Athlétisme – Diane Marie-Hardy, dans l’ombre de la blessure

Diane Marie-Hardy a vu ses rêves fauchés par une blessure au tendon d’Achille, lors des championnats de France Elite d’athlétisme.
Diane Marie-Hardy raconte l'envers du décor du sportif : la blessure
Diane Marie-Hardy raconte l’envers du décor du sportif : la blessure

Le sport peut-être beau, comme il peut être cruel, Diane Marie-Hardy en est l’exemple. Dans la lumière, les champions qui réussissent et qui voient récompensés des milliers d’heure de travail acharnés. Et d’autres, plus malchanceux, qui ont travaillé tout aussi dur, mais qui voient leur espoirs fauchés par la blessure. On oublie trop souvent que le corps est aussi l’outil de travail de l’athlète. Qu’il doit bichonner, comme le motard entretient sa moto, tout en en exploitant le maximum de son potentiel. Diane Marie-Hardy a vu ses rêves fauchés par une blessure au tendon d’Achille, lors des championnats de France Elite d’athlétisme. Fauchée en plein heptathlon, elle qui ambitionnait les JO en début de saison, aura connu un été en galères. Entre rééducation et double projet, elle nous raconte le long processus de rééducation…

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DIANE MARIE-HARDY – JE SUIS ARRIVEE AUX ELITES PHYSIQUEMENT ET MENTALEMENT KO

Quand je suis arrivée aux championnats de France Elite, j’avais déjà tiré sur mon corps et j’avais cette douleur. On ne peut pas dire que j’étais blessée, mais j’ai fait trois heptathlons en un mois, à chaque fois à 110 %, car c’était de gros meetings. Pour être honnête, cette saison m’a beaucoup minée, car j’ai tout mis en place pour me qualifier aux Jeux et je n’arrive même pas à faire 6000 points. Je fais trois fois 5900. Tout le monde me disait : “c’est bien tu fais trois fois 5900, t’es régulière”. Moi je préfère faire une fois 6350 points (NDLR : les minima pour les JO) et faire une fois 5500 points. Cela m’a frustré énormément. Au final, physiquement j’étais KO et mentalement je n’étais pas mieux, d’avoir tant donné. Je voulais aller chercher mon premier titre de championne de France.

Je ne sais même pas vraiment comment je me blesse. Il y a le 100 m haies, où j’ai failli tomber à la dernière haie. Sur le haut en hauteur je ressens la douleur, mais qui ne m’avais pas empêché de terminer mes hepta auparavant. Je saute, je ressens un peu, mais rien d’insurmontable. Avant les France, mon kiné me dit qu’il n’y a pas de soucis à se faire. On est sportifs de haut niveau et on est habitué à composer avec ces soucis-là. Je ne me suis pas inquiété et j’ai fait ma hauteur. Sans réel soucis particulier. C’est à froid que cela s’est dégradé. Sur le lancer de poids, je n’arrive plus à appuyer sur ma jambe droite. Je me dis que c’est bizarre mais que cela va tenir. Je ne voulais pas me cacher sur cette douleur.

JE VAIS DANS LA TENTE MEDICALE EN PENSANT QU’ON ALLAIT ME POSER UN SIMPLE STRAP

Mais, après le poids, je ne pouvais plus marcher. Cependant, je ne pouvais pas m’arrêter là, sur la contreperformance. Je ne voulais pas qu’on croie que je m’arrête après l’échec au poids. On n’abandonne pas parce qu’on fait une contre-performance. On va au bout, donc je m’échauffe pour le 200 m, mais la douleur était tellement forte que j’avais envie de pleurer. Je ne pouvais pas marcher. Avant la course, je me dis quand même que ca peut tenir. J’ai déjà eu le même problème à l’automne dernier, lors du meeting de la Réunion. La douleur était un peu moins forte certes, mais ça avait tenu. Je cours mon 200 m, le chrono est mauvais mais je gagne. Mais là, je ne pouvais vraiment plus poser le pied.

Je vais dans la tente médicale, mais dans ma tête, je me dis qu’il vont me poser un strap. J’ai vu sur place qu’il y avait de quoi passer des examens et je passe une échographie. Et elle était mauvaise, donc je me suis arrêtée (rires). Le médecin avait peur qu’il y ait des fibres rompues dans mon tendon, car il y avait un peu de sang. Il m’a dit : “Tu t’arrêtes tout de suite, sinon la blessure va s’aggraver et tu risques la rupture totale”. On ne va pas se mentir, j’étais pas super bien lancée dans mon hepta, donc cela valait encore moins le coup de prendre le risque. C’était impossible de faire le saut en longueur le lendemain.

DIANE MARIE-HARDY – J’AI EU ENVIE DE TOUT BALANCER

Je ne m’attendais pas à ce que soit aussi grave, j’y allais vraiment pour un strap. C’est à l’image de ma saison, cela m’a blasé. Trois ans presque à fond, pour m’arrêter là. Mais au moins, je suis allée au bout du bout du bout. Ce qui m’a le plus fait mal, c’est de me dire que j’aurais pu être championne de France avec 5900 points.

Franchement, j’ai eu envie de tout balancer. Ce qui m’a sauvé c’est mon double projet. Imagine, que je me retrouve sans projet et un peu dégoutée, car cette saison est la pire de ma vie. Pas en termes de performances, car je fais trois perfs honorables, on ne peut pas dire que ce soit horrible. Mais d’être si proche de mon record, en mettant tout, cela m’a rendue folle. J’ai trouvé un stage de fin d’études hyper intéressant. Ils sont vraiment cools avec moi, car je leur ai dit : “Il y a 5 % de chances que j’aille aux JO, est-ce que je peux venir en juillet si je n’allais pas au Jo, sinon venir après ?”. Ils m’ont dit ok. Au final, j’ai pu commencer directement ce stage et c’est ce qui m’a sauvé.

Lire aussi ICI : Diane Marie-Hardy décortique pour nous l’heptathlon

D’HABITUDE JE NE DEPASSE PAS DEUX JOURS SANS FAIRE DE SPORT

Je suis restée trois semaines sans pouvoir faire de sport, ce qui ne m’arrive jamais. D’habitude je ne dépasse pas les deux jours (rires) Je n’ai pas pu marcher pendant 4 jours. ). Mon bonheur en coupure athlé, c’est de faire du tennis, de la randonnée, du surf. J’ai besoin de bouger et de faire autre chose. Pour la première fois de ma vie, j’étais bloquée à ne rien pouvoir faire.

Franchement, la rééducation et la résorbation de la blessure va assez vite. Au bout d’une semaine, je pouvais marcher, ce qui était mieux. C’est horrible, car on se dit qu’on va pouvoir profiter, une fois la saison terminée, pour faire autre chose, voir des amis. Mais quand tu ne peux pas marcher, tu ne peux rien faire. Rapidement, j’ai pu faire du vélo et un peu de musculation. J’ai aussi un pote qui m’a aidé dans des recherches, pour essayer de trouver des processus pour aller plus vite dans la guérison. Il m’a donné pleins d’exercices, que j’ai fait pendant une semaine. Et cela s’est avéré très efficace, car j’ai pu rapidement faire pleins de choses en musculation, je ne pouvais pas encore courir, mais tout est allé vite.

DIANE MARIE-HARDY – J’AI ENVIE DE TENTER L’AVENTURE DU RUGBY A 7

Je suis en mode reconquête, mais j’avoue que je ne sais pas encore sur quel sport je vais repartir. Je sors de trois ans d’heptathlon à fond. Est-ce que si je refais trois ans à fond, je ferais mieux ou pas, par rapport à cette année. J’hésite à faire du 400 m haies, mais même en travaillant, ce sera chaud. Sinon, j’ai envie de tenter l’aventure au rugby à 7, qui me dit beaucoup. J’y réfléchis beaucoup et je vais aller faire un test, pour voir. Si je n’ai pas de talent, j’irai faire du 400 m haies (rires). Mais si j’ai du talent, cela peut être un nouveau challenge. Un sport où tu repars de zéro, avec deux ans pour devenir forte, cela peut être très intéressant.

Je me laisse quelques mois, car je n’ai pas la prétention d’entrer dans un collectif médaillé olympique, en claquant des doigts. Physiquement, je pense avoir les qualités, mais il faut voir combien de temps il me faudra, pour savoir jouer avec le ballon et c’est très personnel. Certains vont apprendre hyper vite et d’autres vont galérer. En attendant, j’ai repris un petit peu le travail sur les appuis, je dirais qu’il me faut un mois et demi, avant que je revienne au top. En réalité, physiquement ça va, car je m’envoie de belles séances en musculation, avec une grosse prépa physique. Le soucis est encore sur la course.

JE N’AI PAS TROP REGARDE L’HEPTATHLON AUX JO !

Le doute est pas encore chassé, car c’est une blessure vraiment chiante. Ce n’est pas le ligament ou un muscle, deux choses où on sait exactement ce qu’il faut faire pour soigner. J’ai une bursite au tendon d’Achille et on ne sait pas trop quel traitement faire. Quand j’ai eu la même chose de l’autre côté, je m’étais reposé et cela n’avait rien fait, deux mois après j’avais mal. Du coup j’ai quand même fait l’heptathlon à la Réunion avec la douleur. Cinq jours après je n’avais plus mal et je n’ai plus eu mal. C’est bizarre, car faire l’heptathlon aurait dû aggraver et au final, cela allait mieux après. C’est une blessure bizarre.

Les Jeux Olympiques, je les ai vécu différemment selon les sports. Les sports où j’étais détachée, voire même les autres épreuves d’athlé, je les ai regardé comme une vraie passionnée. J’avoue que l’heptathlon, je ne l’ai pas trop regardé. Ce sont des filles que j’ai vu dans tous les meetings et je n’avait vraiment pas envie de regarder. Ca m’a un peu dégouté de cette épreuve, car j’ai trop souffert pendant trois ans.

DIANE MARIE-HARDY

Avec Etienne GOURSAUD

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