Championne de France du cross long, au terme d’une véritable démonstration sur le labours de Montauban, Manon Trapp est revenue sur cette performance. Mais aussi sur ses objectifs lors des Europe qui vont avoir lieu du côté de Dublin, sur sa saison estivale et sur son changement de vie. En effet, Manon Trapp a déménagé dans les Alpes et a signé au sein du club d’Aix-les-Bains. Elle raconte également son amour du cross et des labours, tout en n’hésitant pas à se montrer critique des chaussures carbones.
Crédit : Alanis Duc
MANON TRAPP – JE NE M’ATTENDAIS PAS A GAGNER AUSSI LARGEMENT
Je suis vraiment surprise par l’ampleur de ma victoire aux France de cross. Je m’étais préparée à ce que ce soit dur et qu’on soit toutes très proches. Quand j’ai vu le parcours, je me suis vu batailler avec un peloton devant, notamment sur la dernière ligne droite, qui était super longue. Je me suis dit que ce serait dur et que la victoire se jouerait au mental, dans une course très serrée. J’avais vraiment envie de la première place et je m’étais préparée à me dire que, si je ne faisais pas podium, il ne fallait pas être déçue. Oui, je gagne facilement les championnats Auvergne/Rhône-Alpes, mais les championnats de France, c’est totalement différent. J’ai entendu que Margaux Sieracki a battu le record de France Espoirs du 10 kilomètres.
Il y avait beaucoup de concurrence en dehors de ma région. Je m’attendais à une bataille. Oui, les régionaux m’ont donné de la confiance, mais il faut toujours se méfier avant la course. Gagner comme cela aussi largement, me fait énormément plaisir. Il y a quelque chose de symbolique, car j’avais gagné les France de cross en juniors. Et là, avec tout ce qu’il s’est passé, avec les années blanches liées au Covid, retrouver le cross et en plus gagner aussi bien, c’est vraiment super. C’est aussi pour ça que j’étais vraiment contente.
SUR CROSS ON EST SUR LE MEME PIED D’EGALITE, SANS CARBONE
Ce retour aux cross, m’a fait énormément de bien. C’est ce que je préfère. J’ai passé une année à être focalisée sur les chronos, car c’est ce qui compte sur la piste. On ne jure que par cela. J’étais également un peu à la ramasse avec les histoires de chaussure carbone, sur piste. Je n’étais pas dessus. Là, je me dis que sur cross, on court tous sur le même pied d’égalité, car personne ne met de carbone sur les cross. On ne regarde également pas le chrono, on se contente de juste courir et on retrouve cette saveur des cross, avec la boue et tout. Dès que j’ai repris l’entraînement, il y avait cette motivation de la saison de cross. J’ai hésité à faire de la route, mais comme il y avait les cross, je me suis uniquement focalisée dessus.
Tant pis pour la route, même s’il y avait un titre à aller défendre sur 10 kilomètres. J’ai choisi de faire l’impasse, car j’ai toujours eu un gros coup de cœur pour les cross. J’ai bien fait, car on s’est préparé à fond, en faisant plein de séance spé-cross, ce que je n’avais pas forcément fait avant. Cela porte ses fruits et cela fait plaisir. Cet amour des cross s’explique sans doute du fait que j’aime être dans la nature. Quand je cours, c’est aussi pour me retrouver dans mes éléments. Courir sur un terrain plus souple et ne pas faire des éternelles boucles c’est top. Car c’est lassant de faire des tours et des tours. Sur cross, il y a plein de rebondissements. On trouve des terrains différents et il faut être alerte. C’est super stimulant.
MANON TRAPP – MON HISTOIRE PERSONNELLE M’A FAIT GRANDIR
Je ne crois pas que ce soit ma victoire qui m’ait fait passer ce cap. C’est plus les années Covid, avec les saisons blanches qui ont été difficiles. J’ai fait le choix de déménager, d’avoir un nouveau coach et un nouveau club. C’est une décision un peu lourde, car tu ne sais pas ou tu vas et tu es un peu dans l’inconnu. Mon histoire personnelle m’a fait grandir et m’a donné plus de confiance. J’ai appris pas mal de choses et j’ai franchi un cap vis à vis de la maturité par rapport à mon sport.
Je suis allée à Aix de base pour mes études, avec le Master géographie et montagne. Ce master me plaisait vraiment et j’ai commencé à regarder les clubs qui pourraient m’accueillir aux alentours. J’ai vu qu’à Aix il y avait des athlètes comme Claire Palou et Christophe Lemaître et je me suis dit que ce club devait savoir y faire avec les athlètes de haut-niveau. Le feeling est très bien passé et j’ai signé au club. J’ai un super coach et un super groupe avec qui cela marche bien. Je ne pouvais pas espérer mieux. Mon coach est l’entraîneur de demi-fond du club.
Lire aussi : Manon Trapp : “Il faut rendre le 5000 m plus attractif en France”
DIFFICILE DE DIRE CE QUE JE PEUX VISER AUX EUROPE
J’ai du mal a viser quelque chose aux Europe de cross à Dublin. Le podium est sans doute ambitieux, mais je m’en rend pas compte. Il y a une fille comme Nadia Battocletti qui a fait les JO (NDLR : 7e de la finale du 5000 m). Elle devrait arriver première. Mais je ne me rend pas compte du gap qu’il peut y avoir. Je sais juste que j’ai fait 9e chez les juniors, il y a deux ans.
Je voudrais faire mieux que cette place faite. Après ce cross, je verrais ce que je fais en fonction de comment je me sens. Si je continue les compétitions, je basculerai sans doute sur la route. Pour essayer de battre le record de France sur 5 et 10 kilomètres chez les Espoirs. Je peux le faire seulement si je me sens bien et que j’ai envie de faire des compétitions. Sinon je coupe et je reprend pour la prochaine saison de cross.
MANON TRAPP – NE PAS ETRE TROP GOURMANDE CET HIVER
Il ne faut pas être trop gourmand dans l’effort, car les prochains cross sont dans trois mois. C’est seulement au sortir des Europe que je verrai ma forme. Il y a toujours cet objectif cet été de battre mon record sur le 5000 m piste. Il y a pas mal d’échéances internationales qui me motive cet été. Je vais m’engager pour essayer de décrocher des sélections. Battre mon record et trouver une belle course, car, que ce soit aux France ou aux Europe Espoirs cet été, c’était deux courses de championnats, où les conditions ne sont pas bonnes.
Je mène toute la course aux Elites et aux Europe, cela reste aussi une course tactique, où cela accélère au fil de de l’épreuve. On ne vise pas le chrono sur ces courses. Sur une course régulière j’aurais pu faire mieux que ces 15’52. Il ne faut pas oublier que je n’ai fait que trois 5000 m dans ma vie. Je vais gagner de l’expérience sur ces courses, en sachant mieux les gérer. Après, je ne sais pas trop ce que je peux valloir sur piste actuellement, car je suis focalisée sur les labours.
MANON TRAPP
Avec Etienne GOURSAUD