ÉMILIEN JACQUELIN – MA VOLONTÉ D’ATTEINDRE LES SOMMETS DU BIATHLON

Alors que les Championnats de France battent leur plein, Émilien Jacquelin, l’un des espoirs du biathlon français s’est confié sur cette année déclic où il a pu intégrer l’Équipe de France. Un témoignage entre parcours, différences entre IBU Cup et Coupe du Monde et objectifs pour l’avenir.
Émilien Jacquelin
Émilien Jacquelin, champion du monde de la poursuite en 2020, a répondu à nos questions.
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Les athlètes sont souvent imperméables à toute communication avant que la compétition ne soit terminée. La rubrique « Dans la peau » permet à un sportif de partager avec vous ces moments secrets et déterminants qui forgent la réussite de leurs projets.

Alors que les Championnats de France battent leur plein, Émilien Jacquelin, l’un des espoirs du biathlon français s’est confié sur cette année déclic où il a pu intégrer l’Équipe de France. Un témoignage entre parcours, différences entre IBU Cup et Coupe du Monde mais aussi ses objectifs pour l’avenir.(Crédit photo : IBU)

Comme beaucoup de biathlètes, j’ai d’abord pratiqué le ski de fond dès le plus jeune âge. C’était assez commun d’en faire chez moi à Villard-de-Lans dans le Vercors. C’est à 15 ans que j’ai dû faire un choix suite à mon titre de Champion de France cadet en ski de fond et seulement une 8ème place en biathlon. C’est un peu contradictoire, mais c’est vraiment le fait de ne pas être un bon tireur qui m’a donné envie de poursuivre dans cette discipline.

Je voulais vraiment me prouver à moi-même que je pouvais performer sur le pas de tir. Ce double côté tir et ski est vraiment ce qui m’a fait pencher pour le biathlon, car ça cassait cette monotonie qui existait en ski de fond en ajoutant plus de variétés sur les courses. De plus, c’est une belle école de l’humilité, car si tu es premier un jour, tu peux rapidement te trouver dans les derniers à cause d’une mauvaise performance sur le tir. Ce côté course à rebondissement est particulièrement excitant en tant que sportif.

C’est dès l’adolescence que j’ai pensé à faire du biathlon à haut-niveau et à devenir professionnel. Bien évidemment il y a eu de nombreuses étapes à franchir : l’Équipe de France junior, performer aux Championnats du Monde Jeunes, intégrer le circuit IBU Cup et enfin devenir membre de l’Équipe de France élite pour participer à la Coupe du Monde et aux Jeux Olympiques. Je ne vais pas dire que j’ai mis du temps, mais j’ai fait les choses dans l’ordre sans griller aucune étape.

LA COUPE DU MONDE : UN PALIER BASÉ SUR LA RÉGULARITÉ

J’ai commencé à croire en moi dès l’été 2017, et je sentais une certaine forme de déclic.

J’ai vraiment décidé de tout mettre en place pour franchir ce palier, quand tu y crois et que tu y mets l’investissement nécessaire, tout est réalisable. Le déclic n’était pas physique mais seulement mental. Je suis vraiment content d’avoir réussi à passer ce cap et d’être un membre à part entière cette année de l’Équipe de France de biathlon. La première victoire en IBU Cup m’a ouvert les portes d’un de mes rêves d’enfant, celui de courir en Coupe du Monde. En un week-end j’avais réussi mes objectifs principaux de l’année, c’était beaucoup de fierté et de joie, mais il ne fallait surtout pas s’arrêter a ça.

La victoire d'Émilien en IBU Cup

La principale différence entre la catégorie junior et la catégorie reine reste l’homogénéité. Chez les jeunes, si tu es très performant sur les skis tu pourras toujours rattraper des tirs moyens et finir dans le top 10 de chaque course. Au niveau supérieur il faut être plus complet et régulier, si tu te rates sur l’aspect tir ou ski, c’est fini pour toi. En plus de ça le circuit junior est assez léger avec deux objectifs principaux (Les Championnats d’Europe et les Championnats du Monde) et très peu de courses autour de ces événements. En senior on enchaîne les épreuves et il faut être en forme physiquement de fin novembre à mars.

Pour ma première saison en Coupe du Monde, j’ai réussi à tenir, mais c’est clairement l’aspect le plus difficile à gérer et ça commence à se ressentir sur les dernières courses. Beaucoup de personnes imaginent que nous sommes en repos après la saison, mais en fait nous nous reposons seulement en avril afin de reprendre de plus belle l’entraînement début mai. Au début nous allons effectuer un travail d’aérobie et de musculation afin de prendre de la puissance. La charge de travail est maximale durant l’été afin de compenser le manque d’entraînement pendant la saison hivernale où nous allons forcément privilégier la récupération. Pendant la Coupe du monde on passe tellement de temps à voyager et à participer aux nombreuses courses que nous n’avons pas le temps pour du foncier. C’est durant l’été qu’on se construit afin de tenir la distance sur la longue saison hivernale.

Notre quotidien pendant la Coupe du Monde est différent, et comme je vous le disais c’est la récupération que nous devons privilégier. Ainsi après chaque course nous allons continuer de skier une vingtaine de minutes à baisse intensité, suivi d’un massage avec nos kinés et on va finir sur une session vélo pendant 30min afin de faire tourner les jambes et éliminer les toxines. On poursuit cette phase de récupération le lendemain des courses toujours à faible intensité afin de faire tourner le système cardio-vasculaire. C’est de cette façon que notre corps récupère le mieux et non pas avec un repos total.

L’autre difficulté pour de nombreux biathlètes provient aussi des voyages loin de nos proches. Pour ma part ce n’est pas un souci, tous ces sacrifices que je fais durant l’été à l’entraînement sont pour cette saison de compétition. C’était ma première année donc forcément c’était peut-être un peu plus facile pour moi, mais je dois faire attention à ce paramètre.

INTÉGRER LE TOP 30 POUR LA SAISON 2018/2019

Après une bonne première saison et ma première participation à une olympiade, j’aimerais dès l’année prochaine intégrer le top 30 du classement général et pourquoi pas aller chercher un premier podium lors d’une course.

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Pourquoi pas sur une Mass Start dans un format où nous sommes tous ensemble avec des tirs en confrontation. J’apprécie particulièrement cette émulation avec les concurrents de toutes les nations. Bien évidemment je n’oublie pas les relais : j’ai toujours envie de bien faire pour mes potes et cet état d’esprit m’a souvent aidé à performer sur ce type de course. Le relais des JO a été un moment très fort, pour moi, il n’y a pas plus important comme course que le relais olympique. C’était beaucoup de pression, d’envie, de joie et de craintes. De nombreuses émotions différentes en si peu de temps. Malgré le fait qu’on finisse 5ème, c’était un moment inoubliable de ma carrière.

C’est à moi de progresser pour atteindre cette fameuse régularité. Si la marche est haute entre l’IBU Cup et la Coupe du Monde, le dernier palier entre le haut-niveau et les meilleurs mondiaux est encore plus compliqué. Tout est une histoire de détails.

Au-delà de ma situation personnelle, je pense que le futur de l’Équipe de France va être positif même si Martin cédera sa place dans quelques années. Je ne sais pas si l’un de nous sera vraiment capable de prendre sa relève, mais on a pu voir ces dernières semaines que le biathlon français masculin répondait présent avec les performances de Simon Desthieux, Quentin Fillon-Maillet ou Antonin Guigonnat. Des juniors ont montré de belles choses aux Championnats du Monde comme Martin Perrillat-Bottonet ou Myrtulle Bègue. Si je concède à certains que le fonctionnement du biathlon français est élitiste, cela nous permet de dégager de gros potentiels et d’avoir toujours des français aux avant-postes.

De mon côté, je prends petit à petit suffisamment conscience que je peux moi aussi réaliser de belles performances, c’était clairement mon défaut jusqu’à présent. Après un déclic cette année, j’ai déjà hâte d’attaquer la phase d’entraînement pour la saison prochaine afin de combler certaines de mes lacunes.

ÉMILIEN

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