Les sportifs ne brillent pas uniquement sur le terrain mais en apportant une aide à leur communauté par une action, une parole, une prise de position. La rubrique « Engagés » permet à un sportif de partager avec vous une réflexion sur une cause particulière.
Aristide Barraud, récent retraité du rugby, s’est trouvé au mauvais endroit, au mauvais moment. Pour penser ses plaies, il s’est fait un devoir d’écrire sa renaissance suite au traumatisme vécu lors de l’attentat du 13 novembre. Morceaux choisis de son livre, “Mais ne sombre pas”.
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Demi d’ouverture à fort potentiel, Aristide Barraud a rapidement connu les joies du plus haut niveau rugbystique : Equipe de France U20, Stade Français et même calendrier des Dieux du Stade. Le professionnalisme n’étant finalement pas un chemin sans embûches, Aristide décide de s’enrichir culturellement entre études et carrière en Italie où il finira même meilleur buteur de la première division Italienne.
Mais le 13 novembre, alors qu’il boit un verre en compagnie d’amis devant le restaurant le Petit Cambodge, il reçoit 3 balles en protégeant sa sœur Alice. Sa survie il la doit à Alice qui ne cessera de lui parler et de se blottir contre lui, à sa condition de sportif avec un cœur capable de tenir le choc et à l’intervention d’un autre ancien rugbyman, Serge Simon, qui parvient à faire évacuer Aristide jusqu’à l’hôpital Saint-Louis.
Amoureux de la langue française, il avait besoin d’écrire ce livre pour raconter sa renaissance, son rétablissement, la fin de sa carrière de rugbyman, le soutien de ses proches…
Découvrez 2 extraits de son livre “Mais ne sombre pas”, au phrasé très direct qui vous prend aux tripes :
On me demande pourquoi je n’ai pas écouté les docteurs. Pourquoi je n’ai pas pris tout le temps nécessaire pour me soigner, et passer à autre chose. Le miracle d’être en vie aurait dû me suffire, non ? Voici pourquoi j’ai agi ainsi. Voici mon egotrip.
Je fais ça pour tous les gens qui sont morts. Par respect à leur mémoire. Pour tous les gens qui ont été touchés pas loin de moi et pour leurs proches aussi. Je veux penser à eux sans honte. J’étais là, abîmé mais entier, et je n’ai pas lâché.
Le respect, ça se mérite. Chaque goutte de sueur que je verse depuis des mois, chaque grimace de souffrance est ma façon de leur rendre hommage. Pour mon orgueil, pour leur honneur. Ai-je le droit de parler de ceux qui ont eu le malheur de mourir.
Je dois boucler la boucle. Je dois revenir sur un terrain, ne serait-ce qu’une minute. C’est mon honneur qui est en jeu. Je dois toute ma carrière à mon mental. Je n’ai aucune qualité naturelle. Je ne suis ni grand ni costaud, je n’étais ni rapide ni endurant. J’ai juste travaillé dix fois plus pour m’offrir ce que j’ai vécu. Je décide seul de ce qui se passe dans ma vie. Abandonner n’a jamais été envisagé. Par fierté et par peur des regrets, une fois devenu âgé.
Pendant un an et demi, après les attentats, je n’ai rien voulu lâcher pour ne pas faire honte à ce petit mecton qui courait après son rêve.
J’ai fait cela pour moi, pour mon passé et pour mon futur. Je l’ai fait par fierté, par orgueil, personne ne décide pour moi. Je voulais choisir seul le moment de raccrocher les crampons. Depuis tout petit, je me suis forgé dans le travail et les rêves que je tentais de réaliser en m’en donnant les moyens. J’ai dû travailler plus que les autres pour m’offrir ce que j’ai vécu. Je dois respecter qui je suis. Peu m’importent les douleurs, peu m’importent les difficultés. Je dois au moins essayer.
Le livre d’Aristide Barraud “Mais ne sombre pas” est disponible à la vente depuis le 19 octobre dernier.