vraiment c’est mon cas. Je sens que j’ai des bonnes jambes et j’espère être capable de faire fructifier cette forme physique sur la 2e partie de saison. Ce serait une belle récompense sur des courses de niveau “inférieur” en cette fin de saison.

SANDRA LEVENEZ

Retrouvez notre interview d’Evita Muzic : ICI

Retrouvez notre interview de Juliette Labous : ICI

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