Italie-Allemagne 1970 : Le match du siècle ! Un combat de légende entre deux équipes qui vont aller jusqu’au bout d’elles-mêmes. Nous sommes le 17 juin 1970, au Stadio Azteca de Mexico, dans une chaleur étouffante. Devant quelques 102 000 spectateurs, qui ne savent pas encore qu’ils vont assister à un partie immense. Demi-finale de coupe du monde, pour le précieux ticket. Pour rejoindre le Brésil de Pelé, qui a assuré l’essentiel face à l’Uruguay (3-1), après avoir été bousculé en première période. Italie-Allemagne, ce n’est pas encore ce classique de coupe du monde, comme il le deviendra plus tard. En grande partie grâce à ce match au scénario de dingue. Les deux équipes vont livrer un match total ! Une prolongation de fou-furieux. Le match du siècle. Un aller simple pour l’irréel.
Un temps réglementaire plutôt moyen en terme de qualité de jeu
Aussi incroyable que cela puisse paraître, ce match est plutôt moyen. Oui, le match du siècle débute terriblement classiquement. Roberto Boninsega ouvre le score très tôt, suite à une très belle combinaison avec Luigi Riva, le maître à jouer italien. L’Italie, globalement maîtrisée cette première mi-temps, face à des Allemands qui semblent émoussés. Les coéquipiers de Franz Beckenbauer ont déjà livré un sacré combat en quart de finale contre les champions du monde en titre. Menés 2-0 à 30 minutes du terme, les Allemands vont renverser la nation de Sa Majesté 3-2 après prolongations. Mais petit à petit, les Allemands reviennent dans le match et se montrent de plus en plus menaçants.
La deuxième mi-temps est désormais dominée par les hommes d’Helmut Schon, sous une chaleur toujours aussi écrasante. La menace se précise. Mais, en marge des péripéties, le rythme de jeu n’est pas au rendez-vous. Un match qui n’est pas digne d’une demi-finale de coupe du monde. Une édition 70 totalement fantastique en terme de qualité de jeu, avec certaines nations qui ont émerveillé le monde entier.
Italie-Allemagne 1970 : Schnellinger comme un mort de faim pour son unique but en sélection nationale
Le Brésil de Pelé, Jairzinho ou encore Rivelino. Qui avait éliminé en quart de finale le magnifique Pérou de Téofilo Cubillas (4-2). D’une très belle équipe d’Angleterre, qui aura sans doute péché par orgueil (isn’t it Sir Bobby Robson ?) face aux Allemands. Les Allemands, justement, continuent de mettre la pression sur le but Italien. Mais les Italiens, inventeurs du fameux catenaccio, tiennent ce court mais précieux 1-0. Mais avec l’Allemagne ce n’est jamais fini, huit ans après, les Bleus pourront malheureusement témoigner. Karl-Heinz Schnellinger, 31 ans inscrit un fut aussi surprenant que fantastique. A la réception d’un centre, il se jette comme un mort de faim, pour devancer la défense italienne et égaliser d’un magnifique plat du pied. Enrico Albertosi ne peut rien faire.
C’est le premier et unique but de Schnellinger en sélection nationale. On est à la 90e minute d’une demi-finale de coupe du monde. Peut-on imaginer meilleur moment pour ouvrir son compteur avec une sélection ? Clairement seul Lilian Thuram pourra venir débattre avec son voisin d’Outre-Rhin. Das Kalitat ! Fin du temps réglementaire d’un match relativement standard, mais somme toute classique. Qui va basculer dans la franche irrationalité ! Cet Italie – Allemagne va basculer dans la légende !
Le Kaiser va jouer avec une clavicule fracturée
Une irrationalité incarnée par le Kaiser Franz Beckenbauer ! A 10 minutes du terme de cette prolongation, Franz Beckenbauer effectue un magnifique rush et est balancé à l’entrée de la surface, alors qu’il se dirigeait vers le but. Le Kaiser se relève et semble se plaindre de l’épaule. Sans grandes conséquences peut-on penser dans un premier temps. Mais il se plaint et pour cause, son épaule est démise, clavicule fracturée comme un cycliste sur mauvaise chute. Or, à cette époque, les équipes n’ont le droit qu’à deux changements et les Allemands les ont déjà effectué. Le capitaine du Bayern et de la Mannschaft va devoir jouer.
Coute que coute. L’image va rentrer dans la légende ! Celle du Kaiser revenant sur le terrain, atèle à l’épaule, refusant d’agiter le drapeau blanc, refusant de laisser les siens à 10. Le Kaiser refusant de capituler. Seule une coupe du monde, l’amour de la nation et l’enjeu majeur d’une finale, quatre ans après l’immense frustration contre les Anglais (4-2), avec ce but qui n’est sans doute jamais entré. Accrochez vos ceintures, il ne faut pas être sensible dans cette prolongation d’Italie-Allemagne 1970.
Une prolongation complètement maboul dans cet Italie-Allemagne 1970
Les deux équipes sont rôties, carbonisées par la chaleur étouffante qui règne à Mexico. Autre point, qui n’a rien d’un détail, nous sommes à 2251 m d’altitude. Imaginez un combat acharné, dans la fournaise, 100m plus haut qu’un col mythique comme celui du Tourmalet. Au-delà de 2000m, l’oxygène se fait plus rare et cela va avoir encore plus de conséquences sur des organismes déjà bien marqués. Oubliez les fondamentaux, oubliez discipline tactique, catenaccio. C’est le fighting spirit et une sorte de football total, quatre ans avant que la merveilleuse équipe des Pays-Bas ne débarque sur la scène internationale (et douché par les Allemands).
Car auparavant et avant cette image de légende, le match s’était emballé, comme on le disait, exit les notions défensives, la logique ne compte plus. Muller donne l’avantage aux siens, d’un but comme il sait si bien les faire, à la réception du ballon, en renard dans les 6 mètres (2-1, 94e). Mais l’Italie réplique et égalise quatre minutes plus tard par Tarcisio Burgnich. Avant de reprendre l’avantage juste avant la mi-temps, par le merveilleux Luigi Riva. Le génial italien, peut-être le plus grand artiste transalpin de tous les temps (désolé Andréa Pirlo) signe une inspiration géniale (2-3, 104e). En dix minutes, trois buts, pour écrire le scénario d’un match qui a basculé dans la douce folie.
L’Italie qualifié mais qui y a laissé bien trop de plumes
Beckenbauer blessé, Beckenbauer balancé, mais Beckenbauer toujours debout. Gerd Muller s’offre un doublé, une nouvelle fois en renard. L’image de ce ballon rentrant lentement, mais inexorablement dans le but, traduit l’intensité du match. 3-3, 110e. Alors que la réalisation s’attarde sur cette égalisation, l’Italie joue vite. Facchetti décale Gianni Rivera, qui ajuste le grand Sepp Maier, qui ne peut rien faire (3-4, 111e). Le match a définitivement basculé. Facchetti l’Intériste qui sert merveilleusement Rivera le rival du Milan AC. Une rivalité mise de côté, alors que l’Inter survole le championnat et même l’Europe. Mais la Squadra et l’amour du maillot, il faut le reconnaître, a très souvent su passer au-dessus de toute rivalité locale. La grande force de cette Italie au travers des années.
Qui va se qualifier en finale, car l’Allemagne ne se relèvera pas ! L’Italie défiera le Brésil et s’accrochera vaillamment pendant une mi-temps. Avant de s’écrouler (4-1) face aux hommes de Pelé, qui s’offrent sa 3e coupe du monde et sacre le “Joga Bonito”. Le beau jeu mais immense paradoxe. Car cette Italie-là est sans doute la plus fantastique de l’après guerre, avec des joueurs d’une classe folle comme Riva et Rivera. Mais cette Italie-là ne sera jamais championne du monde. Contrairement à la génération Paolo Rossi et Andrea Pirlo. Sans doute moins brillante mais bien plus pragmatique et létale ! La génération 1970 aura laissé une trace indélébile dans le football. Il y a eu un avant et un après Italie-Allemagne 1970. La plaque commémorative sur le stade Asteca est encore là en hommage.
Etienne GOURSAUD
L’excellente vidéo de Wiloo : ICI
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