Léonie Cambours a explosé les compteurs la saison passée. La spécialiste des épreuves combinées a pulvérisé son record personnel sur l’heptathlon, réalisant 6192 points, en battant ses records personnels sur chaque épreuve. Un fait rarissime en épreuves combinées. Quatrième performance française de tous les temps en Espoirs et neuvième performeuse française de tous les temps, à 21 ans, la Normande a tout l’avenir devant elle. Pour ce, elle a choisi cette année de se consacrer exclusivement à l’athlétisme. Après avoir fini sa licence en STAPS. Pour aller chercher sa première grande compétition internationale en sénior cet été. Mais aussi pour commencer à préparer son rêve de Paris 2024.
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LÉONIE CAMBOURS – JE N’AI PAS DE REGRETS D’AVOIR TENTÉ MA CHANCE AUX CHAMPIONNATS D’EUROPE
Mes soucis physiques sont désormais derrière moi. Je me suis arrêté pendant six semaines, après les championnats d’Europe (NDLR : Championnat d’Europe Espoirs à Tallinn). Je n’ai vraiment rien fait. Cela m’a permis de lâcher prise nerveusement et avec la blessure, je ne pouvais rien faire. Je suis revenue à l’entraînement fin août. En reprenant les soins nécessaires. A l’heure actuelle, j’ai tout repris de A à Z, toutes les disciplines. Et je n’ai plus aucune douleur. En revanche, je sens que j’ai perdu en souplesse sur l’ischio et également en force. Il y a un déficit sur le côté gauche à cause de cette blessure. On sait ce qu’il va et ce qu’il ne va pas.
Je participe aux championnats d’Europe en étant blessée, avec une blessure qui intervient trois semaines avant la compétition. Malgré tout, je n’ai aucun regret, car je voulais tenter. J’aurais juste aimé aller au bout de la compétition, mais cela ne s’est pas fait. Je pense que j’aurais eu plus de regrets de ne pas avoir tenté d’y participer.
CETTE PERFORMANCE RESTE UNE SURPRISE
Quand je bats mon record à l’heptathlon, je ne me suis pas sentie intouchable. Parce qu’il y a sept épreuves et que tout peut arriver. Un zéro à la longueur ou au javelot et c’est fini. Sur le moment, je ne me rendais pas compte de ce que j’étais en train de faire. J’ai gardé de l’insouciance et je prenais ces deux journées épreuve après épreuve. Avec mon entraîneur Wilfrid Boulineau, on s’était fixé des objectifs non pas de performances mais d’intentions. A chaque début d’épreuve, on se disait qu’il fallait faire ça et ça. Je prenais les choses comme elles venaient et cela a fait un gros total finalement (rires).
Cette performance reste une surprise, car cela faisait deux ans que je n’étais pas sortie sur heptathlon. Forcément en deux ans, je passe de 5300 points à 6200 points, soit près de 900 points de gagnés. Je ne vais pas mentir non plus, je voyais qu’à l’entraînement, j’avais énormément progressé. Si j’additionnais toutes les épreuves, cela allait faire un beau total. Après, je suis quelqu’un qui ne regarde pas les tables de cotation. Donc, avant le 800 m, je ne savais pas du tout où j’en étais. Je savais que cela valait autour des 6000 points, mais pas vers les 6200 points. Avec les sollicitations que j’ai pu avoir après ce record et les nombreux messages de félicitations reçus, j’ai le sentiment de changer de dimension. Ceci dit, j’ai toujours l’impression d’être la même (rires).
LÉONIE CAMBOURS – ME CONSACRER UNIQUEMENT À L’ATHLÉTISME CETTE ANNÉE
Des sollicitations, mais forcément de la visibilité. Franchement, moi je fais ma performance, après si cela n’intéresse pas d’éventuels partenaires, je n’y peux rien non plus. Les épreuves combinées ne sont pas forcément une discipline qui intéresse beaucoup. Peut-être que ma performance n’est pas encore suffisamment forte. J’ai déjà des partenaires, avec la Région Normandie, mais qui m’accompagnait déjà auparavant et qui continue de m’accompagner aujourd’hui. Et c’est aussi le cas pour le département de l’Eure et mon club du SPN Vernon. Mais tout cela était déjà en place avant de faire 6192 points. Ce n’est pas grave, je vais être patiente. Car mon objectif est de devenir professionnelle. Cependant, je remercie également Intersport et l’entreprise Nomank
Je viens de finir ma licence STAPS en juin et cette année j’ai décidé de me sacrer exclusivement à l’athlétisme cette année. C’est un choix qui était déjà dans un coin de ma tête. Je terminais ma licence et je n’avais pas envie tout de suite de faire un Master. On a attendu que la saison passe et on s’est posé pour définir les objectifs de la saison 2022. J’ai dit à mon coach que je voulais encore davantage me consacrer à mon sport. Et pour faire plus, j’avais besoin de temps. Car concilier sport et études n’est pas forcément évident. Je voulais prendre ce temps. Je pars sur une année comme cela et on verra par la suite. On va dire que la performance cet été a conforté un choix déjà présent dans ma tête.
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IL Y A UNE RELÈVE QUI ARRIVE EN FRANCE ET ON PEUT TOUTES SE TIRER VERS LE HAUT
Le bilan 2021 reste malgré tout un peu mitigé. Il y a cette très belle performance, mais je me blesse déjà avant, durant l’hiver, ce qui m’avait obligé à faire l’impasse. Je voulais me concentrer sur la saison estivale et surtout sur ces championnats d’Europe. Cela a marché au début, mais je me suis blessée. Il y a de la frustration et de la déception. Ce sont des championnats uniquement pour ma catégorie Espoirs et j’en attendais beaucoup. Tout mon travail n’a pas pu se concrétiser en championnat, sur le plan international.
Je n’attache pas d’importance à être la meilleure Française. Je sais que cela peut être temporaire, même si je vais essayer de garder le plus longtemps possible ce statut. Ce n’est pas ancré dans le temps et il y a du monde derrière. On est toute une génération qui est en train d’arriver qui est la relève. Solène Ndama, Célia Perron et d’autres du groupe de Montpellier. Il y a un bon niveau et on peut toutes se tirer vers le haut. C’est un peu la relève d’Antoinette Nana Djimou (NDLR : la quadruple championne d’Europe a pris sa retraite cet été). J’ai pu la côtoyer une fois en compétition, justement le jour où je fais mon record. On a passé les disciplines ensemble. Mais on n’a pas eu vraiment l’occasion d’échanger, car on n’a fait que se croiser. On ne s’est jamais vraiment retrouvé ensemble.
LÉONIE CAMBOURS – LE PRINCIPAL AXE DE TRAVAIL SERA LE LANCER DE JAVELOT
Les objectifs pour la saison 2022 sont les championnats d’Europe de Munich (NDLR : du 15 au 21 août). Les minima sont à 6250 points et n’ont jamais aussi élevés. Mais je me dis que je n’ai que 58 points à gagner. Ce qui n’est pas impossible. Cela peut aller vite en heptathlon. Les championnats du monde de Eugene (NDLR : du 15 juillet au 24 juillet) sont dans un coin de ma tête et je ne les oublie pas. Cela marche par ranking, il n’y a pas eu de minima sortis. Je ne suis pas très bien classée au ranking. Il faudrait faire des performances dans les grands meetings. Auparavant, je n’étais pas invitée lors des grands meetings, car je n’avais pas fait ma performance. Pour l’instant je ne suis pas bien classée mais j’espère remédier à cela.
Pour aller chercher une plus grosse performance, la priorité sera de travailler le lancer de javelot. C’est LE point faible. Auparavant il y avait aussi le poids, mais désormais je m’en sors plutôt pas mal. J’ai fait 13,26 m aux championnats d’Europe, mais vu que je ne l’ai pas terminé, mon record officiel reste de 12,88 m, chose que j’ai apprise après les Europe. Mais j’ai quand même fait 13,26 m ! (rires). Le poids est toujours à travailler, mais je ne considère plus cela comme un point faible. Le javelot c’est un point faible, car je ne l’ai pas lancé étant petite. J’ai commencé les combinés en juniors, j’ai forcément des lacunes énormes et je n’arrive pas à trouver le bon timing du javelot. Ce sera la ligne conductrice de cette année.
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PARIS 2024 EN LIGNE DE MIRE
Et je pense forcément à Paris 2024 (rires). C’est un objectif ancré et c’est trois ans de préparation. C’est pour cela qu’on consacre énormément de temps au javelot, car c’est maintenant qu’il faut faire le travail et non dans trois ans. S’il est fait maintenant et quitte à laisser quelques détails de côté ailleurs, cela pourra payer. On travaille pour 2022 mais dans ma tête, il y a 2024 en tête évidemment.
Quand j’étais cadette, j’étais spécialiste du saut en hauteur, mais cela ne m’a pas convenu et je ne m’éclatais pas comme je le voulais en athlétisme. C’est quand j’ai découvert les épreuves combinées que j’ai vu tout cela. Et les épreuves combinées m’ont fait progresser sur la longueur et la hauteur. Lors des France individuels ou Espoirs, j’aime quand même bien venir faire de la hauteur pour embêter les spécialistes. Mais je ne ferais pas une saison complète là-dessus et je resterai sur les combinés.
Je vais sans doute faire ma rentrée cet hiver au X-Athlétics à Aubière, sur un pentathlon. C’est un peu le meeting phare des combinés l’hiver. Toutes les filles se donnent rendez-vous là-bas. Je ne me suis pas fixé d’objectifs de points pour la saison hivernale. Je vais faire épreuve par épreuve, sans se fixer réellement d’objectifs. Mais la bagarre sera belle en France.
LÉONIE CAMBOURS – A LA BASE JE VOULAIS FAIRE DE LA GYM, MAIS COMME JE COURRAIS PARTOUT, ON M’A MISE A L’ATHLETISME
A la base je voulais faire de la gymnastique, sauf que je courais partout, donc mes parents m’ont mise à l’athlétisme. C’est plutôt ce sport qui m’est venu à moi. Il y avait également les cross en primaire. Quand j’ai commencé l’athlétisme, je n’avais pas forcément d’idoles, je regardais à la télé mais je n’étais pas fan de quelqu’un. Après, ceux que j’admire actuellement sont sauteurs en hauteur, comme Barshim ou Lasitskene. Je les suis énormément, mais je ne sais pas si ce sont vraiment des idoles. On va dire que je m’inspire d’eux.
La génération des jeunes athlètes français est intéressante. On se suit un peu tous et toutes. J’ai fait les championnats d’Europe en juniors à Boras en 2019, sur le saut à la longueur. Mais quand tu regardes les Europe Juniors puis les Espoirs deux ans plus tard, on se suit tous. On était trois en longueur en Suède, les trois étaient encore qualifiées à Tallinn. On se voit progresser les uns les autres et cela tire aussi vers le haut.
LÉONIE CAMBOURS
Avec Etienne GOURSAUD