HÉLÉNA CIAK : 197 CM AU SERVICE DU BASKET FRANÇAIS

Alors que l’Équipe de France a entamé sa préparation en vue du Mondial de basket féminin, nous avons rencontré la pivot Héléna Ciak. Elle vous raconte avec ses mots son parcours où elle a longtemps privilégié les parties entres amies au professionnalisme avant d’entamer une brillante carrière qui l’a vu remporter l’Euroligue et intégrer les Bleues. 
Héléna Ciak
(c) Bellenger – FFBB

Héléna Ciak – Basketteuse

#BLMA #Equipe de France #Ancienne Dynamo Koursk, Tango Bourges, Basket Catalan Perpignan, Roche Vendée #Vainqueur de l’Euroligue 2017 #Vainqueur Eurocoupe 2016 # Championne de France 2014, 2015 #Médaille d’argent Championnat d’Europe 2015, 2017

Les athlètes sont souvent imperméables à toute communication avant que la compétition ne soit terminée. La rubrique « Dans la peau » permet à un sportif de partager avec vous ces moments secrets et déterminants qui forgent la réussite de leurs projets.

Alors que l’Équipe de France a entamé sa préparation en vue du Mondial de basket féminin, nous avons rencontré la pivot Héléna Ciak. Elle vous raconte avec ses mots son parcours où elle a longtemps privilégié les parties entres amies au professionnalisme avant d’entamer une brillante carrière qui l’a vu remporter l’Euroligue et intégrer les Bleues.  (Crédit Une : Bellenger – FFBB))

Peut-être que sans mon père, ancien international polonais de basket (Piotr Ciak), je ne me serais jamais tournée vers la balle orange. J’avais commencé par le tennis plus jeune et ce n’est qu’à mes 11 ans que j’ai débuté la pratique du basket.

Il a été également mon premier entraîneur. Mes copines pratiquaient toutes ce sport, ce qui était forcément un plus pour apprécier, et mon père était notre coach, à cet âge-là c’est souvent une fierté.

J’ai toujours été plus grande que la moyenne donc j’ai constamment été au poste d’intérieur. Quand on est jeune, on a des complexes à ce sujet, car on est au-dessus de tout le monde. Parfois, les camarades ne font pas de cadeaux et font beaucoup de réflexions, mais ce sport m’a servi à vaincre certaines pensées négatives liées à ma taille.

Le basket m’a beaucoup aidé durant mon adolescence, car au collège j’étais dans des classes sportives. J’allais en cours du matin jusqu’à midi puis l’après-midi et le soir je m’entraînais. On était une petite bande de basketteuses.

DU BASKET ENTRE AMIES AU PROFESSIONNALISME

Mon parcours est atypique dans le sens où j’ai évolué dans différents championnats nationaux amateurs avant d’accéder au haut-niveau. Je suis arrivée dans le monde professionnel assez tard alors que j’avais eu beaucoup de sollicitations que j’avais toujours refusées parce que je pratiquais le basket uniquement par plaisir et je voulais rester avec mes amies et ma famille. Cela a pu créer quelques tensions, car mon père croyait vraiment en moi.

Maintenant, on en rit, car si je suis arrivée là où je suis, c’est que les choses devaient se passer ainsi et pas autrement.

Mon parcours a été simple, j’ai toujours joué à Orléans ou autour jusqu’en senior. J’ai eu un déclic lorsque j’ai reçu plusieurs sollicitations depuis les Équipes de France jeunes pour entrer à l’INSEP, mais j’ai toujours refusé. À 20 ans, je me suis dit qu’il fallait que j’essaie pour ne pas avoir de regret plus tard. J’ai fait les démarches de moi-même par e-mail à certains clubs de ligue 2 et La Roche-sur-Yon m’a contacté pour faire un essai. J’étais très impressionnée, car je passais de National 2 à la seconde division. Pour moi, c’était un écart immense. J’ai signé mon premier contrat pro chez eux. Après 1 an à la Roche, j’ai décidé d’aller à Perpignan.

GAGNER LE TITRE DES TITRES, UN OBJECTIF ATTEINT

Perpignan a été le club et surtout l’entraîneur, François Gomez, qui m’ont ouvert le plus de portes. C’est déjà lui qui m’avait contacté pour entrer à l’INSEP quelques année plus tôt, et c’est avec lui que j’ai le plus progressé. J’ai senti que j’avais passé un cap. On avait déjà un super groupe et on travaillait vraiment bien à l’entraînement. La première année en ligue 2 a été très intense.

Après n’avoir été que spectatrice de la finale de Ligue 2 quand j’étais sous les couleurs de La Roche-sur-Yon, j’avais en moi une envie folle de remporter ce titre avec mon nouveau club.

Et c’est ce qui s’est passé, avec un titre de MVP à la clé !

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La deuxième année à Perpignan nous sommes passées en ligue féminine de basket (1ère division) et on a réussi à finir sur le podium en saison régulière. Pour un promu, c’est exceptionnel. Ça a été une année de fou encore une fois.

Après ces deux belles années, mon premier choix était de rester avec tous les beaux projets devant moi : jouer une Coupe d’Europe, continuer à progresser sous les ordres de François Gomez et prendre plus de responsabilités au sein de l’équipe. Malheureusement, le club a eu des problèmes financiers et de gérance et toutes les joueuses se sont retrouvées sans club du jour au lendemain.

C’est comme cela que j’ai rejoint Montpellier, un nouveau tremplin dans ma carrière. C’est là-bas où je pense avoir le plus appris et le plus muri. Je suis tombée sur un entraîneur, Valéry Demory qui allait me faire progresser. Je m’étais dit que si je me lançais dans le milieu professionnel, j’aimerais vraiment travailler avec lui, car c’est un grand professionnel. Il a un gros caractère, mais il agit comme un père pour ses joueuses. Grâce à lui, j’ai commencé à me fixer des objectifs à court et à long terme. Je pensais déjà à l’Équipe de France.

Dans ce qui sera ma seule saison au club héraultais, nous remportons le titre de Championne de France dans une année où je n’ai que du positif à retenir.

QUI NE RÊVE PAS DE JOUER POUR BOURGES ?

Pour moi, Bourges, c’est « the club » avec toute son histoire, tout son parcours, toutes ces joueuses qui y sont passées. C’était pour moi un objectif de carrière. Quand une occasion se présente avec cette institution, il faut la saisir. Dès la première saison, nous finissons Championnes de France. Un bel enchaînement pour moi, avec ces deux titres sur deux années.

J’ai progressé que ce soit à Montpellier ou Bourges avec des rôles différents. J’avais un rôle de back up* dans les deux clubs. C’était des challenges pour moi d’arriver dans des formations renommées parce que je viens de loin. Je n’avais pas fait de formation. Je venais de La Roche-sur-Yon en ligue 2. J’étais une nouvelle. Mon objectif était de tout donner chaque année pour avoir un rôle de titulaire au fur et à mesure. C’est ce qui s’est passé avec le temps. J’ai également apprécié d’apprendre aux côtés de grandes joueuses comme Céline Dumerc.

*remplaçante

GAGNER L’EUROLIGUE, C’EST LE GRAAL !

Au bout de deux années à Bourges, j’ai choisi d’aller en Russie au Dynamo Koursk.

Ils me connaissaient suite à nos rencontres en Euroligue lors de ma première année chez les Tango, et ils m’avaient d’ailleurs proposé un contrat que j’avais alors refusé. Je voulais vraiment vivre mon aventure avec Bourges avant de partir à l’étranger. On peut dire que je réussis bien mes arrivées dans les clubs, car dès la première saison nous gagnons l’Euroligue. C’est le Graal pour une joueuse de club, je n’aurais jamais pensé la gagner.

Il y a eu des hauts et des bas en Russie. J’étais éloignée de ma famille, j’étais la seule française. J’ai dû m’adapter au pays. Par contre sportivement, ça a été une super expérience. Notamment pour apprendre aux côtés de grandes joueuses américaines et espagnoles et d’un entraîneur comme Lucas Mondello*. Sur le plan plus personnel, j’ai pu découvrir une culture et des coutumes différentes, mais aussi une météo particulière.

*Actuellement coach de la sélection espagnole féminine

À la fin de ma deuxième année, je décide de rentrer en France parce que cette deuxième saison a été un peu compliquée sur le plan humain et sportif. Sans résultats ni véritable osmose dans le groupe, c’était compliqué. Le fait de se retrouver entre joueuses, en dehors des moments basket, est important pour moi et ça m’a beaucoup manqué l’année dernière.

J’avais également le mal du pays. La Russie, c’est particulier.

LA FINALE D'EUROLIGUE REMPORTÉE PAR HÉLÉNA EN 2017

RETOURNER À MONTPELLIER, UN CHOIX NATUREL

J’ai eu ce projet de retourner à Montpellier qui s’est présenté. J’étais au courant assez rapidement de leur intérêt et j’ai eu le temps de bien réfléchir afin de faire le bon choix. J’avais besoin de me réoxygéner parce que j’avais un peu perdu le gout du jeu là-bas malheureusement.

Mais je n’ai pas envie de me dire que je suis en pré retraite et que je me pose. On a quand même de gros objectifs. J’avais ce besoin de retrouver un vrai rôle dans une équipe.

Je reste ambitieuse, et si un jour un club étranger se présente je ne me fermerais pas de porte. Peut-être pas en Russie, mais j’ai envie de découvrir de nouvelles choses. Je ne suis pas en mode restée posée à attendre la fin de ma carrière.

PORTER LE MAILLOT DE L’ÉQUIPE DE FRANCE, UN IMMENSE SENTIMENT DE FIERTÉ

À côté de cette riche carrière en club, c’est l’Équipe de France qui me porte au quotidien. Ma première présélection m’avait impressionnée dès 2013, alors que je n’avais que 2 ans de seconde division comme expérience. Ne pas être dans la liste finale pour les Championnats d’Europe n’était pas grave, mais j’avais déjà en tête la prochaine compétition.

Valérie Garnier a alors pris les rênes de l’équipe en 2014 et m’a sélectionné pour les Championnats du Monde. À mon poste, nous étions assez nombreuses entre Isabelle Yacoubou et Sandrine Gruda et mon objectif premier était simplement d’intégrer vraiment l’équipe. J’étais en mode apprentissage et là pour engranger un maximum d’expérience.

L’année suivante, nous finissons vice-championnes d’Europe contre la Serbie. Je ne saurais pas dire ce qu’il nous a manqué pour obtenir la médaille d’or, car rebelote en 2017 avec une nouvelle seconde place. Cette finale contre l’Espagne pour le titre européen a été catastrophique, on s’est laissé marcher dessus. Elles ont pris la confiance dès le début et l’Espagne a sorti le match de la compétition. Malheureusement, c’était en finale et contre nous. Je ne dirais pas que c’était une défaite humiliante, mais on a vraiment pris un gros coup derrière la tête. C’était la manière dont elles ont gagné qui a été le plus dure à digérer. Je pense que c’est là que nous avons eu un déclic et qu’il ne faut plus revivre ça. Quand tu es joueuse, tu as qu’une seule envie c’est de rebondir. On a mis du temps avant de s’en remettre et quelques mois avant d’en reparler avec l’entraîneur et de passer à autre chose.

C’est la médaille d’or qui nous intéresse et à chaque fois, nous échouons de si peu. Ces défaites sont certainement dues à des détails, nous étions peut-être trop tendues, fatiguées… Ce sont des choses qu’il faut qu’on apprenne à gérer parce que ce n’est pas la première fois. C’est quelque chose qu’on essaie de gérer aujourd’hui pour ne pas que ça se reproduise.

Entre ces deux Euro, j’ai connu ma première olympiade. En demi-teinte, car mon temps de jeu était très faible et j’en étais forcément frustrée. Mais c’était un passage obligé, car j’avais Isabelle (Yacoubou) devant moi. Je ne m’attendais pas à jouer 20 minutes non plus.

C’était à l’image de mes débuts en Équipe de France. Je veux toujours jouer et quand tu n’en as pas l’occasion tu es forcément frustré. Ça m’a forgé, c’est ce que je retiens. Maintenant, je suis prête à tout donner que ce soit sur 1, 5 ou 20 minutes. On avait cet objectif de se qualifier pour les jeux et à partir de là, j’ai tout oublié.

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À chaque fois que je porte le maillot de l’équipe de France, j’ai un sentiment immense de fierté. Chaque été, j’ai toujours hâte de retrouver tout le monde. J’ai envie de le porter le plus longtemps possible. C’est également une réussite de tout le travail que j’ai fourni jusque-là.

Je pense que j’apporte mon envergure à cette équipe. Je suis la plus grande par rapport à Sandrine et Isa. Ma taille peut vraiment être une qualité supplémentaire sous le cercle. C’est sans doute mon côté bonne vivante qui est important pour le groupe, notamment auprès des jeunes que je motive souvent.

OBJECTIF DEMI-FINALE POUR CES CHAMPIONNATS DU MONDE

Pour le moment, la préparation pour les championnats du monde se passe très bien. Il y a un super groupe rajeuni, nous devons donc gagner en automatismes, mais l’entente est très bonne. Pour les premiers entraînements, je trouve que physiquement on est vraiment dans de bonnes conditions. Le jeu se met en place petit à petit.

On profite d’ailleurs d’un super cadre pour notre stage en Ariège où l’on mélange basket et activités extérieures ce qui aide à la cohésion entre joueuses. Je pense que c’est un désir des coaches de mettre l’accent sur ça.

Pour ce premier stage, les coaches nous ont laissé faire pour gérer notre temps libre et nos activités en dehors, mais Valérie était très exigeante en retour quand ça touchait au basket. Sur le terrain, elle demande des choses précises.

On a des systèmes de jeu fait pour une finalité. C’est ce que les filles (coaches) mettent en place chaque jour. Valérie vient de temps en temps corriger tout ça. C’est un travail très précis qu’elle fait. Nous en sommes qu’au début de la préparation, il nous reste 1 mois avant le début de la compétition.

Pour ces championnats du monde, on aimerait être dans le dernier carré, voire sur le podium. On a des objectifs à court terme, c’est-à-dire finir première de la poule pour avoir un quart de finale vraiment à notre portée. Je trouve qu’on a un groupe relevé avec des équipes que l’on connait plus ou moins par cœur sauf la Corée du Sud. On a le Canada et la Grèce que l’on a très souvent jouées. Ce sont vraiment des équipes de qualités et ça ne va pas être facile. Ensuite, nous sommes 3èmes au ranking mondial, l’objectif est d’honorer cette place et pourquoi ne pas passer devant l’Espagne.

À titre personnel, j’aimerais être dans la liste des 12. Ensuite, j’espère apporter un maximum à l’équipe tant en défense qu’en attaque. Je vais également essayer de donner des ondes positives à tout le monde parce que le niveau mondial est très intense. Il y aura surement des filles un peu dans le dur, il faut essayer de remotiver les troupes et sur le terrain apporter un maximum suivant ce que Valérie me demandera de faire.

Collectivement, c’est un groupe assez nouveau. Il faut essayer de trouver cette alchimie entre nous, bien jouer ensemble, comprendre pourquoi on fait un tel système, etc. Ce sont ces petites choses qu’on essaie de faire à l’entraînement dans cette préparation.

Individuellement, je travaille au quotidien mon attaque et mon jeu dos au cercle, parce qu’un de mes rôles principaux sera cet axe offensif et ma défense sous le panier.

Je m’entends vraiment bien avec tout le monde. Je me sens un peu comme la grande sœur. Il m’est arrivé d’aller voir des nouvelles et de leur demander comment ça allait et que si elles avaient besoin de parler, elles pouvaient le faire avec moi. J’essaie de mettre à l’aise tout le monde. Certes, j’ai des affinités avec Lisa Berkani que je connais depuis Bourges. Je l’appelle ma petite. Il y a également Alexia Chartereau, Marine Johannes. C’est compliqué de citer tout le monde. Il y a les joueuses que je connais depuis quelques années, mais je m’entends très bien avec les nouvelles.

On a des petits clowns dans l’équipe. On ne dirait pas à première vue, mais elles cachent bien leur jeu. Il m’est arrivé de faire des petits shows devant tout le monde, par exemple de chanter pour rigoler. La bonne ambiance est là et chacune apporte sa personnalité. Alexia est la présentatrice météo.

Il y a beaucoup de filles qui font les timides, mais elles cachent bien leur jeu dans le bon sens. On se marre bien. En salle kiné, tous les soirs, c’est le petit rdv où on se retrouve pour se raconter des blagues. Le staff n’est pas mal non plus.

Je pense que c’est avec ce genre d’ambiance, cet état d’esprit et notre travail sur la cohésion d’équipe qu’on pourra aller chercher cette médaille d’or qui nous fuit jusqu’à présent.

HÉLÉNA

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