Les athlètes sont souvent imperméables à toute communication avant que la compétition ne soit terminée. La rubrique « Dans la peau » permet à un sportif de partager avec vous ces moments secrets et déterminants qui forgent la réussite de leurs projets.
Qui n’a pas passé une soirée à se déhancher sur les musiques de Just Dance ? Dina, elle, est allée plus loin que les joueurs occasionnels en devenant triple championne de France et vice-championne du Monde du meilleur jeu de danse sur console. Elle nous explique ce qui l’a poussé à mener de front une carrière de joueuse et d’influenceuse digitale. (Crédit photo Une : ESWC )
Si je n’avais pas vu un post Facebook annonçant l’organisation d’une Coupe de Monde de Just Dance, je ne serais certainement pas là pour vous parler de mon histoire. Mais commençons par le début.
Ma passion pour les jeux vidéo est née lorsque j’avais 8 ans, quand je pouvais passer des heures sur notre Nintendo NES avec mon frère à finir des jeux orientés plateforme ou par la suite au travers de jeux d’aventures sur PS2 comme Final Fantasy.
Je n’ai découvert Just Dance que beaucoup plus tard, pour la simple et bonne raison qu’à l’époque ça n’existait pas*. Je me souviens du premier contact que j’ai eu avec le jeu sur la Wii : c’était une après-midi en famille et j’étais avec mes petites cousines qui venaient d’avoir le tout premier Just Dance. On pouvait jouer et danser en même temps, c’était absolument génial pour moi. J’aime beaucoup la danse. Il m’était arrivé de prendre des cours durant mon adolescence. Pour moi, c’était une révolution de danser sur un jeu vidéo.
* la première édition est sortie en 2009
Quelques jours plus tard, je me suis procuré le jeu et j’ai commencé à y jouer régulièrement. Et entre 2010 et 2014, à chacun de mes anniversaires on m’offrait le jeu. C’était devenu une sorte de rituel chaque année.
PASSER DE MON SALON À LA SCÈNE DE LA PARIS GAMES WEEK
La compétition m’est venue bien après. À l’été 2014, j’ai vu une annonce sur Facebook pour la première Coupe du Monde de Just Dance. S’il y avait bien un seul jeu où j’étais meilleure que les autres, c’était celui-là.
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Je me suis dit que j’allais tenter ma chance. J’ai débarqué un peu par hasard et à ce moment-là ils annonçaient alors les qualifications en ligne sur quelques dates. Cette année-là, je ne me suis pas entraînée spécialement beaucoup, seulement entre les différentes étapes de qualification, mais j’ai quand même réussi à intégrer le Top 10 français. À la suite de 2 désistements, j’ai pu intégrer la compétition principale qui avait lieu lors de la Paris Games Week 2014*.
*salon annuel du jeu vidéo
C’est une succession de circonstances heureuses qui a changé mon destin ! Lors de mes premières compétitions, j’étais époustouflée dans le sens où ça dépassait mes rêves les plus fous. Pour ma première PGW, j’ai enchaîné finale nationale et internationale avec le titre de Championne de France et la place de 3ème meilleure joueuse du monde à la clé. Être dans les meilleurs français était déjà une grande satisfaction, mais là c’était inespéré. L’événement était organisé par l’ESWC qui est une énorme structure eSport avec des équipements impressionnants, j’étais tellement heureuse de monter sur scène pour la première fois et vous n’imaginez pas ma joie le soir où j’ai eu ma médaille autour du cou.
Je n’en avais jamais rêvé, car je ne savais pas que ça existait.
Il y a une grosse différence lorsque tu joues dans ton salon avec tes amis, et le moment où tu te retrouves à être Championne de France devant des spectateurs. Mais à la différence des qualifications en ligne, je m’étais préparée. J’avais pris cet événement tellement au sérieux que j’avais posé des après-midis de congé à mon travail pour m’entraîner intensivement.
Une anecdote rigolote est qu’au moment de ma préparation, je n’avais pas la console qui allait être utilisé pour la compétition, la Xbox One et son système Kinect*. Je m’étais qualifié en ligne sur Wii U, mais les sensations sont clairement différentes entre les deux plateformes, je ne pouvais pas arriver “comme ça” à la PGW. Comme je n’avais pas les moyens de m’acheter une Xbox One pour l’occasion, j’ai utilisé les conseils d’une amie : acheter la console et la retourner avant le délai légal de 14 jours. Je me suis entraînée plusieurs heures par jour et ça a porté ses fruits.
*Caméra développée par Microsoft pour la Xbox One
Depuis ce premier tournoi, je suis toujours autant accro à cette adrénaline lorsque je monte sur scène, de faire un spectacle pour le public et de savoir qu’être en compétition leur apporte quelque part de la joie. La scène compétitive de Just Dance a changé ma vie. J’aime la sensation d’être sur scène et de performer. J’ai rencontré des gens du monde entier que je n’aurais sans doute jamais croisés si je n’avais pas participé à ce premier concours. C’est une richesse énorme. J’ai d’ailleurs toujours aujourd’hui beaucoup de plaisirs à échanger avec ma communauté et avec les autres joueurs du jeu, qu’ils aient un bon niveau ou non. Même si ce n’est pas comparable avec des titres comme League of Legends, il y a quand même plusieurs milliers de personnes sur Just Dance.
Je retourne à la compétition tous les ans, car mon rêve, c’est de devenir Championne du Monde. Quand tu gagnes, tu as un sentiment hors du commun. C’est pour toutes ces émotions-là que j’aime la compétition.
DEVENIR CHAMPIONNE DU MONDE PASSERA PAR UN ENTRAÎNEMENT INTENSIF
Pour devenir une des meilleures joueuses de Just Dance, le maître mot selon moi est l’entraînement. Quand on dit entraînement, on dit dévouement parce que parfois ça représente des sacrifices de passer des heures et des heures à consacrer à son jeu. Il y a des jours où j’aimerais peut-être faire autre chose, mais quand tu es en période de compétition, tu dois faire un choix. Il faut ce dévouement et cette intention d’être un champion, sinon tu n’y arriveras pas.
En compétition, le plus souvent la console utilisée est une Xbox One. Qui dit Xbox One dit Kinect et donc la manette, c’est ton corps ! Il faut entraîner ton corps, s’entraîner sur les chansons, les apprendre par cœur, mais ce n’est que 20 % du travail. Il faut apprendre à scorer sur les chansons. Le jeu nous note après chaque mouvement, il faut réussir à obtenir la note maximale sur tous les mouvements. C’est de la dance aussi quelque part donc, c’est du physique, il faut de la souplesse. Il faut également apprendre à avoir une certaine régularité dans nos mouvements et à gérer sa fatigue.
DINA CRÉE DE NOMBREUSES VIDÉOS CRÉATIVES SUR SA CHAÎNE YOUTUBE
Mais le mental va aussi avoir son importance, car la plupart du temps tout ne se passe pas comme prévu avec des échecs à certaines étapes de qualification notamment. Il faut garder en tête l’objectif et ne rien lâcher pour y arriver.
Pour moi, il y a deux phases différentes.
Si je suis en période de compétition, je vais consacrer entre 2 et 4 heures par jour (tous les jours ou presque) pour m’entraîner que ce soit après mon travail le soir en semaine ou quand je le souhaite le week-end. C’est un rythme assez intense et soutenu.
Il m’arrive de faire des préparations physiques basées essentiellement sur le renforcement musculaire. En plus de cela, j’y ajoute un régime protéiné et surtout autant de repos que possible. Au niveau du cardio, j’estime qu’il n’est pas nécessaire d’avoir une préparation physique basée dessus car les entrainements du jeu sont déjà très intenses et font travailler le cardio.
Quand je ne suis pas en compétition, je vais par exemple tourner des vidéos le vendredi, et le week-end je vais souvent être invitée à des conventions gaming pour réaliser des animations autour du jeu. Mais je tiens à préciser que je ne suis ni envoyée par l’éditeur de Just Dance (Ubisoft), ni sous contrat chez eux. Quand je pars en salon, ce sont les organisateurs qui m’appellent, pour que je fasse passer un bon moment à leur public, et ça se passe très bien. Ça me permet de découvrir un peu toute la France.
Le reste de mon temps qui est dédié à Just Dance, c’est pour échanger avec ma communauté via les réseaux sociaux notamment. Je crée moi-même mon contenu parce que ça me plait. Je réalise des vidéos sur YouTube où je reproduis les chorégraphies du jeu dans la vraie vie, dans de vrais décors. C’est beaucoup d’investissements de temps et d’argent, notamment dans les costumes mais je le fais parce que j’aime ça.
LE STATUT DE JOUEUSE PRO, MON FUTUR OBJECTIF
Comme je vous le disais je n’ai pas de contrat avec Ubisoft alors que j’ai un peu l’impression de travailler pour eux en faisant la promotion du jeu. Nous discutons ensemble depuis un an afin de faire avancer cette situation et me permettre de passer à temps plein sur mes activités sur Just Dance. Pour le moment, j’ai toujours mon travail “normal”, celui que j’avais avant que tout ma second carrière commence.
La passion ne paye pas les factures ainsi que les compétitions, car il n’y a pas de cash prize*. C’est un choix d’Ubisoft de ne pas en mettre pour que la compétition reste conviviale et bon enfant.
*récompense financière pour les vainqueurs de tournois.
Il y a des jours où il est vraiment compliqué de m’organiser. Mais j’y arrive encore, car j’ai des horaires assez souples avec mon travail, ce qui me permet de jongler efficacement entre mes différentes activités sur Just Dance. Avec mes animations le week-end, j’ai quand même dû baisser mon contrat à 80 %.
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Le rythme est assez dur, car je fais aussi parfois des streams le soir, je dois préparer les vidéos que je tournerais le week-end, je suis également souvent en convention partout en France le samedi ou le dimanche… Ça reste de la bonne fatigue, car j’adore ce que je fais.
Le secret pour tenir, c’est de bien compartimenter chaque chose et de me consacrer à 100 % dans chacune de mes tâches. Il faut savoir prioriser les choses.
J’aimerais bien passer pro même si ce n’est pas avec les compétitions de Just Dance que je vais gagner ma vie, mais plutôt au travers d’événements ou en devenant l’ambassadrice de certaines marques. J’ai des millions de vues sur ma chaine YouTube, mais comme les musiques ne m’appartiennent pas, je ne gagne rien. J’essaie de trouver des solutions alternatives pour que cet investissement et tout ce travail me rapportent de l’argent pour que je puisse enfin en vivre et m’y consacrer à 100%.
Ce serait mon rêve.
Je pense qu’il y a un avenir avec les compétitions de Just Dance, car mon jeu représente une certaine diversité et une fraîcheur dans l’eSport traditionnel. C’est d’ailleurs du vrai sport, mais sous un autre angle. Par exemple, quand on regarde une compétition de League of Legend on ne va pas forcément comprendre tout de suite, mais s’il y a bien un jeu où l’on saisit instantanément ce qui se passe, c’est Just Dance, comme son nom l’indique.
J’aimerais remercier toutes les personnes qui me soutiennent, car sans elles, je ne sais pas si je serai là. Pour moi, c’est vraiment important. J’ai la chance d’avoir un compagnon génial qui voyage avec moi tous les week-ends et qui m’aide sur les projets vidéo. Il est aussi présent niveau jeu, en m’aidant sur certains mouvements quand je bloque, alors qu’il n’est pas du tout danseur à la base.
Pour finir, j’aimerais remercier encore une fois la communauté de personnes qui me suivent. Sans eux, je n’en serais certainement pas là aujourd’hui.
DINA