Marc Marquez retrouvera-t-il son meilleur niveau ? Voilà une question que l’on n’osait même pas se poser avant son retour en Grand-Prix, il y a quelques semaines. Car rappelons-le, si le circuit de Jerez a été le théâtre de la grave blessure de l’octuple champion du monde, il a aussi été le berceau de la plus belle remontée d’un pilote en Moto GP.
Crédit : DR
Marc Marquez – Une prestation jamais vue !
Rappelons les faits : après avoir effectué un petit tour dans le bac à gravier alors qu’il était en tête de la manche espagnole, celui qui n’avait plus perdu un championnat du monde depuis 4 ans reprenait piste en 16ème position avant de revenir jusqu’au niveau de Maverick Viñales, alors 2ème de la course. Reléguant le pauvre Maverick et l’ensemble du plateau Moto GP au rôle de faire valoir… C’est alors que, porté par une fougue qui le caractérise, Marc Marquez en fera un peu trop, et chutera lourdement à 4 tours de la fin. Une chute qui aurait pu être sans conséquence physique si la moto n’était pas venue heurter le bras du natif de Cervera.
Les complications commencent…
Les soins commencent alors : une première opération pour poser une plaque fixée par pas moins de 12 vis sur l’os fissuré dans le sens de la longueur. Problème : le nerf est touché. Le Docteur Mir (homonyme du pilote moto) préconise alors un forfait pour plusieurs Grand-Prix. Mais Marc Marquez ne l’entend pas de cette oreille. Il revient dès la course suivante, mais doit déclarer forfait après les essais car la douleur est trop grande.
Marquez retourne donc chez lui se reposer, et patatras ! On apprend qu’il a cassé la plaque posée sur son os en ouvrant une fenêtre… Si personne n’a la preuve de la réelle activité qui a pu engendrer la rupture de cette plaque en titane, beaucoup sont dubitatifs à l’idée qu’ouvrir une fenêtre ait pu provoquer cette casse alors qu’il pilotait une moto de 300 chevaux quelques jours plus tôt.
Retour à la case départ : nouvelle opération pour changer la plaque, suivi d’un temps de repos respecté cette fois-ci. Mais la malchance s’y met : une infection vient se loger dans le bras de l’octuple champion du monde. Retour sur le billard pour soigner cette infection ! Cette fois-ci, le clan Marquez décide de changer de chirurgien. Preuve de la gravité de la situation : le nouveau chirurgien préfère garder l’anonymat, sans doute pour ne pas ruiner sa réputation si l’opération se passait mal. Heureusement, tout se passe bien. Et après un long processus de pratiquement un an, Marc Marquez remonte sur une moto, et termine honorablement le Grand Prix de Portimao. Soulagé à l’arrivée, il fond en larme après s’être demandé pendant l’hiver s’il n’allait pas perdre son bras…
Lire aussi : Romain Grosjean dans la monoplace de Lewis Hamilton
Marc Marquez – Le retour du boss ?
On se dit alors que Marc va vite revenir au sommet de la hiérarchie. Le public se délecte d’avance des prochains duels avec la nouvelle étoile montante : Fabio Quartararo. D’autant plus que Marquez n’en est pas à son premier pépin physique. En 2012, alors qu’il était encore en Moto 2, Marquez avait déjà été gêné par des problèmes de vue consécutifs à une grosse chute. Ses problèmes avaient duré trois mois, avant qu’une opération ne lui permette de retrouve la plénitude de ses moyens.
Marc Marquez est talentueux, peut-être le pilote le plus talentueux de l’histoire de la moto, mais le contexte de son retour pourrait-il avoir raison de lui ?
Tous les pilotes le disaient avant son retour : « Marc sera au top dès son premier Grand-Prix ». Et c’est vrai que tout commençait bien avec une belle 3ème place dès la première séance d’essai au Portugal, à moins de 3 dixièmes de la tête. Mais il ne s’agissait que de la première séance d’essai du week-end portugais. Le niveau s’est logiquement élevé au fur et à mesure des séances, et c’est à ce moment-là que Marquez a semblé le plus en difficulté, fluctuant entre la 19ème et la 6ème position, avec pour résultat final une modeste 7ème place en course. Mais alors que tout le monde pensait qu’il progresserait au Grand Prix suivant, Marquez ne se classe que 9ème du Grand Prix de Jerez, là où il avait fait sensation un an avant avec sa folle remontée terminée dans le bac à gravier.
Lutter contre la blessure et contre un matériel défaillant
Plus inquiétant, la monture du l’octuple champion du monde ne semble pas à la hauteur. Les ingénieurs Honda, orphelins de Marquez pendant un an, ne savaient plus dans quelle direction faire évoluer leur moto. Perdus, ils ont fait les mauvais choix techniques. Preuve en est : Nakagami a souhaité reprendre le châssis de l’année précédente, et cela a tout de suite porté ses fruits avec une 4ème place récoltée la semaine dernière.
Mais derrière le pilote japonais, c’est le désert : Pol Esparago, pourtant prometteur sur la KTM, ne s’adapte pas à la Honda. Et Alex, petit frère de Marc, ne s’en sort pas mieux alors qu’il attaque sa deuxième saison sur la machine japonaise.
Plus problématique encore : la concurrence a très nettement progressé pendant l’absence de Marquez. Ducati, en délicatesse avec ses pilotes usines qu’étaient Dovisiozo et Petrucci, ont renouvelé leur écurie avec succès puisque Bagnaia, Miller, et Zarco trustent régulièrement les tops positions. Yamaha, dont les pilotes se plaignaient sans cesse de l’usure de leur pneu arrière, bénéficie du tout nouveau pneu Michelin taillé sur mesure pour répondre à ce problème.
Reste la possibilité de changer de machine bien sûr ! Mais Marquez dispose d’un de 50 millions d’euros sur 4 ans chez Honda. Difficile de rompre un tel contrat. Quoi que, Zarco l’a déjà fait en lâchant KTM pour Ducati, mais ses résultats étaient bien plus catastrophiques…
Marc Marquez – Les Moto-GP de plus en plus physiques !
Dernier problème : nous voyons de plus en plus de pilotes se blesser sans nécessairement chuter, comme le précisait récemment le très expérimenté Jean-Michel Bayle qui comparait le pilotage moto GP au rugueux pilotage des moto-cross, où la part du physique est aussi importante que la part du pilotage. Nous n’en sommes pas encore là en Moto GP, mais on s’en rapproche de plus en plus ! Et pour un pilote comme Marc Marquez qui n’est pas à 100% de ses moyens physiques, c’est un obstacle de plus !
Voilà un destin qui n’est pas sans rappeler celui de Mick Doohan, qui a avait frôlé l’amputation d’une jambe avant de revenir rafler 4 titres mondiaux, puis de se retirer sur une nouvelle blessure. Comme un signe, il roulait pour le même employeur que Marquez…
Bastien Lacoste